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Be. Fi. Ra.
#1
Environs de Paris, 1762. Mariette, moins que rien dans un village perdu loin de l'attention de la cours, donne naissance à sa cinquième fille, à la grande colère de son mari.
Il emmena le bébé encore plein de sang afin de la laisser aux loups, mais change d'avis en route. Autant en retirer un peu d'argent. Il se dirige donc vers le camp de bohémiens apperçus la veille non loin des faubourgs.
Elle ne dit rien, il est mieux qu'elle meure, elle aurait pu trop ressembler à son père, qui n'est pas le père de ses autres enfants ... Un homme de passage ... un étranger poursuivi ... Si beau, grand, avenant et qui lui avait fait connaître l'extase pour la première fois de sa vie. Elle ne se rappelait pas de la suite, elle s'était étrangement endormie immédiatement après, et réveillée seule avec ce souvenir brûlant.
Les bohémiens achetèrent le bébé pour presque rien, et décidèrent d'en tirer ce qu'ils pourraient.

Elle apprit très tôt à voler la nourriture si elle voulait manger, et à se défendre contre les autres enfants, et obéir aux adultes, qui avaient droit de vie et de mort sur elle, les uns comme les autres.
Plus chétive que les autres, elle apprit aussi à se faire des alliers parmi les enfants et faire retomber ses propres fautes sur ceux qu'elle aimait le moins.

Paris, 1767. La gamine, qui n'a toujours pas de nom, fait la manche dans la rue en face d'un couvent. Un des seuls de la ville qui ne lui paraisse pas hostile, sans qu'elle comprenne pourquoi.
Une mère de famille bourgeoise, en quête d'une bonne action, décide de la sauver de ce « destin horrible » et propose au bohémien qui vient récupérer l'argent récolté régulièrement de la lui racheter afin qu'elle soit élevée en bonne chrétienne. Le bohémien trop heureux de se débarrasser de cette plaie la vend donc, convenant d'un rendez-vous le lendemain.
Le prix d'achat suffit à peine pour racheter le matériel pour reconstruire cinq roulottes, qui ont prix feu mystérieusement dans la nuit. Le coupable fut retrouvé peu après avec des preuves : le père adoptif de l' « étrangère ». Il fut d'un commun accord éliminé par la troupe, malgré ses protestations d'innocence.

Au couvent, le lendemain :
La mère supérieure l'accueille en la regardant de haut.
Alors voilà la petite rachetée aux bohémiens ... Mais regarde-toi, tu n'as que la peau sur les os ...

Je te préviens, ici la discipline est très stricte, tu devras oublier tout ce que tu as appris chez ces gens-là, quel que soit l'amour que tu leur portais. Et n'oublie jamais que c'est grâce à la générosité d'une grande dame que tu es ici. Au moindre écart de conduite tu seras sévèrement punie, je veux que tu apprennes rapidement les règles.
Bon, tu t'appelles comment ?


Ben, j'ai pas d'nom, m'dame. On m'en a jamais donné.

La mère supérieure regarde son registre en soupirant.

Doux Jésus, Pas de nom ... Bon, on en est où ... B ... B ... B .... Bethina, ça ira.
Il faudra te baptiser le plus tôt possible.


La mère sup' écrit donc dans son registre : Bethina – Fille – Rachetée
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#2
Paris, 1769.
La fillette grandit, continue de se comporter comme elle l’a appris avec les bohémiens et dans la rue. En quelque sorte, les qoeurs sont plus cruelles que les enfants des rues. Les punitions pleuvent, faisant grandir à chaque fois sa haine pour l’église et ses sbires, et elle apprend à se comporter comme on lui demande, en apparence.

Dans son coeur, aucun des grands sentiments qu'on lui rabâche jour après jour. Elle ne trouve aucun réconfort dans la prière et la méditation, mais elle se complait dans la mésentente de ses camarades, si facile à faire naître avec si peu d'efforts. Une remarque par-ci, un objet caché par là. La confiance et l'amitié se perdent si facilement.

Elle réussit à présent à entrer dans la chapelle. Elle s’est rappelé des rites que lui avait montrés la vieille sorcière pour salir un lieu sain. Même l’eau bénite lui semble de moins en moins menaçante.
Après avoir créé plusieurs incidents pour retarder son baptême, qu’elle voyait vraiment d’un mauvais œil, elle a réussi à pervertir l’eau bénite à temps et a laissé faire la cérémonie, après tout le nom inscrit dans le registre n’était pas son vrai nom, quel qu’il soit. D'ailleurs, il faudrait qu’elle s’en choisisse un, un jour. Elle inventerait elle-même sa propre cérémonie de baptême impie.

Novembre 1769.
La mère supérieure envoie un courrier à ses supérieurs, rien ne va plus au couvent. Les filles se disputent, il semble que deux camps se forment parmi elles, sans qu’on sache trop pourquoi.
De plus, la chapelle a été plusieurs fois dégradée, on y a retrouvé des chats noirs égorgés, des rats morts sans raison apparente. En grande quantité. Les filles ont peur d’y aller, et certaines nonnes aussi.
Elle ne sait pas trop si le courrier sera suivi d’effets, les problèmes d’un petit couvent perdu dans Paris intéressent-t-il vraiment la hiérarchie religieuse ?

Janvier 1770.
Dans le froid de son bureau, le vieux religieux lit les courriers qui sont arrivés les derniers jours. Demandes de subsides, rapports de missions, la routine, mais c'est ce qu'il aime.
La lettre suivante retient son attention. Une chapelle dégradée, la discorde qui sévit dans un couvent qui n'avait jamais eu de problèmes auparavant. On l'a mis en garde contre ces signes. Des signes ténébreux, annonciateurs de grands malheurs.
Il sait quoi faire. Il sort le parchemin spécial qu'Il lui a confié. Il va l'aider dès qu'Il le recevra, Il le lui a assuré.
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