Les chroniques d'Oniriel

[Oniriel]

Burnout reçut l'appel de Béfirah en pleine nuit, mission urgente, probablement du youyou à casser. Elle se leva, regarda sa tête dans le miroir de la coiffeuse et fit une grimace. déjà qu'elle était laide, se faire réveiller en pleine nuit ne l'aidait pas à s'habituer à son incarnation, et pourtant elle l'avait depuis presque trois ans. Seul point positif se rappelait-elle à chaque fois, elle avait des gros seins.

Elle donna un coup de pied dans l'homme qui dormait à ses côtés, le force de l'impact le fit tomber violemment sur le sol. Il se redressa brutalement et la regarda en essayant de comprendre, elle lui dit simplement :

Tu ronfles gros tas ...

L'homme par terre avait l'air d'un adolescent avec un visage boutonneux trop maigre et des cheveux bleus, ça lui donnait un drôle d'air avec ces petits yeux noirs de fouine. Il se releva et la regarda avec un sourire mauvais.

Je ronfle toujours après avoir baisé un thon de trois cents kilos.

Elle sourit intérieurement mais garda un visage inexpressif. Congélo et elle étaient les meilleurs amis du monde, fait hautement étrange pour un démon de Crocell et une démone de Bélial. Pour garder leur relation secrète, ils s'insultaient en permanence, et en particulier en publique. Après tout, si leurs patrons respectifs apprenaient la vérité, ça pourrait chauffer grave pour leurs matricules, surtout pour Burnout d'ailleurs.

Elle commença à enfiler un jean.

On a une mission du capitaine Béfirah, faut faire une ronde de surveillance au manoir Delasalle et tuer de la poule si jamais on en trouve.

Congélo s'habilla lui aussi à la hâte. Il ne leurs fallut qu'une vingtaine de minutes pour se retrouver au volant de leur Smart vert pomme sur la rue qui bordait la demeure à surveiller.

Kariel était toujours dans la voiture, l'ordinateur sur les genoux, il s'était passé quelque chose mais les sons venant du couloir étaient trop étouffés pour qu'il ait pu comprendre quoique ce soit. Oniriel et Mickaël étaient retournés se coucher, il lui avait semblé que son coéquipier avait regardé la caméra de la sacoche avec inquiétude, mais il ne pouvait pas en être certain. Il avait entendu les deux hommes parler de Nadine Delasalle qui était arrivée, la situation allait probablement resté la même jusqu'au levé du soleil.

Il en profita pour commencer à taper son rapport à Solange. Alors qu'il était en train de se relire avant d'envoyer le document final détaillant les débuts de l'enquête, une Smart vert pomme tourna au coin de la rue ...

[Oniriel]

Kariel envoya son rapport et leva la nez de son écran, il écarquilla les yeux. Un jeune homme aux cheveux bleus venait de sortir le torse au complet par la fenêtre du côté passager de la Smart. Celui-ci tenait dans ses bras un bazooka avec marqué sur le côté droit "Meet Hell Dude!". L'ange de Jean-Luc eu juste le temps de sauter hors de sa voiture avant que celle-ci n'explose. Kariel fut projeté sur plusieurs mètres, s'étalant de tout son long sur le bitume.

La conductrice de la Smart, une femme aux cheveux noirs, arrêta le véhicule non loin des débris. elle sortit de la voiture et s'approcha de l'ange à terre d'un pas décidé.  Il en fallait plus pour abattre Kariel, il se releva faisant apparaitre une épée longue bénite et son armure corporelle argentée. La femme rigola.

Inutile de me confirmer ta nature mon cher, je t'avais déjà détecté quand tu es entré dans mon champs de vision. Tu veux jouer ?

une langue barbelée monstrueuse jaillit de sa bouche et attaqua Kariel qui esquiva au dernier moment. La contre attaque aurait dû être instantanée mais une plaque de verglas venue de nulle part le fit glisser, il tomba sur la mâchoire et cracha deux dents, le froid commençait à l'engourdir. L'homme aux cheveux bleus arriva au niveau de la démone, les deux semblaient très à l'aise pour se déplacer sur la glace.

Si vous croyez m'impressionner bandes de cornus.

Kariel se releva d'un geste et bondit vers les deux démons l'épée à la main. D'un coup net et précis il trancha dans le torse de la démone qui hurla de rage.

Congélo tendit un bras couvert de givre dans sa direction, la haine se lisait clairement sur son visage, le givre se transforma en pics gelées qui explosèrent dans la direction de l'ange, lui arrachant la moitié du bras gauche. Au même moment, Burnout, ensanglantée par son coup d'épée, fit de même avec un bras encerclé de flammes, un jet incandescent explosa une bonne partie de sa jambe.

Kariel était en sale état, sa jambe était complètement brûlée, son bras en charpie et le sang lui coulait abondamment de la bouche. aucun des deux démons ne l'avaient vu approcher sa main blessée de sa veste, ils étaient trop concentrés sur l'épée bénite pour cela. Il dégaina un Smith & Wesson et tira une balle en pleine tête de la fille. Celle-ci disparue dans un nuage de souffre suivit d'un PLOP caractéristique de la situation.

Congélo écarquilla les yeux d'horreur devant la mort de son amie, il hurla et se jeta sur Kariel. L'ange, gravement blessé, n'offrait plus qu'une résistance futile. Le démon de Crocell lui arracha la tête avec un jet de glace bien placé, le renvoyant au paradis.

[Oniriel]

Oniriel sursauta dans le lit lorsqu'il entendit l'explosion. Il se tourna vers Mickaël mais celui-ci dormait profondément. d'un mouvement délicat, il se leva et s'approcha de la fenêtre.

Quelques flammes étaient encore vaguement visibles là ou se trouvait auparavant la voiture de Kariel, une fumée noire s'élevait vers le ciel dans le clair de lune. Il n'y avait aucun voisins aux alentours du manoir, il était vraisemblable que cela soit passé inaperçu.

Kariel ...

Il devait faire quelque chose et vite, il enfila ses vêtements, ramassa sa sacoche et se glissa discrètement dans le couloir. En s'approchant de l'escalier il entendit Nadine s'agiter dans son bureau. Il risqua un rapide coup d'œil, elle était en train de ranger tout les classeurs dans un grand sac.

Il passa sans se faire remarquer et descendit les escaliers, lorsqu'il ouvrit la porte, il se retrouva nez à nez avec un adolescent boutonneux aux cheveux bleus qui le regardait l'air mauvais.

T'es qui toi ?

Je ... Je suis le copain de Mickaël et ...

Entre!

Le ton était sans réplique, il le poussa à l'intérieur. Nadine descendit les escaliers au même moment, elle eu un petit sourire en voyant Jonathan.

Tu nous quittes déjà ? Et moi qui pensais que nous allions pouvoir discuter demain matin.

Oniriel regarda tour à tour Nadine puis l'adolescent. Il déglutit difficilement et décida de jouer la carte de l'être humain jusqu'au bout.

Je dois rentrer chez moi, ma grand-mère va être morte d'inquiétude si je ne suis pas là quand elle va se réveiller. Dites à Mickaël que je vais le rappeler bientôt, je ne veux pas vous déranger plus longtemps.

Nadine s'approcha de lui amicalement, elle lui caressa la joue et fit un petit geste en direction de Congélo. Celui-ci réagit promptement et envoya son poing dans le ventre d'Oniriel. Prit par surprise, il n'eut pas le loisir d'esquiver l'attaque et se retrouva le souffle coupé, plier en deux sur le sol à observer les talons aiguilles de la femme. Elle annonça calmement sur le ton de la conversation

Tu mens!

Elle fit un autre geste et cette fois c'est un coup de pied qui le heurta dans les côtes, lui faisant cracher quelques gouttes de sang.

Qu'est ce qui se passe ? qu'est ce que vous faites?

Mickaël était dans l'escalier l'air effaré, regardant Jonathan se faire tabasser devant sa femme. Nadine sursauta, elle ne s'attendait visiblement pas à ce que son mari assiste à la scène. C'est au même moment que le regard d'Oniriel se posa sur deux épées croisées devant un bouclier Mérovingien quelques mètres à peine sur l'un des murs du hall d'entrée.

Nadine soupira.

J'aurais préféré que ça se passe autrement. Mais là, au grands maux les grands remèdes.

Elle sortit de sous son tailleur rouge un revolver attaché le long de sa jambe par un harnais. Et sans même une hésitation, elle tira une balle dans la tête de Mickaël. Celui-ci s'écroula au bas des marches le regard vide, son sang commençant à se rependre en une flaque immense sur le sol carrelé de marbre blanc.

Oniriel hurla.

NON ! NON !

Il essayait de sortir de se cauchemar, de se convaincre que rien de ce qu'il venait de voir n'était arrivé, mais le goût du sang dans sa bouche lui rappela la réalité de ce qui venait de se dérouler. Une douleur émotionnelle l'envahit et les larmes lui montèrent aux yeux, cependant, c'est la rage qui bientôt s'installait en lui petit à petit. Il regarda l'adolescent aux cheveux bleus droit dans les yeux, celui-ci s'écroula en ronflant bruyamment.

Nadine eut à peine le temps de reporter son attention sur lui qu'il avait déjà sauté sur une des épées et transpercé la nuque du démon de Crocell qui s'évapora dans un PLOP. La démone écarquilla les yeux, la situation avait tourné en sa défaveur bien trop vite à son goût. Oniriel se jeta sur elle, essayant de l'empaler sur son arme mais elle disparu avant même qu'il ait pu l'atteindre.

Tremblant, Il posa l'épée au sol et s'approcha du corps sans vie de Mickaël, le prenant dans ses bras en pleurant, il ne cessait de se répéter tout bas.

Je suis désolé, je suis désolé ...

[Oniriel]

Solange était assise derrière son grand bureau lisant attentivement le rapport que Kariel lui avait envoyé pendant la nuit. Elle était en train de s'arracher les cheveux par grosses poignées.

bla bla bla ... piste de danse ... bla bla ... toilettes du club ... bla bla bla ... acte sodomite consentant avec la cible ... bla bla bla ... manoir ... bla bla ... positions sexuelles indécentes ... bla bla.

Après la quatrième relecture, c'était toujours aussi inacceptable, il allait falloir sévir contre lui. Solange appuya sur son interphone.

Faites le entrer dans mon bureau.

Oniriel pénétra dans la pièce et alla s'assoir en face de sa supérieure. Il avait la mine déconfite, les mains et les vêtements couverts de sang. elle le regarda l'air sévère.

L'équipe envoyée après votre appel téléphonique de cette nuit vient à peine de finir de nettoyer les lieux. C'est un fiasco! UN ÉNORME FIASCO !

Oniriel sursauta à chacun des mots criés.

Le cadavre de Monsieur Delasalle a été laissé sur place, la police ne trouvera rien qui permette de remonter la piste jusqu'à toi. Maintenant, je veux repasser en revu avec toi les informations que tu as transmises par téléphone.

Elle ramassa dans un tiroir une note de service daté de quelques heures à peine.

L'ange Kariel est décédé - Oniriel acquiesça de la tête.
Mickaël Delasalle aussi - Nouveau hochement de tête.
Où sont les classeurs avec les informations bancaires de Nadine Delasalle ?

Oniriel regarda Solange et parla d'une voix morne.

Quand je suis remonté dans le bureau, le sac contenant tout les classeurs avait disparu. Je soupçonne la démone de s'être téléportée dans son bureau, d'avoir ramassé le sac et de s'être téléportée à nouveau mais loin du manoir cette fois.

Solange grimaça.

Le numéro de compte que tu avais noté a été fermé ce matin, les deux millions d'euros se sont envolés on ne sait où et Nadine Delassale est introuvable. Pire ! d'après nos sources, elle vient de faire une conférence de presse pour les deux casinos de son mari en Italie. Ce qui signifie qu'elle sera mise complètement hors de cause dans la mort de son époux puisqu'elle se trouvait à plus de milles kilomètres du lieu du crime. Comme elle n'a jamais pris l'avion et que la téléportation ne peux pas se rendre si loin, nous soupçonnons la complicité d'un démon polymorphe. elle va donc hériter de l'intégralité de ses biens.

Elle ne pensait pas cela possible mais Oniriel paraissait encore plus abattu qu'au moment où il était entrée dans le bureau. Elle poursuivit.

Un de nos agents doté du pouvoir de psychométrie a confirmé la présence de deux démons dans une Smart verte, un homme et une femme, Kariel aurait tué la femelle et toi, si j'en crois ton récit, tu aurais tué l'homme dans l'entrée du manoir.

Oniriel acquiesça une nouvelle fois.

La démone connue sous le nom de Nadine Delasalle s'appelle XXiemeciel, elle est connue de nos service, c'est une capitaine d'Andréalphus extrêmement dangereuse. Elle nous glisse entre les doigts depuis des années. Je dois reconnaitre que personne ne s'attendait à tomber sur une grosse pointure démoniaque, à ce niveau la, tu auras peut-être une petite indulgence de ma part, nous aurions dû envoyer une équipe plus expérimentée. Par contre ...

Elle plaqua le rapport de Kariel sur le bureau d'un coup sec faisant claquer les feuilles.

Ton comportement durant cette mission était inadmissible! Je dois envoyer un rapport à mes propres supérieurs. Je pense que tu auras bientôt de leurs nouvelles. Va prendre une douche et ne reviens devant moi que quand je t'appellerai. d'ici là, tu restes dans ta chambre et tu ne fais rien!

Oniriel ne se le fit pas dire deux fois, il se leva précipitamment et rentra chez lui la tête basse.

[Oniriel]

Le lendemain matin, la mort de Mickaël Delasalle faisait la une de tout les journaux. Oniriel passait ses journées à dormir, essayant de se vider la tête dans la marche des rêves. Pendant ce temps, le dossier envoyé par Solange avait fait sa course à travers l'administration pour se retrouver sur le bureau d'un grade trois de Dominique. Jean Aimaclak souleva ses petites lunettes carrées à trois reprises.

Il vérifia deux fois que le dossier concernait bien un ange. Et avec le calme le plus serein il appuya sur le petit bouton rouge de son téléphone. Une voix lui répondit.

Oui Jean ?

Nous avons un code rouge monsieur. Je vous envoi le dossier. Vous aviez demandé à être prévenu quand nous aurions un sujet qui pourrait servir d'exemple.

Jean envoya le dossier à l'archange, celui-ci le parcouru rapidement en faisant régulièrement des "hmm" sonore.

Le serviteur Solange préconise un blâme pour l'échec de la mission et un blâme pour les actes innommables qu'il a commis. Et ...

Dominique l'interrompit.

Deux Blâmes pour l'échec cuisant, un pour les actes de luxure et quatre parce que ses actes étaient de natures ignominieuses, il ne manquerait plus qu'on conserve des anges homosexuels maintenant! Vous avez eu raison de me prévenir, cet ange servira d'exemple. A la moindre incartade de sa part, vous me le renvoyez illico au paradis.

La tonalité s'échappant du combiné fit comprendre à Jean que la discussion était terminée et que le verdict était tombé. Il remplit la fiche de punitions et l'envoya aux services de Blandine pour confirmation avant mise en application. La routine habituelle quoi.

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Lorsque Blandine fut mise au courant qu'un de ses anges allait recevoir sept blâmes d'un coup, elle décida quand même de jeter un coup d'œil au papier, ce n'était pas le genre de choses qui arrivaient tout les jours. Après avoir pris connaissance du dossier, elle appela sa grade trois la plus fidèle.

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Théodore travaillait dans les services de Didier depuis des siècles, il avait la lourde charge, avec douze de ses confrères, de mettre en application les récompenses et punitions sur Terre en mettant à jour les dossiers administratifs.

Ils avaient pour habitude de discuter entre eux des cas les plus marrant, lorsque Théodore se retrouva avec la fiche de punition pour Oniriel il ne put s'empêcher de la montrer aux autres.

Hey, les gars, venez voir ça! il a battu des records celui-là, Dominique a préconisé sept blâmes ...

Sifflement admiratifs des collègues.

Mais Blandine à fait savoir que le crime d'homosexualité n'était valide que dans les contrées les plus arriérées de la Terre et qu'il était hors de question que le Paradis soit considéré comme un pays attardé.

Rire des collègues.

Il finit donc avec une cicatrice sur le visage pour l'échec de  sa mission, une phobie de la technologie pour les actes commis et une affectation de trois mois à faire du bénévolat soixante heures par semaine parmi les humains. il est aussi mis au placard jusqu'à nouvel ordre.

Petites moues des collègues laissant penser que l'ange s'en tirait plutôt bien. Le petit nouveau du service, un ange de Didier fraichement nommé ami, se rapprocha de Théodore.

Et pourquoi tout le monde s'est marré à propos de la phrase de Blandine ?

Théodore regarda autour de lui pour faire sûr que personne ne les écoutait. Puis il annonça tout bas.

il y a pas mal de rumeurs comme quoi Blandine aimerait bien brouter des minous de temps en temps si tu vois ce que je veux dire ...

[Oniriel]

Oniriel se leva à cinq heure du matin, comme tout les jours depuis maintenant trois semaines, il allait passer sa journée au centre Sainte Marie-Philippe de Bellevue à distribuer des repas chauds aux sans-abris de la ville. Il regarda la cicatrice qui le défigurait et l’atténua avec un peu de maquillage. Pour se rendre à l'église, il avait vingt-cinq kilomètres à faire et le métro ou le bus lui fichait une trouille incroyable. Il avait donc récupéré un vélo grâce à Solange pour ses déplacements.

Il restait jusqu'à huit heure du soir ou il retrouvait un petit scribouillard de Dominique qui s'asseyait en face de lui et l'interrogeait avec les mêmes questions, encore et encore. Le gratte papier s'appelait Siegfried et se prenait ouvertement pour plus important que ce qu'il était réellement. La liste des questions était inlassablement la même, mais cette fois, Oniriel avait décidé de jouer un peu avec lui. En discutant avec les bénévoles et les sans-abris, il avait appris beaucoup sur la vie sur Terre.

Seigfried était petit et maigre avec un visage rachitique complètement caché derrière d’énormes lunettes qui lui donnaient un regard de mouche. Il parlait avec une voix pincée, parsemée de petits couinements laissant penser qu'il prenait un plaisir presque orgasmique à faire souffrir les anges qu'il interrogeait.

Ne perdons pas de temps, première question, avez-vous eu des rapports sexuels entre notre entrevue d'hier et celle d'aujourd'hui ?

Oniriel connaissait les questions par cœur, il lui avait proposé de lui donner une liste de oui et de non pour gagner du temps, mais l'autre ne semblait pas l'entendre de cette oreille.

non, quoique je me demande, supposons que je me sois fait tailler une pipe hier soir dans les toilettes du bar des Alouettes par Robert, le gros motard habillé en cuir qui traine toujours là-bas. Est-ce que ça compte comme un rapport sexuel ? Je demande ça parce que Clinton et Lewinsky semblaient avoir des versions différentes sur le sujet.

La tête de l'ange de Dominique se décomposa littéralement, il bégaya quelques mots incompréhensibles et rajouta au stylo une nouvelle question sur sa fiche à la hâte.

Avez-vous eu des relations bucco-génitales depuis que vous avez été puni ?

Oniriel lui fit un sourire le plus hypocrite possible, ce qui n'était pas très difficile quand il regardait l'emmerdeur en face de lui.

Non, par contre, les contacts bucco-anales doivent être très agréable, heureusement qu'ils ne rentrent pas dans ce cas de figure, sans parler du massage du pénis qu'offre dans son salon d’esthétique la suédoise à deux pâtés de maisons de l'église.

Siegfried se redressa d'un bond de sa chaise en hurlant. Son pouvoir de détection lui confirmait qu'Oniriel disait la vérité.

Suppôt du malin, vous êtes indigne d'être un ange! Je vais faire un rapport et vous renvoyer au ...

Oniriel garda son calme et l'interrompit dans sa tirade.

Un peu de sang froid voyons, je n'ai rien fait de tout cela, en fait je n'ai rien fait du tout à part servir des repas aux SDF et parler avec les humains de la vie. Je ne faisais que vous aider à améliorer votre questionnaire.

L'ange de Dominique serra les dents et reprit sa place sur sa chaise. Il savait qu'Oniriel avait dit la stricte vérité, à son grand mécontentement, mais il savait aussi qu'il faisait cela exprès pour l’exaspérer. Il décida de passer tout simplement aux questions suivantes.

Avez-vous fait le nombre d'heures de bénévolat prescrites par votre administration ?

Oniriel décida de lui pourrir la vie jusqu'au bout.

Non.

Seigfried pointa son stylo vers Oniriel en éructant un "Ha!" triomphale.

J'en ai fait plus que prévu, j'ai fait des heures supplémentaires toute la semaine pour aider à préparer les lits.

La bouche de Siegfried resta entrouverte dans une mimique plutôt comique, il cherchait apparemment quoi répondre à ça. Finalement il décida de plier ses affaires et de partir. Il ferait son rapport à Solange, de toute façon, vu qu'il n'était que grade zéro il ne pouvait pas faire grand chose de plus. Il sortit sans dire un mot sous le regard amusé d'Oniriel.

[Oniriel]

Il était tard ce soir là, Oniriel avait terminé sa journée, il fumait une cigarette à la fenêtre de sa chambre vêtu d'un simple caleçon. Quelqu'un frappa trois petits coups rapides à la porte. Il savait que c'était Solange, elle frappait toujours de la même façon et elle était aussi la seule à venir le voir le soir pour discuter.

Entre.

La petite vieille pénétra dans la pièce mal éclairée de sa démarche lente, elle lui fit un petit sourire avant de s'assoir sur le bord du lit. Il appréciait énormément Solange, c'était une bonne personne, quelqu'un de droit et juste. Il se doutait que son enfantillage avec Siegfried avait dû lui remonter jusqu'aux oreilles, mais cela avait peu d'importance, il n'avait rien fait de répréhensible après tout.

Siegfried a fait un rapport sur toi, rien de consistent, il n'est décidément pas doué pour savoir quand on se paye sa tête. Je suppose qu'il apprendra avec le temps.

Elle regarda le bout incandescent de la cigarette dans les mains d'Oniriel.

Tu fumes maintenant ?

Il jeta son mégot par la fenêtre.

J'ai eu beau chercher dans la bible je n'ai rien vu concernant le tabac, alors je me suis dit pourquoi pas.

Il avait toujours la bible que Kariel lui avait donné. Il la gardait précieusement en souvenir du défunt.

Tu sais, il ne me reste plus grand chose, je suis un peu pieds et poings liés, ma vie terrestre est plutôt mal barré. Parfois je me demande si on ne devrait pas tout simplement me renvoyer là-haut. J'ai l'impression d'être un boulet ici.

Solange le regarda en souriant, un sourire énigmatique. La gradée de Dominique était sur Terre depuis longtemps, quelques décennies. Elle savait beaucoup de choses et avait un grands nombre de contacts un peu partout.

Ne soit pas si défaitiste, j'ai trouvé un truc pour toi. Je me suis arrangée pour que tes punitions soient levées dans quelques mois. Tu recevras alors une nouvelle affectation. Un endroit où tu pourras repartir à zéro, recommencer sur des bonnes bases.

Les paroles de Solange avait attisées sa curiosité.

Vraiment? L'administration me laisserai une seconde chance, je pourrai à nouveau faire des missions?

Solange lui tendit une enveloppe qu'elle sortit de son sac à main.

J'ai dû demander une faveurs à un ami de longue date qui est maintenant grade trois, mais oui, tu pourras recommencer comme si tu venais de t'incarner pour la première fois. Je te préviens, il est possible que ta mémoire soit altérée en allant là-bas, je n'en sais pas plus, et de toute façon je ne peux pas en parler.

Oniriel prit l'enveloppe dans sa main, il avait les larmes aux yeux tellement la gentillesse de Solange le touchait.

Merci Solange, merci pour tout. Tu sais, tu es la seule amie que j'ai ici. Tu vas me manquer quand je partirai.

Solange ne répondit rien, elle se leva, lui pressa affectueusement l'épaule puis se dirigea vers la sortie. Oniriel ouvrit l'enveloppe, elle contenait un billet de train pour la ville de Immac-sur-Sable. La date sur le billet était pour dans quelques mois seulement.

Le lendemain il alla faire son bénévolat le cœur léger...

[Oniriel]

Lorsqu'Oniriel se leva se matin là, il remarqua que sa cicatrice sur le visage avait disparue. Il sourit pour lui même, le grand jour était enfin arrivé. Il mit ses rares affaires dans un sac à dos et se dirigea vers la gare. Une nouvelle vie aller pouvoir commencer. Sur la table de nuit, il écrivit un dernier petit mot à Solange.

Quelques heures plus tard, le train avançait doucement dans un roulis monotone, alors qu'Oniriel commençait à s'endormir sur son siège, bercé par le mouvement, sa mémoire devint de plus en plus floue. Comme si son passé avait subitement cessé d'exister. Lorsqu'il posa le pied sur les quais de la gare, il avait presque retrouvé son innocence originel.

Les seuls choses dont il se rappelait étaient que sa présence ici était une chance et qu'il ne fallait pas qu'il la foute en l'air. Durant une seconde, le souvenir d'une vieille dame passa furtivement dans sa tête, mais impossible de mettre un nom sur le visage.

Il marcha jusqu’à la vieille ville et observa les grandes portes magnifiques de l'église. Il passa le seuil en ignorant que son dossier venait lui aussi d'arriver sur le bureau des services de Dominique de Immac.

[Oniriel]

Cela faisait maintenant une bonne demi-année qu’Oniriel était arrivé plein d’innocence et d’émerveillements dans cette petite ville incongrue qu’était Immac-Sur-Sable. Il avait vite sympathisé avec ses collègues angéliques, intégré une section et commencé à enchainer les missions comme semblait le faire tout le monde ici.

Le temps passait inexorablement, laissant s’estomper petit à petit la joie et la bonne humeur qui semblait le caractériser à son arrivée. D’ailleurs, depuis maintenant plusieurs semaines, il se faisait rare au café et ne socialisait presque plus avec ses amis, il restait isolé, à contempler par la fenêtre les différents mouvements du soleil à l’horizon ou le vol des oiseaux qui commençait à partir pour passer l’hiver dans un endroit plus clément.

Il avait bien tenté une opération hors des sentiers battus, mais cela s’était terminé en fiasco complet. Enfin, à ses yeux, d’une certaine façon, s'était une demie réussite. Ce qu’il avait réalisé en fréquentant les humains pendant ses quelques jours l’avait transformé à jamais, c’est d’ailleurs à ce moment la qu’il avait commencé à s’éloigner de  plus en plus du café des anges, il passait maintenant la presque totalité de son temps sur la marche terrestre se contentant de répondre à ces collègues quand ceux-ci le contactaient ou bien quand il devait leurs transmettre des informations importantes.

Il entra dans un bar de la ville et alla se commander une bière. Un homme lui adressa la parole.

Salut.

Le gars à côté de lui qui venait de l’aborder était un homme dans la trentaine, séduisant, avec des lunettes ovales et un costume noir plutôt élégant. Déjà blasé par ces quelques mois de vie à Immac, le premier réflexe d’Oniriel fut de lui lancer lecture des sentiments et lecture des pensées en le gratifiant d’un bonjour négligeant. Il réalisa soudain a quel point il avait changé en peu de temps …

[Oniriel]

Son tee-shirt vola à travers la chambre suivit peu de temps après par son pantalon. Ses pouvoirs n’avaient rien révélé si ce n’est  que Joshua était un être 100% humain et qu’il le trouvait mignon.

Oniriel se fit plaqué contre le mur et embrassé fougueusement par son nouvel amant. Son cœur s’emballa, un souvenir lointain vint raviver quelque chose en lui. Il se laissa complètement aller vers le tourbillon de sensations qui l’envahissait, il se sentait vraiment bien, il se sentait heureux et vivant pour la première fois depuis longtemps.

La nuit fut torride et surprenante, son corps semblait se souvenir de choses que lui-même avait oubliées. Il partageait naturellement son corps et Joshua le lui rendait bien. De la toupie Japonaise en passant par l’accordéon Russe, les positions exotiques se succédaient sans trop savoir d’où il pouvait bien les connaître, il était peut être tout simplement très imaginatif.

La nuit était déjà bien avancée lorsqu’ils s’endormirent dans les bras l’un de l’autre… bercée par la respiration de Joshua, Oniriel ne trouvait cependant pas le sommeil. Après avoir fait l’amour, la culpabilité l’avait envahie, il ignorait pourquoi, un acte aussi beau et simple que celui-ci ne pouvait pas être foncièrement mauvais et pourtant, une petite voix enfouie au fin fond de son cerveau lui disait qu’il allait avoir de gros ennuis.

Il réalisa alors qu’il s’en fichait complètement, il n’avait qu’à rien dire, ni à Beretta ni à Marinette, et puis tout ira bien …