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le Projet Golgotha
#11
1. The first rule of Fight Club is, you do not talk about Fight Club.
2. The second rule of Fight Club is, you DO NOT talk about Fight Club.
3. If someone says stop, goes limp, taps out, the fight is over.
4. Two guys to a fight.
5. One fight at a time.
6. No shirts, no shoes.
7. Fights will go on as long as they have to.
8. If this is your first night at Fight Club… you have to fight.



Tyler Durden





Chapitre VII : Fight Club



A ce stade du récit, il convient de préciser un peu l’apparence de notre héros.
Malback en ce temps la était incarné dans le corps de Nino, un Rom Kalderach originaire de Poprat en Tchécoslovaquie.
Il avait du fuir l’Europe de l’Est apres un quintuple meurtre : une bande de skins nihilistes néo-nazis avait cru malin de s’attaquer a un rom seul et bourré, sans savoir qu’il s’agissait de Malback tout juste incarné et encore sous le choc du transfert.
La police locale recherchait encore le „tueur a la faux“ responsable de cette boucherie.

La peau basanée par le soleil, un visage taillé au couteau, une cicatrice parcourant son arcade sourciliere droite, les cheveux gominés (en brosse dessus, longs derriere, années 80 power) et une lourde boucle d’oreille en or pendant a son oreille droite lui donnaient un air assez peu avenant, au final.

C’est en se faisant passer pour un portoricain qu’il prit un ticket de bus Greyhound en direction de Detroit. Une legere valise de cuir a la main, il attendait le bus sur le quai, dans la douceur de cette fin de journée d’été.

Apres avoir dévisagé les autres passagers, des familles ou des travailleurs de retour pour le week-end, il écrasa son mégot au moment ou le bus s’arretait dans un crissement devant lui.
Il ne pensait pas avoir été suivi, a priori personne ne connaissait sa destination, il pouvait donc se relaxer ; il s’accorda ½ heure de sommeil dans la nuit a venir.


****************************


Les stations s’enchainerent pendant la nuit : Hartford, Syracuse, Buffalo, Cleveland, Toledo et enfin Detroit, Michigan.
La ville, entamant sa conversion en vestige de l’industrie frénétique des glorieuses années de la production automobile, se napait dans la paleur de ce matin frele d’un voile post-apocalyptique tout a fait ravissant.
Une fois seul sur le quai desert, sans ressentir le moins du monde la fraicheur environnante, Malback se dirigea vers une cabine téléphonique, sortit un papier de sa poche, fit gober un quarter a la machine et composa un numéro.


Il achevait sa clope et s’appretait a l’écraser du talon de sa santiag lorsque la chevrolet 59 Impala apparu a l’autre bout du parking.
Elle se gara a quelques metres, laissant admirer la rouille envahissant la carosserie d’une couleur indéfinissable, et un monstre en descendit au prix de pénibles efforts.

Un monstrueux rasta, frolant les 2,20m pour pas loin de 150 kilos, la barbe tressée et des dreadlocks comme une araignée cauchemardesque sur la tete, le fixait de ses yeux noyés entre les replis de chair des orbites. Il grogna, faisant tressauter son nez porcin.



- „Héyo, hommie !"

- „Hi Dude."


Les deux hommes se serrerent dans les bras, enchainant leur accolade par un shake-hand complexe digne des plus grands gangstas.


- „Ca fait une putain de paie, hein, enculeur de maman.“*

- „Tu l’as dit comme ca, enculeur de maman de bouffi“

- „Ouais mec. Je te conduis dans ma putain de maison ou tu veux visiter cette putain de ville, partenaire ?“

- „Vois, mec : est-ce que tu vois un putain d’appareil-photo attaché a une sangle autour de mon putain de cou, mec ? Je suis pas un putain d’enculeur de maman de touriste, frere.“

- „D’accord, frere. Laissons aller dans ma place, mon antre trop classe yé yé - Snap Snoopie Badd Dogg est dans la place, il te met une balle dans la face han han, heyo baby baise moi toute la nuit han han“


La voiture accelera tandis que Badd Dogg commencait a raper dans son style si particulier, et s’engagea sur l’avenue dans un crissement de pneu (en amérique le moindre virage est source de crissement de pneu).

Ils arriverent 45 minutes plus tard dans un genre de campement de mobil-homes anarchique.
La chevrolet s’arreta (dans un crissement de pneus, donc) en face d’une des caravanes, et Badd Dogg coupa le contact.



- „Maison, putain de douce maison…“


En sortant, Malback croisa le regard curieux d’un jeune homme de 15 ans a tout péter, plutot malingre et blond comme les blés.


- „Heyo Monster ! Comment c’va ?“

- „Heyo Marshall. Putain de bien mec. Prend soin“.


Le gosse sourit au monstre rasta.


- „Monster !“


Une femme paraissant beaucoup trop vieille pour son age probable, vetue d’un chale rose, sortit en titubant du mobil-homme voisin. Les cheveux blonds délavés, un maquillage de pute aveugle, et la marque des ans et de la misere sociale gravés comme autant de rides sur son visage.


- „Marshall ! A la maison. Monster, vous n’auriez pas un peu de Subutex ? J’ai fini ma derniere boite…“

- „Sur M’ame Matters. Donnez moi quelques minutes je passe vous voir.“


Les deux démons rentrerent dans la caravane. Badd Dogg expliquait en meme temps que la vieille peau d’a coté était une de ses créations : une jeune mere brisée par la vie, rendue dépendante a la coke puis en desintox permanente, gavée d’anti-depresseurs et dont le fils avait toutes les dispositions du ‚problem child‘.

Sur le canapé miteux dans le „salon“ du camping, deux nanas completement défoncées dodelinaient de la tete en bavant
.


- „Cassez-vous, salopes ! Allez dégagez et aller faire votre coma plus loin !“


Le démon de Shaytan les poussa tant bien que mal dehors, et claqua la porte.


- „Sers toi un verre pendant que je vais filer ses pilules a la mere Matters. Pendant que j’y pense, elle suce pour 20 dollars, heeeehehehe. En plus c’est que du bonheur : elle a les dents qui branlent a cause des acides qu’elle gobait y’a 5 ans ! Heeeeeeeee hehehe eeeeeeheheheeeeeeeee…“


Le gros porc s’éloigna en rigolant betement.

Malback ecarta les seringues qui trainaient sur la table et se servit un sky – enfin bu a la bouteille, y’avait pas de verres.

Badd Dogg revint quelques minutes plus tard
.


- „Hey mec, en venant ici ce matin j’ai vu une cadillac blanche nous suivre. La elle vient de repasser sous la voie de chemin de fer derriere le dépotoir. T’es pas suivi j’espere…“

- „Nan mec. Je suis un peu un professionnel je te rapelle. Bon tu deviens quoi ?“


Les deux démons converserent longuement, entrecoupant les récits romancés de leurs aventures respectives de rails de coke, de whisky bas de gamme et de gros joints énormes.
Il fut convenu que le soir, ils se rendraient dans un club underground de Detroit tenu par un Andréalphus a la retraite (l’Administration l’avait envoyé dans le corps d’un homme décédé durant son opération d’ablation des testicules) ou des rap-battles se déroulaient régulierement, et parfois y’avait meme une vraie baston. C’était blindé de minettes pretes a se laisser enfiler comme des perles et la came circulait a outrance.
Une soirée sympa quoi.


********************************


Le soir venu, ils prirent la direction du club, sobrement appelé „the Vault“, et Badd Dogg lanca a Malback :



- „La cadillac blanche est juste derriere nous, Hommie. Le conducteur est un blanc du genre armoire a glace apparement.“

- „Fuck. On continue, on avisera pendant la soirée, s’il est toujours la.“


Ils arriverent sur place une vingtaine de minutes plus tard, suivis a distance respectable par la cadillac. Pas moyen de se tromper : une horde de jeunes noirs, habillés dans le plus pur style gangsta, discutaient, rappaient, fumaient ou dancaient aux portes du club.

Les deux colosses a l’entrée s’effacerent devant Badd Dogg, qui entraina Malback a sa suite vers les profondeurs enfumées de la cave.
Une lumiere rouge tres vive accentuait les traits et les gestes de la faune locale. Sur une scene au centre, micro a la main, deux mecs se balancaient des rimes au visage, jouant du débit et des attitudes pour enerver l’adversaire. Un DJ plongé dans l’ombre mixait sur une estrade, les énormes baffles situées au quatre coins de la piece staurées par le beat lourd et repetitif.
La foule ondulante, autour, applaudissait a chaque bon mot, ou huait celui dont les attaques étaient faiblardes ou mal placées.

Traversant la foule en poussant tout sur son passage Badd Dogg alias ‚Monster‘ se dirigea vers le bar.
Alors qu’ils devisaient, Badd Dogg poussa Malback du coude. Dans l’encadrure des escaliers, un des gorilles de l’entrée était en train de rouler inconscient.
Pendant que la foule réagissait, un deuxieme corps déboula, la musique s’arretant brusquement au moment ou sa tete émit un bruit inquietant contre le montant du jukebox.

Descendant lentement les escaliers, apparu progressivement une montage de muscles, crane rasé et visage froid. De cuir noir vetu, il plia ses lunettes noires d’une main gantée de noir alors qu’il s’engageait au milieu de la foule de noirs qui s’écartait. Son crane lisse et rasé apparaissait cramoisi dans la lumiere des spots.
Un type essaya de le saisir, mais d’un geste l’homme en noir lui agrippa le bras, le tordit en un craquement sinistre et il se retrouva par terre le poignet brisé. Mouvement de stupeur parmi la foule, qui gronda.

(La scene suivante se déroule dans une lumiere irréelle digne des plus beaux clips de R’n’B sur MTV.)

L’homme s’arreta au milieu du cercle deserté par les rappeurs, tomba sa veste, enleva sa chemise en exhibant ses pectoraux glabres. Il avait une représentation de la vierge tatouée sur son dos musculeux, et une croix gammée sur le pectoral droit.
Il fit craquer ses cervicales et pointa Malback du doigt en faisant flasher une aura de Grade 2 de Daniel.

Malback, apres un instant d’hésitation, reposa son Mojito, repoussa la meuf installée sur ses genoux et se mit torse-nu également, découvrant un torse parcouru de tatouages et de cicatrices.

Badd Dogg lui indiqua discretement le flingue qu’il avait glissé dans le pantalon, en haussant un sourcil, mais Malback secoua la tete négativement
.


- „Fucking nazis. I hate those guys…Si il est en passe de gagner, aligne le. Mais pas de plop au milieu des humains.“


Il s’avanca au milieu du cercle en slow motion, faisant flasher son aura de Capitaine de Baal, tandis qu’a nouveau un beat lourd commencait a résonner dans la piece et que la foule reprit son brouhaha.

Les deux adversaires se mirent en garde, la determination se lisait dans leurs yeux.


Ca va pas etre cot…

Le TGV qui arriva dans la tempe de Malback explosa a son oreille comme un baton de dynamite. La vue brouillée instantanement, Malback tituba et manqua de se rétamer sur le billard. Dans un mouvement de balancier, il vit son adversaire caresser sa chevaliere „aigle imperial“ tachée de sang.
Il tenta de se remettre debout lorsqu’un formidable coup de pied dans les cotes le renvoya de l’autre coté de la scene. Les jambes tremblantes, Malback essaya de se remettre sur ses genoux, un filet de bave et de sang s’échapant de sa bouche.

Mais l’autre arriva et lui cogna la tete comme une brute, le reclouant au sol. Il le saisit et l’envoya valser par dessus le billard.
La foule hurla, tandis que le géant leur faisait des doigts d’honneur en souriant d’un air entendu.

De son coté, Malback était pas au mieux de sa forme. Son flanc droit le faisait souffrir et il devait avoir une ou deux cotes pétées.
Il remit de l’ordre dans ses idées et se releva, saisissant au passage la boule blanche située de son coté.

Il la lanca de tous ses 5 points de Force en direction de la tete du Daniel, mais celui-ci esquiva le projectile en mode Néo-style.
La boule vint s’enfoncer dans le mur d’en face, frolant la tete d’un spectateur.
D’une détente de la jambe, Malback fit glisser le billard vers l’ange, le fauchant net.
La montagne de muscle s’écroula sur le tapis vert, et n’eut que le temps d’apercevoir Malback bondissant une queue a la main avant que le baton de bois ne se fracasse sur son visage, imprimant une bande violacée de son oeil a son menton.

L’ange roula sur lui-meme, évitant de justesse la queue brisée aiguisée comme un pieu qui s’enfonca dans le tapis la ou se trouvait sa gorge la demi seconde d’avant, et décocha un uppercut a Malback, touchant ce dernier a la gorge et lui coupant la respiration.

Les deux hommes roulerent a terre et tenterent de s’empoigner mutuellement. Sourd a la musique et aux acclamations de la foule, Malback n’avait dans les oreilles que le bruit du sang qui lui battait les tempes. L’ange tenta de l’étouffer mais il arriva a lui enfoncer ses pouces dans les yeux, puis a se dégager d’un vicieux coup de genou dans les parties intimes du Daniel.

Rampant et essayant de reprendre sa repsiration, Malback décida de profiter de l’aveuglement momentané de son adversaire pour lui envoyer un high-kick de derriere les fagots en pleine poire.
Le Daniel parra le coup de son avant-bras, et Malback eut l’impression de frapper un reverbere ; la douleur irradia son tibia alors que le Daniel faisait disparaitre immédiatement les effets de son membre blindé.

Le démon eut toutes les peines du monde a parer la rafale de coups de poings qui suivirent. Les coups pleuvaient et cet enculé tapait comme un sourd.

La sueur coulait dans les yeux du démon, et c’est de toute facon trop tard qu’il apercut son adversaire fondre sur lui, la merveilleuse mecanique des muscles de l’ange projettant son poing a une vitesse défiant l’imagination.

Le monde devint soudain silencieux et noir pour Malback.
Il se sentit léger, et ne ressentit strictement rien lorsque son corps pulvérisa le flipper et roula au sol.
Il entrouvrit un oeil et des bribes de musique, comme passées au ralenti, vinrent le réveiller. Le son opera un retour a la normale et le démon reprit ses esprits, pour s’apercevoir que l’ange le tenait par le bras et s’appretait a lui donner un lecon particuliere sur le „coup de pied latéral“ rendu celebre par Bruce Lee quelques années plus tot.

Le démon entendit plus qu’il ne sentit le 45 fillette de l’Ange s’enfoncer dans ses cotes et le projeter a travers la porte des chiottes.

Les chiottes.

Tombant, trébuchant, Malback se dirigea vers les toilettes des femmes, au fond du couloir.

L’ange prit la suite, marchant lentement.
Badd Dogg, ayant particulierment suivi le combat, vint se placer dans l’encadrure de la porte, et fit comprendre aux autres spectateurs que le spectacle s’arretait la.

L’ange, suivant les traces de sang sur le sol, petites gouttes écarlates sur les dalles blanches, fit apparaitre une masse d’arme dans sa main ensanglantée.
Les traces se dirigeaient vers la premiere porte des toilettes.
Silencieusement, l’ange leva le bras et l’abbatit de toutes ses forces, détruisant la porte et fracassant le siege de céramique. Vide.

Il se ressaisit et se baissa afin de regarder sous les portes : rien.

Il défonca la deuxieme porte d’un coup de pied. Rien.

Il s’avance vers la troisieme porte, la poussa… rien.

Il fit jaillir son armure corporelle en arrivant devant la derniere porte, et l’enfonca : personne.

A ce moment, une goutte rouge tomba sur son épaule, dans un plic! a peine discernable.

L’ange leva les yeux au plafond juste a temps pour voir les plaques de ce dernier s’effondrer sous le poids d’un Malback toutes griffes dehors.
Le démon se rétama sur le mur de séparation des deux gogueneaux, et tomba dans le bloc mitoyen, se ruinant le genoux sur la chasse d’eau.

Au dessus de sa tete, le mur explosa, laissant passer le bras de l’ange cherchant a l’aggriper. Ce dernier n’avait pas la place de manier sa masse, et Malback saisit sa derniere occasion : il enroula son bras autour de celui de l’ange, le tira violement a lui afin d’écraser sa tete contre la paroi, et de sa main libre plongea ses griffes a travers le contreplaqué dans la tempe gauche du Daniel.

Ce dernier eut un hoquet, bredouilla un truc incompréhensible, vomit un caillot de sang, roula des yeux et plopa.


Un atroce sifflement dans les oreilles, Malback résorba ses griffes, eut vaguement l’impression que Badd Dogg lui disait quelque chose, tituba, puis se laissa tomber dans les tenebres de l’inconscience.




* Les dialogues en langage gangsta ont été traduits pour nos lecteurs anglophobes.



Quote:En bonus avec cette Chronique :

La premiere apparition de Badd Dogg
Une lecon de rap, par DJ Badd Dogg
Reply
#12
A heap of broken images, where the sun beats,
And the dead tree gives no shelter, the cricket no relief,
And the dry stone no sound of water. Only
There is a shadow under this red rock,
(Come in under the shadow of this red rock),
And I will show you in the morning striding behind you
Our shadow at evening rising to meet you ;
I will show you fear in a handful of dust


T. S. Eliot
The Waste Land





Chapitre VIII : the Waste Lands


La Buick Lesabre filait sur l'asphalte brulant de la nationale 15, soulevant derriere elle la poussiere suffocante du Nevada.

Malgré la vitesse excessive, l'habitacle était chauffé a blanc et la conductrice suait a grosses gouttes, son débardeur trempé mettant ses formes torturées en valeur (si l'on veut).

Elle appréciait néanmoins pleinement son fix de tout a l'heure, dont les effets commencaient a se faire sentir sérieusement...

Jetant régulierement un oeil au long poignard logé sous le volant (au cas ou) une biere tiede calée entre ses cuisses, elle conduisait d'une main, battant la mesure de l'autre contre la portiere, n'interrompant le tempo d'
Echoes de Pink Floyd que le temps de saisir sa cigarette pour en faire voler les cendres, ou tenter de décoller le tissu gluant de sa poitrine moite.

Le passager ne pouvait guere profiter du spectacle, étant aveugle, et il se contentait de fixer le néant de leur traversée du desert de ses yeux morts, méditant.
Malgré la chaleur le grand noir était vetu intégralement de noir (justement, tiens), mais ne semblait pas gené outre-mesure.


Ils étaient partis dans la matinée de L.A., direction Salt Lake City. Le Big Boss avait recu un telex, et c'avait été la fin des vacances.
En une heure, ils étaient partis.

Ils approchaient de la frontiere de l'Utah, lorsqu'elle apercu que le reservoir était dans le rouge
.

"On va devoir s’arreter, Baron. J’ai cru voir il y a quelques kilometres un panneau de station service."

Le géant noir ne répondit rien.



***********************



Vingt minutes plus tard en effet, la silhouette floue d’un boui-boui miteux apparut dans les vagues de chaleur qui dansaient sur la route craquelée.
La buick dérapa en fauchant les graviers, et s’arreta dans un nuage de poussiere pres des pompes.

La portiere s’ouvrit, laissant le galbe d’une jambe chaussée de hautes bottines de cuir se dessiner dans l’encadrure, puis un talon arborant un éperon scintillant venant s’écraser a deux centimetres d’un petit scorpion.
La sueur ruisselait sur ses longues cuisses, vetues d’un court short en jean.

Sans y preter attention, Arachnée sortit une nouvelle cigarette et l’alluma, plissant les yeux pour se protéger du soleil et du vent de poussiere omniprésent.

En saisissant sur le tableau de bord ses lunettes de soleil, elle entendit son passager ricaner, et murmurer pour lui-meme
.

"He he he… Ce serait vraiment un curieux hasard…"

Ne pretant pas plus d’attention que cela aux curieuses habitudes de son encombrant chaperon, la démone claqua la portiere et fit le tour du véhicule d’un pas fatigué, enfilant un gant pour ne pas se bruler sur l’acier chauffé a blanc des pompes hors d’age..
Seul le crissement d’un panneau suspendu aux couleurs d’une marque d’huile pour moteur ancestrale et le sifflement du vent entre les toles et les carcasses de voitures éparses venaient rompre le silence.

La pompe cracha, ronronna et finit par vibrer en cadence alors que les dollars s’egrennaient sur le compteur. Une fois le plein fait, la démone jeta sa clope d’une chiquenaude et s’approcha de la fenetre du passager
.

"Donnez moi un peu de pognon que j’aille… Ben merde."

Le siege était vide.

"J’aime pas quand vous faites des trucs comme ca…"

La démone saisit son sac, et se dirigea d’un pas peu assuré vers l’entrée de la station.

Elle ouvrit la porte, provoquant un glink ! en pénetrant dans le magasin. Ca puait la merde et la transpiration.
Sur les trois rayons pourris de la boutique, des magasines de cul, des bidons d’huile et des cartes routieres apparement obsoletes étaient maladroitement disposés.
Des toiles d’araignée ondulaient faiblement au rythme du ventilateur brassant de l’air chaud au plafond, dans la semi-obscurité de la baraque. Les bandes de lumiere filtrant a travers les stores défoncés tranchaient dans la poussiere en suspension.

Arachnée s’approcha de la caisse d’un pas lent, ses lourds éperons résonnant a chaque foulée
.

"Un plein", dit-elle sobrement a l’ombre avachie derriere le comptoir.

Avec la lenteur d’une tortue anémique, cette derniere se laissa tomber en avant, faisant apparaitre a la lumiere un visage buriné et crasseux, dégarni et a la barbe hirsute.

L’oeil torve du patron des lieux dégoulina sur la plastique de la démone. Pour toute réponse, il cracha une chique brunatre dans un seau situé a sa droite. Lequel avait l’air bien rempli déja.

Il exhiba une rangée anarchique de dents jaunatres, se racla la gorge dans un bruit d’évier, et s’appretait a ouvrir la bouche lorsqu’il s’arreta dans son élan, tétanisé.

Arachnée eut un mouvement de recul, voyant l’homme blemir, la levre inferieure tremblante
.

"Non… Non, pas lui… Par pitié Seigneur Vigo… Ce… C’est pas moi… C’est pa… AAAAAAAAAAAAH"

L’homme se prit la tete a deux mains et roula au sol en hurlant. Il se contorsionnait en bavant, donnant de grand coups de pieds dans les étageres situées derriere la caisse, renversant des bouteilles d’alcool et des bieres frelatées.

"AAAAAAAAH !! AAAAAAAAAAHH !! NON ! ARRETEEEEEEEAAAAAAAAAAAAHHHHHHH !!"

Son corps en proie visiblement a d’affreux tourments se cabra en une ultime secousse, avant de retomber inerte sur le sol jonché de bris de verres et de mégots de cigarettes.
Avec d’infinies précautions, Arachnée se pencha par dessus la planche faisant office de comptoir de l’établissement. L’homme était visiblement inconscient, les yeux clos, et pour autant qu’elle puisse en juger malgré la pénombre, sans respir…. SHLAK !

A la vitesse de l’éclair, l’homme se redressa en écarquillant les yeux, projetant une langue démesurée qui vint s’enrouler autour du cou de la jeunne femme comme un fouet. En une autre fraction de seconde, il était sur ses pieds, et d’un violent mouvement en arriere faisaitt basculer la démone par dessus le comptoir.

Il hurlait de tout ses poumons ce qui ressemblait a des menaces, mais bouche grande ouverte et langue tirée il était incompréhensible. D’un geste, il se saisit d’un lourd objet caché sous la table, et Arachnée découvrit avec horreur qu’il s’agissait d’une tronçonneuse, que l’homme au regard globuleux et a la langue pendante commencait a mettre en route
.

Braaaaaaaabrbr brbr brbr !

"HALOPE ! Hu ha y pahher auhi !"

Braaaaaaaabrbr brbr brbr !

"Harhirai has heul huhain hon !"

Braaaaaaaabrbr brbr brbr !

"Huhain hu ha harher hale bahine he merhe !!"

Braaaaaaaabrbr brbr Brrrra BRRRABRAAAAAARRRRAAARAAAAAAAA !

"BWAAAAAAHAHAHAHAHA !!"

Tenant la tronconneuse d’une main, Arachnée de l’autre (il rétracta sa langue au passage dans un 'schllurp'‘ assez dégueu) l’homme commença a faire le tour du comptoir pour se diriger vers la sortie. Il laissait la chaine lancée a plusieurs milliers de tours/minute a moins de 5 cm de la carotide de la démone.

"Et maintenant FILS DE PUTE DE TA MERE ! On peut discuter ! Apparait enculé de mother fucker ou j’éclate ta collegue !"

Le regard fou, tournoyant dans tous les sens, l’homme poussa Arachnée vers la sortie, sans manquer de lui faire partager son haleine fétide.

"A la bagnole, vite !"

Il franchissait la porte, son otage devant lui, lorsqu’il s’arreta stupéfait. Une bonne trentaine de centimetres d’acier en fusion lui sortait du ventre.
Dans son dos, il entendit le ricanement de Vigo
.

"He he he… Comme nous nous retrouvons…"

Le Baron retira sa lame, Warhole l’épée millénaire maudite et buveuse de sang, dégats triple contre les rénégats et les bébés chats, et la renvoya sur un autre plan.

"Je… n’ai… rien a vous dire…" articula l’homme, luttant visiblement contre une crise de paralysie galopante. Ses chairs cramoisies et fumantes dégageaient une méchante odeur de cuir bouilli.

"Je le sais bien, mon brave. J’ai appris tout ce que j’avais a savoir dans les méandres de votre cerveau tourmenté. Ceci dit, je vais quand meme vous torturer a mort…"

Le Baron jeta machinalement un coup d’oeil dehors, tourna le petit panneau fixé a la porte sur "Closed" et traina l’infortuné a l’interieur.


*******************************


Assise sur le capot enfin refroidi de la buick, Arachnée fumait en silence, goutant la fraicheur de la nuit.
Cela faisait bientot six heures que les cris et les pleurs retentissaient
.
Reply
#13
I do not aim with my hand ; he who aims with his hand has forgotten the face oh his father.
I aim with my eyes.

I do not shoot with my hand ; he who shoots with his hand has forgotten the face of his father.
I shoot with my mind.

I do not kill with my gun ; he who kills with his gun has forgotten the face of his father.
I kill with my heart.



Gunslinger’s lesson





Chapitre IX : the Gunslinger



"Arcades sourcillieres ouvertes, deux dents fendues, trois cotes cassées, une autre déplacée, le tibia felé et une vertebre démise, sans compter les deux hémorragies internes que nous avons heureusement pu résorber assez vite. Et vous dites qu’il s’est pris une porte !?"

"C’était une grosse porte, Doc'."

Le docteur Green enleva ses lunettes a large monture et se massa les yeux. Il s’avachit un peu plus encore dans sa chaise, et remit en place d’un geste mécanique le stylo qui tronait sur son sous-main de maniere a ce que celui soit a la perpendiculaire de son bloc-notes.
D’une sobriété maniaque, la table était vide a l’exception de diverses radios et rapports de diagnostics.

Le rasta monstrueux qui siégeait en face de lui, en train de rouler un joint, prenait la moitié de la largeur la piece.


"Ecoutez… Je… J’en ai marre de vos combines, je ne veux plus participer a tout ca… C’est le troisieme "ami" dans un état critique que vous me ramenez… Je peux pas passer mon temps a vous couvrir… J’ai des rapports a faire, moi !
Je fais disparaitre les blessures, pas les corps !"

Le rasta le regarda fixement dans les yeux pendant une dizaine de secondes, se retenant de zapper sur la calvitie naissante que le docteur camouflait tant bien que mal d’une meche de cheveux. Puis il déclara sur le ton de la conversation :

"Au fait, Doc', les petits vont bien ? Ca lui fait quel age a Mickael, 9 ans ? Whow, il va bientot aller a la grande école. Et j’espere que Melody suit toujours ses cours de natation ; dans deux-trois ans cette petite fera bander un Archange."

"…"

"Quant a votre mere, dans le Connecticut, j’ai oui dire que l’hiver sera terrible. Il faudra prendre bien soin d’elle…"

"Salaud !"

"Vous redevenez raisonnable, Doc'. La paperasse c’est votre job. Vous allez vous en tirer comme un chef, c’est pour ca qu’on vous paie."

Le géant noir se leva, fit un clin d’oeil au docteur atterré, grogna de son nez porcin et quitta la piece sur un "C ya hommie" avant de claquer la porte.


Cinq minutes plus tard, il arrivait dans la chambre de Malback. Ce dernier, entouré de tubes, perfusé de partout et encerclé de machines avec plein de boutons et tout, murmurait des phrases inaudibles dans son sommeil.

Il ouvrit un oeil, puis deux, et la grosse tache noire au milieu du flou artistique finit par s’affiner pour faire apparaitre aux yeux du démon son vieux frere, Badd Dogg aka Monster, les traits de sa peau grumeleuse réhaussés par la lumiere mordorée de ce petit matin de fin d'été.


"Buarp ! Hey, Bro' t’es réveillé on dirait"

"Grrll… Arrgllarrr.."

"Oué, moi aussi je suis content de te voir."

Coup d’oeil a droite, coup d’oeil a gauche. Ok, un hosto. C’est juste derriere le commissariat dans la grille des 'endroits ou ne pas se trouver dans un état critique'.

"Crr.. Com… Combien de temps j’ai dormi ?"

"Quatre jours mon cochon. On a su que tu te sortirais de ton coma quand t’as commencé a avoir une trique systématique lorsque les infirmieres te lavaient. T’inquiete, t’es safe ici."

"Grrmbl. Quatre putain de jours, merde."

Le démon se redressa sur son séant.

"Bon, on se casse"

"T’es sur mec ?"

"Ouais, j’ai perdu trop de temps faut que je m’arrache. T’as une planque autre que ta caravane de merde ?"

"Of course man. Je loue un garage aménagé pret des docks. Aucun blanc peut rentrer dans ce quartier sans se faire repérer et maitriser si necessaire. C’est cool, t‘inquietes."


Le démon fit craquer ses membres endoloris, et sans plus attendre se débarassa de ses perfusions et scotchs divers, vira sa chemisette et sauta dans ses fringues.

"Tain cet enculé m’a déchirer une poche de ma veste en peau de serpent ! Le symbole de mon animalité et de mon gout pour la liberté, j’hallucine !"

"Ouais c’était un putain de mother fucking nazi mais tu lui as bien pété sa gueule de batard. Hey man, j’espere que t’es pas tombé sur un repere de néo-nazis évangélistes !"

"C’était peut etre un cas isolé. En tout cas il m’a pas raté, je douille sévere. Mais c’est vrai que je lui ai bien pété sa sale gueule de gros con, a c’t’enfoiré."

"Ouais. Un sale fils de pute."

"Mmh. Un bel enfoiré de salopard de merde."

"Crevure de gerbe dégueulasse moisie"

"Grosse merde molle chiée du cul de Daniel qui pue"

"…"

"Ouais, bon, on y va."


Les deux homme s’engouffrerent dans le couloir, passerent en trombe devant la reception et sortirent sur le parking. En quelques secondes, ils étaient dans la voiture et s’élancaient vers leur destin (ta-la, ta-laaaa).



*****************************************



Le lendemain, Malback était pret au départ. Billet d’avion pour Dallas (Texas), puis il louerrait/acheterait une bagnole pour rejoindre son contact a Albuquerque (Nouveau Mexique), profitant du trajet pour semer ses éventuels suiveurs. Vu qu’apparement dans cette histoire il était le seul a jouer dans les regles et sans connaitre le scénario, hé ben il allait falloir la jouer fine.

Apres ses adieux a Badd Dogg (qu’il ne devait pas revoir avant Immac), le démon s’envola dans le ciel saturé de pollution de Detroit.
Le voyage se déroula sans accrocs, mais cela ne fit que renforcer la parano de notre héros.

Il acheta cash chez le premier carrossier une confortable Ford Thunderbird de 1980 en excellent état, acheta une demi-douzaines de cartouches de clopes, une bouteille de whisky, et se mit en route.
Il filait sur les nationales entre Fort Worth, Oklahoma City, Amarillo et enfin Albuquerque, sans incidents notables en dehors d’un subit Besoin de Violence* dont un malheureux auto-stoppeur fit douloureusement les frais.


C’est donc la qu’il devait retrouver son contact, d’apres le rapport initial un Capitaine d’Andromalius. Ca promettait vachement de fun, ca encore…
La nuit tombait lorsqu’il franchit les portes de la ville.

Le démon s’arreta plusieurs fois, cherchant son chemin sur une carte. Il devait retrouver l’Andro dans un entrepot désafecté, dans la zone industrielle. Un orage de chaleur commenca a gronder.

Au bout d’une bonne heure passée a tourner en rond, Malback arriva enfin en vue de l’entrepot. Les environs étaient déserts, foret de tole et de béton, et un craquement sinitre annonca le début de la pluie.
Il éteint ses phares a quelques centaines de metres des lieux, et se gara a bonne distance. Tachant de se couvrir autant que possible avec le col de sa veste, le démon se dirigea vers le hangar, tandis que la pluie redoublait d’intensité.

La porte principale était bien entendue fermée, mais en contournant une petite baraque, le démon arriva derriere le batiment.
Il n’y avait pas d’entrée, mais il put apercevoir une fenetre éclairé sur le toit, accessible par l’echelle de sécurité.
Bondissant sur une pile de palettes, le démon s’élanca vers l’echelle et l’atteint sans peine malgré la hauteur.

Sous la pluie battante, il ne craignait pas de faire trop de bruit, a vrai dire les grosses gouttes faisaient un bordel pas possible sur le toit du batiment.
En se penchant a la fenetre (qui était plutot une grosse lucarne), il vit un spectacle pas banal :

Dans le hangar quasiment desert (le seul mobilier étant une table et une chaise logés dans un coin, ainsi que quelques barils), deux hommes se tenaient sous la lumiere vacillante d’une grosse lampe d’usine.
Un homme habillé de facon tres stricte, complet noir et boutonniere en or, était attaché sur une chaise, un sac de tissu sur la tete. Tissu qui commencait visiblement a s’imbiber de sang.
Devant lui, massant son poing, un mec tout droit sorti d’un film de Sergio Leone (santiags et eperons, jean usé et poncho a franges, un sombrero posé non loin sur un tonneau et surtout deux énormes flingues sur les cuisses) se tenait debout, fumant un cigarillo tout en maugréant.


"Il semblerait que notre ami Andro ait quelques problemes avec un chicanos" pensa Malback. "Putain j’en ai marre que rien se passe correctement bordel…"

Plus bas, le bruit d’un poing s’ecrasant sur une machoire résonna sechement.

Avec la souplesse d’un chat, Malback enjamba le rebord de la lucarne et se glissa dans le batiment. Il entreprit de descendre par l’une des colonnes se dressant derriere le cow-boy.


"Surtout, ne pas péter…" pensa le démon, descendant la colonne a la force des bras dans un silence a faire palir un Ninja Warrior.
Il atterrit dans un souffle sur le sol en béton. Cinq metres devant lui, le cow-boy tabassait l’Andro avec un entrain non simulé.

Le Baalite fit jaillir ses griffes, et s’approcha tout doucement de son adversaire.

Quatre metres… Trois metres… Deux metres… critch ! Un gravier ripait sous sa chaussure…

Malback s’arreta, et vit clairement le cow-boy tendre l’oreille, s’arretant dans son mouvement.
La suite se déroula tres vite.

A la vitesse de l’éclair, le cow-boy tournait sur lui meme, dégainant l’un de ses revolvers tellement vite que son bras devint flou, tandis que Malback se ruait sur son adversaire griffes en avant.

Il arreta son bras alors que ses griffes se trouvaient a moins de trois centimetres de la gorge du cow-boy, tandis que ce dernier lui braquait le canon de son Colt Single Action Army 1873, Cavalry model, with 7½ inch barrel, chien relevé, a moins de trois centimetres du nez.

Le chicanos qui faisait face a Malback était tout droit sorti d’un album de Blueberry ; la peau brulée par le soleil, une épaisse moustache descendant en pointe autour de ses grosses levres lipues, des yeux comme deux raisins secs enfoncés a coups de burin dans son crane taillé a la hache.
En tout cas, ce mec était plus rapide qu’un crotale enragé, et Malback n’était pas certain de pouvoir lui ouvrir le ventre avant qu’il ne tire (grace a une vieille feinte bien connue des Baalites, mais qui ne marche hélas que contre des adversaires moins virtuoses).


Les deux hommes se firent face quelques secondes, sans autre bruit que la pluie résonnant sur le toit et les reniflements de l’Andro attaché sur la chaise.

Le cow-boy esquissa un rictus, découvrant une rangée de dents pas tres propres et dont certaines étaient en or.


"Hey, Cabron" murmura le cow-boy, "Yé crois qué tou viens dé faire oune voulgaire error, et qué tou es bien dans la mierda mainténant…"

"Moi je crois que tu sais pas a qui tu as affaire et que c’est plutot toi qui es dans une merde noire, Speedy Gonzales"

"Aaaahahaha, no senor, yé crois bien qué c’est toi qui est dans la mierda…"

"Non, je crois plutot que c’est toi…"

"Nan c’est toi !"

"Nan toi !"



Les deux hommes continuaient a se faire face, chacun calculant ses chances d’étaler l’autre en premier. La lampe grésilla alors qu’un éclair tombait a proximité, faisant trembler les murs.

"Ecoute, bouffeur de piments", lui lanca Malback, "Tu sais quoi ? On fait flasher nos auras, que tu vois bien qui tu as en face de toi, et que tu prennes le temps de reflechir aux 35 facon de te tuer qui s’offrent a moi le temps que tu presses ta détente."

"Houla, hombre, yé souis mort dé trouille. Tou crois qué tou mé fait flipper, Cabron ? Yé té loye oune bastos dans la cabesa avant que tou ais pensé a bouyer."

"Laisse moi rire, cow-boy. Mais puisque t’es si malin vas-y, fais péter l’aura qu’on rigole"

"No, hombre, c’est ton idée, c’est toi qui montré l’aura en premier"

"Non, certainement pas, c’est ton tour putain".

"No, c’est ton tour !"

"Hm. Bon, ok, a '3' on y va en meme temps"

"Ok."

"1…"

"…"

Malgré la fraicheur de la nuit, le front des deux hommes perlait de sueur.

"2…"

"…"

Les deux adversaires se pénetraient du regard, plongeant leurs yeux d’acier dans ceux de l’autre, cherchant une faille, une opportunité, sachant tres bien que leur duel se jouerait au centieme de seconde.

"2 et demi…"

"… Hey, Cabron !"

"Ca va, j’déconne…"

La tension est alors a son comble, et tandis qu’un son de cloche soutenu par un choeur de femmes se fait entendre au loin, chacun sait que le fil ténu de sa vie est pret a se rompre dans les prochaines demi secondes…

"3 !"

Tout se précipita. Tandis que deux auras démoniaques flasherent de concert, le mexicain se jetta de coté, pressa la détente et l’enfer déboucha du canon de son revolver… mais il était déja trop tard car Malback s’était lui aussi déporté a une vitesse fulgurante, et sa griffe ne fit qu’entamer le poncho du mexicain.
Les deux hommes se rétablirent d’une roulade, tachant de se relever avant l’autre.

Le mexicain se redressa a la vitesse d’un serpent a sonnette dans une nuage de poussiere, braquant Malback, tandis que celui-ci s’appretait a bondir sur le cow-boy.
Les deux hommes s’arreterent dans leur élan, confus.

Face a l’aura de Capitaine scintillant autour de Malback, se trouvait celle de Srajitas, Capitaine d’Andromalius.


"Ben merde", souffla le démon de Baal.

Apres un instant d’hésitation, Srajitas rabaissa le chien de son revolver, se redressa, s’épousseta et se rapprocha du Baalite.


"Carai, tou dois pas mé faire dé troucs comme ca, Gringo. Tou youes oune yeu danyeureux…"

"C’est a dire que, j’ai cru que c’était le mec en costard, mon contact chez Andro…"

"Loui ? No, no Gringo, loui c’est youste oune salopard dé fiotte dé youyou dé mierda qué y’étais en train dé tabasser pour faire avancer l’enquete qui t’amene. Il a déya avoué, mais yé continoues oune peu pour la forme.

Tiens, regarde, Gringo".

Le démon mexicain avanca vers l’homme attaché, et déchira sa chemise, dévoilant une chaine au bout de laquelle se balancaient deux pendentifs en or : une sainte croix, et une croix gammée.

"Oune hiro de puta de nazi évanyéliste dé mierda, Gringo. C’est oune des membres dé cette secte qué lé Big Boss il veut qu’on démantele."

"Fucking nazis", jura Malback. "I hate those guys !"

"Yé t’en dirais plous quand on sortira d’ici, amigo. Pour l’heure…"

Le colt qui se trouvait rangé dans le holster de cuir pendant sur la cuisse de l‘Andromalius se retrouva subitement dans sa main, et avant que Malback ait pu réagir le canon crachait le tonnerre.
Une tache rouge éclata immédiatement sur la poitrine de l’homme attaché, le faisant basculer en arriere. Le corps plopa au moment ou il touchait le sol, dégageant une douce odeur de nuage.

Faisant rouler son revolver sur son doigt avec maestria, le mexicain rengaina d’un geste parfaitement maitrisé.


"Vamos, Gringo."


Les deux hommes sortirent en courant du hangar, sous la pluie et les éclairs.





* Et oui, nos plus vieux lecteurs se rappellent peut-etre d’un temps ou Malback n’avait pas ses beaux yeux brillants.
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#14
SETH
Where's the woman?

RICHARD
What?

SETH
What'd ya mean, what? The fuckin'
woman, the hostage. Where the fuck
is she, Richard!?

RICHARD
She's in the other room.

SETH
What the fuck is she doin' there?!

RICHARD
Seth, before you open the door, let
me explain what happened.



the Gecko Brothers, From Dusk Till Dawn




Chapitre X : From Dusk till Dawn




Dans la verte vallée, Arakne gambade joyeusement en compagnie de ses amies. De blanc vetues, des couronnes de fleurs dans les cheveux, elles courent et rient. Un troupeau de brebis s’eloigne en belant a l’arrivée de la bande de jeunes filles.

“ La derniere arrivée au Temple est une verrue ! “ crie l’une d’elles.

Immédiatement, les jeunes filles partent d’un grand éclat de rire et tentent de se gener mutuellement dans leur course. Arakne est aussi belle qu’elle est rapide, et elle a tot fait de distancer les autres. Elle court, haletante, sur le versant de la colline au sommet duquel se trouve le temple dédié a Athena, dont les décorations chatoyantes rayonnent sous le soleil.

Quasiment arrivée au sommet, a bout de souffle, elle se retourne pour voir ou en sont les autres. Mais le versant de la colline est étrangement désert…

Un souffle glacé lui parcourt le dos, et en se retournant a nouveau vers le temple, elle constate avec horreur que celui-ci est détruit, ses ruines reposant sur une terre morte et craquelée, tandis que des nuages de cendres balayés par le vent lui fouettent le visage.

Dans un cri, elle tombe a genoux. Une force impérieuse la force a relever la tete. Devant elle, immense et furieuse, vetue de son armure d’or, se dresse Athena elle-meme.
La déesse exhibe devant Arakne la tapisserie que la démone a réalisé lors de leur récente confrontation *
Elle hurle et sa voix couvre le vent qui souffle avec furie. D’un geste, elle déchire la toile pourtant si parfaite d’Arakne.

Cette derniere veut échapper a la colere de sa maitresse, Athéna la Baronne de l’Orgasme Eternel, mais il est trop tard, par trois fois la lance l’a transpercée, et elle sent le sol s’ouvrir sous ses pieds, et elle tombe, et elle tombe, et par la breche qui disparait peu a peu au dessus d’elle, elle voit sa rivale la fixer des yeux, et lui adresser une derniere parole :


“Réveillez-vous !”

“Réveillez-vous !”

“Réveillez-vous !”



La démone se redressa dans un bond, se cognant le genou contre le volant.

Le soleil brillait et la température de la bagnole frolait les 40 degrés. Elle regarda par reflexe l’horloge : 10 heures du mat’. La journée promettait.
Elle se payait un vieux mal de crane, les quelques bieres de la veille plus le soleil dans la face toute la matinée, ca n’avait pas arrangé les choses…


Dois-je réellement me déplacer ?! “

Cette voix impatiente dans sa tete… Vigo, of course.
Elle ouvrit la portiere, encore saisie de son cauchemar, et accueillit la faible brise qui soufflait avec bonheur.


“Ouais ouais, on arrive…”

Intrus en approche. Ils ne doivent pas rentrer dans la station, occupez vous-en”.


La démone s’étira longuement, et but une gorgée d’eau tiede. Elle jeta un oeil a la route ; en effet, on pouvait voir le reflet d’une carrosserie se rapprocher dans l’air trouble de l’asphalte surchauffé.
Elle entendit un truc se renverser dans la station.


Bon, ca allait pas etre trop pénible ; expliquer gentiment aux touristes que les chiottes de la station refoulent, les pompes sont fermées, et hop.
La démone plissa les yeux pour apercevoir la voiture. Tiens, on dirait bien une bagnole du Highway Patrol Dpt. Il allait y avoir comme un probleme…

Elle courut a la station pour prévenir Vigo, franchit la porte… Et s’arreta net.

Le sol, les murs, les étageres, le comptoir… Tout, absolument tout était couvert de sang. L’odeur était insoutenable. Des flaques brunes, datant visiblement de la veille, se mélaient au rouge vif du sang plus récent.

Un faible rale provenait du comptoir, mais Arachnée ne put voir dans quel état était le gérant, car la masse de Vigo lui bouchait la vue, penchée sur l’infortuné.
Elle s’appretait a ouvrir la bouche mais Vigo l’interrompit.


Je sais, et il me semble vous avoir donné un ordre, démone !

Arachnée recula, et revint en marchant pret de la voiture. Elle fit un rapide calcul ; le mec a l’interieur en était environ a sa douzieme heure de torture. Considérant que Vigo n’avait pas le materiel adéquat, et qu’il ne devait pas y aller tendrement, elle vint a considérer que ce Baron était un sacré pro.

Retour a la route, la voiture de flics ralentit effectivement pour s’engager vers la station service. Elle s’arreta paralellement a la Buick des deux démons.

Deux hommes au port athlétique en sortirent, vetus de l’uniforme beige reglementaire et de Ray-Ban chromées.
Le premier resta pret de la voiture, tandis que le deuxieme s’avancait d’un pas lent vers la station, un cure-dent coincé au coin des levres.


“Mam’zelle…”, salua-t-il Arachnée.

“La station est fermée”, dit-elle en appuyant ses propos d’un signe de tete en direction de la porte, sur laquelle le panneau “closed” était posé.

“Je sais bien mam’zelle”, répondit le flic dans un sourire, “enquete de routine, le magasin doit fermer, mais cette andouille a juste oublié de prévenir la clientele. Bonne journée, mam’zelle.”

Le flic repartit de sa démarche de mec qui veut en imposer vers la station.
L’autre, resté pret de la voiture, dévisageait la jeune femme, un petit sourire en coin.


La voix de Vigo résonna dans le crane de la démone.


Ils mentent. Ils viennent récuperer une cargaison de cocaine. Deux kilos et cinq cent grammes tres exactement. Occupez vous d’eux, je vous prie.”

“Quoi ?! Nan mais attendez c’est pas deux pauvres touristes c’est deux flics armés ! Vous…”

Il suffit. Vous serez punie pour avoir osé discuter mes ordres. Je sais que vous en etes capable car vous meme le savez. Execution.”

“Okay, Bwana” pensa la démone lorsque la présence du Baron disparut.

Le flic n’était plus qu’a quelques metres de la porte lorsqu’il s’arreta, surpris
. “Qu’est ce que c’est que cette odeur…”, grommela-t-il.

“Hep, officier !”, le hela Arachnée. Le flic se retourna, curieux.
“C’est vrai qu’il y a 95% d’impuissants dans la police du Nevada ?”

Le flic fit passer son cure-dent d’un coté de la bouche a l’autre. Le deuxieme se redressa, bras croisés.

“Un probleme jeune fille ?”

Le flic revint sur ses pas, lentement, soulevant un petit nuage de poussiere a chaque foulée. Arachnée sentit son débardeur se coller a sa colonne vertebrale tandis qu’une goutte de transpiration lui coulait dans l’oeil.
Lorsque les deux flics se trouverent a deux metres d’elle environ, elle ricana.


“Pardonnez moi, officier, je raconte toujours n’importe quoi quand je suis en plein trip d’héro. D’ailleurs je vais pas vous retarder, c’est l’heure de mon fix, avant de reprendre la route.”

“Tres bien mam’zelle, on peut voir les papiers du véhicule s’il vous plait ?”

Arachnée dévisagea les deux types. Le deuxieme avait toujours les bras croisés, un sourire sardonique sur les levres, mais le flic au cure-dent avait la main sur la crosse de son revolver.
Arachnée pouvait se voir dans le reflet de leurs verres chromés, ombre perdue entre le sable et le ciel.
Avec un soupir, elle fit mine de s’executer, passant un bras par la portiere a la recherche de quelque chose.


“Pas de geste brusque…” prévint le flic au cure-dent. Elle fit un sourire au deuxieme, plongeant ses yeux dans les lunettes noires.
Elle murmura une rapide incantation, et Charma le policier. Un sourire agicheur sur les levres, elle lui fit un petit signe de tete signifiant “Viens la mon lapin”, et le flic s’executa sans reflechir, faisant deux pas dans la direction de la démone.


“Qu’est ce que tu fous, Eddie ?” lui lanca le flic au cure-dent. Et avisant Arachnée :
“Et vous dépechez vous. Eddie casse-toi putain !”

Le deuxieme flic était presque entre elle et le type au cure-dent. Profitant de ne plus etre totalement dans sa vue, elle agit.
La démone s’engouffra a moitié par la fenetre, a la recherche du poignard fixé sous le volant.

Le premier flic dégaina son arme. La démone affermit sa prise sur le manche de la lame, et pivotant sur elle-meme, trancha d’un geste net la gorge du policier envouté. Ce dernier continuait de sourire, bien que conscient que quelque chose n’allait pas, tout d’un coup.
Profitant de son élan, elle tourna autour de sa victime pour se placer derriere elle, tandis que le premier policier ouvrait le feu. Il logea deux balles dans le buffet de son collegue.

La démone repoussa le poids de l’homme en train de s’affaisser, puis d’un violent coup de pied retourné, envoya valser le corps contre le tireur, le déstabilisant.
Le flic au cure-dent vit son arme lui échapper des mains, puis un éclair d’argent et enfin le manche du poignard dépassant de sa poitrine, au centre de la tache rouge qui se mit immédiatement a grandir.

Il regarda la démone a nouveau, enleva ses lunettes, les essuya, les remit, fit trois pas en murmurant
“C’est pas normal…” et s’écroula dans le sable, roulant sur le coté.


Apres s’etre épongé le front d’un revers de bras, Arachnée installa les deux corps dans leur voiture, récupéra son poignard, essuya le sang d’un rapide coup de langue, et poussa la voiture derriere la baraque pourrie de la station.

Elle entreprit ensuite de déverser autant d’essence que possible au sol, utilisant également quelques bidons pour imbiber la voiture des ex-gardiens de l’ordre de l’odorant liquide.
Il allait pas falloir rester tres longtemps a proximité, avec cette chaleur tout pouvait péter d’un moment a l’autre.

Elle se dirigea vers la station, et s’y engouffra.

L’odeur a nouveau. Ca sentait le sang et la merde. Surtout le sang a vrai dire, le sang qui vous montait dans les cloisons nasales, qui enivrait jusqu’a la nausée… La démone s’approcha de Vigo, prenant garde de ne pas glisser sur quelque viscere égarée.
Le géant noir se releva au moment ou elle arrivait, déclarant :


Il suffit. C’est terminé de toute facon

Le Baron s’écarta, découvrant une scene qui laissa Arachnée interdite.
L’homme était attaché aux montants du comptoir, des menottes aux poignets, et une lourde chaine ceignant ses bras, ses jambes et son cou.
Il n’avait plus de peau sur le visage. Ses yeux globuleux, couverts de sang, semblaient perdus au milieu des tissus cutanés en lambeaux.
En fait, il n’avait plus de peau nulle part, si l’on omet les mains, les pieds et l’arriere de son crane.
L’homme qui se tenait la, hoquetant, un filet de sang noir coulant du trou béant qui fut sa bouche, avait été purement écorché vif pendant les douze dernieres heures. A terre, posés devant lui, ses intestins s’affaissaient mollement. La souffrance était tellement palpable qu’elle donnait l’impression de suinter des milles plaies du condamné.

Arachnée eut un mouvement de recul, puis sentit ses jambes l’abandonner. Elle tomba a genoux, muette, et le fait qu’elle venait de tremper sa culotte de plaisir lui parvint comme une information lointaine. Elle pleurait.


“C’est… c’est tellement… beau !” - réussit-elle a articuler.

Le Baron eut un sourire en coin, bien qu’elle ne le vit pas.


Finissez-le, et partons

Le poignard était dans sa main, sans qu’elle ait eu conscience de le prendre. L’homme hocha la tete dans un ultime sursaut, vomi un bon demi-litre de sang et la regarda droit dans les yeux.

“H… Heil Jesus !” postillonna-t-il en tentant de lever la main droite

La lame plongea dans sa cage thoracique, executa un mouvement complexe, et se retira.
La seconde d’apres, le pectoral gauche du malheureux s’ouvrait dans les flots de sang noir, et son coeur s’évadait de son emplacement habituel pour venir rouler entre les bottes d’Arachnée.

Le coeur, le corps, le sang, tout disparut dans un ‘PLOP’ de bouchon de champagne, ne laissant qu’une ignoble odeur de souffre dans l’air.


Elle sortit et fut frappée par le soleil, elle avait presque oublié qu’il faisait jour dehors. Le Baron était déja dans la voiture.
Elle s’installa derriere le volant, démarra et s’alluma une clope.


“Qu’est-ce qu’il a voulu dire, ‘Heil Jesus’ ?”

Hé hé hé… Ma douce enfant, je crains que cet insignifiant parasite ayant autrefois servi Satan ne fasse partie des adversaires que votre frere a été envoyé affronter : une secte de nazis évangélistes !

“Avec tout le respect que je vous dois, Monseigneur, vous seriez pas en train de vous foutre de moi ?”

Je crains que non, démone.

Arachnée démarra doucement, se dirigeant vers la sortie de la station. D’une pichenette, elle lanca son mégot fumant derriere elle. Dans le rétroviseur, elle vit une flamme naitre quelques secondes plus tard, et accéléra.

“Des nazis évangélistes ! Mais c’est completement débile comme concept…”

L’humanité est souvent surprenante, j’en conviens. Maintenant, roulez et taisez vous, je dois réflechir a votre punition pour m’avoir désobéi tout a l’heure

La démone leva les yeux au ciel, accéléra franchement et enclencha sa cassette d’un live de ’10 years after’, tandis que derriere eux les premieres détonations retentirent.

La démone chantonnait doucement, suivant les paroles :


Rain is falling and a thunderbolt is crashing through my head
And theres people and pain all around me
Someone is calling and electric sparks are everywhere I tread
My life, it seems, is a sequence of dreams
And theres people and pain all around me

D’abord les pompes, puis la voiture des flics, enfin les stocks de gaz, tout explosa en une énorme boule de feu qui s’éleva vers le ciel, désintégrant la station et projetant des morceaux de métal en fusion dans toutes les directions.

La Buick fila sur l’asphalte brulant.






* Confrontation dont on peut avoir un bref apercu ici ; ce n’est pas exactement ce qui s’est passé, PdD oblige, mais ca vous donnera une idée.
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#15
Interlude : El Superbo Srajitas


Dans cette ville très animée, le bruit des moteurs se mêle aux cris des marchands de tacos et à ceux des badauds prestement délestés de leurs portefeuilles par une main habile. Le vacarme ambiant et l'odeur d'essence et de friture bon marché n'empêche pas quelques vieux mexicains de faire une sieste forcément bien méritée, le visage caché par des chapeaux à larges bords.

A la terrasse du bar à tapas le plus proche, on aperçoit un pittoresque individu, vêtu d'un costume blanc à franges et de bottes en serpent étincelantes. Il déguste des fajitas de poulet à même la planche de bois qui sert de plat (un métal aurait déja fondu en bouillonant), se delectant de la spécialité locale pourtant suffisament épicée pour attirer les inquiétudes du puissant voisin américain quant à son utilisation comme arme de guerre biologique.

La caméra zoome lentement sur l'homme qui finit par se retourner, un sourire bienveillant éclairant son visage buriné à la peau matte, orné d'une superbe moustache noir charbon.


"Bienvénoue à Messico-City, gringo, la plous magnifique des villes dou monde. Nos femmes sont belles, notre soleil yénéreux et notre couisine souccoulente !"

Il se lève, jette quelques pièces au patron servile de la gargote qui le remercie en s'inclinant profondément, serrant l'argent contre son coeur, et se met à déambuler tranquilement dans la rue tout en se curant les dents de l'index. Il est accompagné par un magnifique travelling arrière de la caméra digne des meilleurs présentateurs de documentaires animaliers. Tout en marchant, il fixe et l'objectif et reprend :

"Mais yé mé doute qué vous n'êtes pas vénous en touristos. C'est à moi qué vous vous interessez ? Ahahaha amousant. Sans doute pour ma glorieuse contriboucìon aux roccambolesques aventoures dé Malback !" Il sourit vicieusement.
" Hé si, gringo, Capitaine d'Andromalious. Ca en yette, hein ? Sourément qu'à l'époque y'avais encore lé goût dé magouilles... Les affaires marchaient ploutot bueno dans lé temps et cette micìon à propos dé nazidos évenyélistos, yé pensais qué ca sérait ploutôt peinard, dans lé yenre vacances tranquilles, mais bien entendou quand cé vieux bouc dé Malback s'en mêle même lé plan lé mieux rodés et lé plous simplos finissent en explosions diverses, riviera dé sangre et autres marmélades dé corones...
Lé bon temps, yé vous dis...."

Il éclate de rire alors que la caméra s'éloigne progressivement, bientôt plus qu'une simple tâche blanche au milieu de la foule colorée qui se referme sur lui.
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#16
"Oh my… Oh my GOD !! BLEUAAAAARGH ! "

Stewart Garwood, Albuquerque’s Coroner, sur la scene du "Massacre des entrepots Callahan"





Chapitre XI : the Callahan’s Warehouse Massacre



Les deux démons couraient sous la pluie battante.

Ils se ruerent dans la Thunderbird de location, Srajitas manquant de perdre son sombrero en passant la portiere, et soufflerent quelques instants.
Les vitres rendues opaques par la pluie battante conférait une certaine intimité a l’habitacle. Apres avoir enclenché l’allume-cigare, Malback se retourna vers celui qui devait devenir bien plus tard, dans une autre vie, un super pote.


"Ok, je pense qu’il est temps que tu m’en dises un peu plus mec, parce que pour l’instant a part des tentatives de meurtre échouées j’ai pas beaucoup d’indices. Par contre les mecs qui veulent ma peau ont l’air encore plus au courant que ceux qui m’ont filé cette mission moisie, et ca commence a me taper sur le systeme."

Le gradé de Baal offrit une cigarette a Srajitas, mais celui-ci la déclina pour sortir un cigarillo visiblement artisanal de sa poche. L’odeur qui envahit la voiture lorsqu’ils se mirent a fumer, mélange de sueur, de tabac et de fringues trempés, n’était pas sans rappeler celle de la loge des Guns’n’Roses apres un concert.

"Si, Gringo. Y’ai aussi dou echappé a la Muerte plous d’oune fois ces dernieres semaines. Mais, y’en sais beaucoup plous que toi pour lé moment.

Il y a oune anye dé Yean-Louc, y’ignoré son nom, mais c’est oune puta madre dé psychopathe. Il est dévénou fou a lier souite a oune histoire bizarre pendant la séconde guerre moundiale, en Allemandie. On sais pas exactément cé qui loui est arrivé, mais il a disparou lé 30 avril 1945… soit lé your dé la mort d’Hitler, courieux, no ?

Pouis il a réfait sourface aux States il y a oune quinzaine d’années, meme si au débout on né savait pas qué c’était loui. Les Dominicains ont fait oune enquete sour lui, a la souite dés laquelle il a été déclaré “outlaw”, rénégat. Sans pouvoir loui mettre la main déssous et le faire rétourner au Paradis pour youyement.

L’affaire a été étouffée pour des raisons politiques mais nous, on l’a rétrouvé, hé hé hé. En récoupant d’autres enquetes dé mes services, sour des démons rénégats, on a pou établir qu’il était lé cerveau d’oune puta madre d’organisation, planquée au Nevada, régroupant des anyes et des démonos, tous rénégats, et dé nombreux houmains. Caraï, a mon avis c’est une armée dé Démonos de combat sous amphetamines qu’il faut envoyer la-bas pour tout nettoyer, mais lé Big Boss il a décidé que ca serait nous deux, cabron."

Les deux démons se regarderent quelques instants dans les yeux, puis a la meme seconde eclaterent de rire.

"Putain, on est dans la merde en fait."

"Si Senor, et yé souis pas sour qué la promozione soit pour bientot, dans cé yenre d’histoire a la moindre corones dans la soupe, on est tous les deux familiers."

"Non. Je fais confiance au Jugement de Satan, il a toujours su récompenser ceux qui le servaient bien. On va aller au Nevada, niquer la tete de ces fils de putes, renvoyer un max de déchets en Enfer et au Paradis, et faire un chic rapport qui va nous apporter gloire et fortune."

"Tou connais pas bien la boutique, amigo. Mais yé veux pas casser tes reves. T’as oune plan ?"

"Ca se pourrait bien. Il nous faut des armes. Beaucoup d’armes."

"Ca c’est un plan comme yé les aime. Ca tombe bien, lé hiro dé puta qué yé tortourais tout a l’heure il avait ca sour loui…"

Le démon d’Andromalius exhiba un portefeuille don’t il sortit une petite clé a laquelle était attachée une étiquette :

Quote:Cache secrete avec plein d’armes

"Génial, ca c’est du pot. Et ou elle se trouve ?"

Le mexicain fouilla dans le portefeuille et en sortit une carte d’acces magnetique sur laquelle une tete de vache souriante était dessinée, juste sous l’inscription : WH5.

"Yé crois qué c’est lé symbole dé la compagnie “Callahan Foods”, une abattoir qui prépare des steacks pour l’indoustrie dou fast-food. C’est oune endroit glauque a souhait, parfait pour continouer notre enquete".

"Ouais, faut croire que le scénariste a pas trop envie de se casser le cul… On y va".

La Thunderbird vrombit lorsque Malback démarra, ses phares pénétrant a peine les murs de pluie qui continuaient a s’abattre. Les graviers crisserent sous les pneus de la voiture lorsqu’elle s’élanca, tandis que les éclairs zebraient le ciel pour rajouter de l’ambiance dramatique et inquiétante.



************************************************



La nuit était déja bien entamée lorsque la Ford arriva en vue des abattoirs Callahan.
Seul point lumineux de cette zone industrielle déserte, le logo de la société dessiné au néon : une tete de vache en train de se marrer, tandis qu’une tronconneuse s’abattait sur son cou, alternant les positions haute et basse.
Les entrepots étaient cernés d’une haute grille au sommet de laquelle dansaient plusieurs rouleaux de fil-de-fer barbelé.

Les deux démons se garerent a proximité, contournerent le poste de garde qui jouxtait le parking, et se fondirent parmi les ombres de la nuit.


"Y’espere qu’ils ont pas dé cameras video…"

"Avec cette pluie je doute qu’ils voient grand chose de toute maniere. Allons-y."

Malback fit jaillir ses griffes et trancha brutalement une portion du grillage, permettant aux deux démons de se faufiler a l’interieur. Courant tete baissée sous la pluie battante, ils se rapprocherent des premiers batiments.
Un panneau indicateur renvoyait vers les différentes zones du site : Slaughterhouse, Warehouse, Import/Export Management, Human Ressources, etc…


"WH5, ca doit etre pour Warehouse 5, l’entrepot numero 5."

Srajitas poussa soudain Malback contre le mur, lui faisant signe de se taire. Une jeep passa a proximité du batiment contre lequel ils se trouvaient, balayant la zone avec un faisceau lumineux monté sur la portiere. Le disque passa pret d’eux sans les découvrir, et la voiture s’éloigna.

"Caraï, l’endroit est gardé. Vamos, nous ne sommes plus tres loin."

Quelques minutes plus tard, ils arriverent pret de l’entrepot n°5, un énorme hangar contigu de l’abattoir n°5. La carte d’acces leur ouvrit la porte sans difficulté, et ils penetrerent dans le batiment, inconscients du fait qu’une petite lumiere s’était mise a clignoter dans le poste des vigiles de la zone.

D’immenses colonnes de palettes étaient entreposées la, chacune comprenant une étiquette indiquant le destinataire : Mc Donald’s, Burger King, Big Cahuna Burger, Happy Burger, Whoopa-Choopa Burger, Crusty Burger, et bien d’autres labels dont la renommée en matiere de gastronomie rapide et bon marché n’était plus a faire.

Le reste du batiment se partageait entre les tapis roulants qui délivraient les caisses conditionnées, et quelques bureaux en préfabriqué destinés probablement a la gestion des stocks.

Les deux démons fouillerent la zone, sans trouver quoi que ce soit de convaincant. L’un des tiroirs d’un bureau posssedait une serrure, ce qui excita leur curiosité, mais en il n’était pas vérouillé, et ils s’apercurent qu’il ne contenait que des papiers sans importance. Apres une vingtaine de minute passées a éplucher des feuilles de compte et des bordereaux de livraison, Malback passa une main lasse dans ses cheveux trempés.


"Fuck, il semblerait bien que nous fassions fausse route."

Srajitas opina du sombrero.

"Mmh, il y a encore l’abattoir d’a coté, on peut y faire un t…"

Il laissa sa phrase en suspens, pretant l’oreillle. Malgré le roulement de la pluie sur le toit de toles, un bruit de moteur se faisait entendre de plus en plus clairement. Le mexicain dégaina son colt, tandis que le Baalite remettait rapidement en place les papiers éparpillés dans le bureau.

A peine les deux comperes étaient-ils revenus dans l’entrepot que la haute porte métallique du hangar vola en éclat, laissant passer deux fourgon blindés qui s’arreterent dans un crissement de pneux en dérapant. Le deuxieme camion renversa une pile de caisse de viande hachée, deversant la barbaque dans un "sprotch" peu apetissant.


"Je sens que notre enquete prend un tour nouveau", glissa le démon a son collegue.

Les portes des fourgons s’ouvrirent dans un "blang" sonore, et une dizaine d’hommes descendirent de chaque véhicule au pas de course – crane rasé, bombers, futal trop court et rangers cirées. Tous étaient armés, soient de petits pistolets mitrailleurs ou d’armes de poing, soit de battes et autres lames artisanales.

Abrités tant bien que mal derriere les portes du fourgon, des caisses et autres colonnes du hangar, ils mirent en joue les deux démons dans un cliquetis d’armes purement hollywoodien.


"Ok, ok… Bon, pas de panique, si ca se trouve c’est juste une bande de SHARPs venu se faire un concert sauvage de rocksteady, nan ?"

Srajitas n’eut pas le temps de répondre a Malback qu’il était vraiment con parfois, car la verriere du toit du hangar explosa, laissant descendre une autre vingtaine de skins en rappel sur des filins. Les hommes atterrirent en cercle autour des deux démons, les braquant de leurs fusils a pompe, revolvers automatiques et autres uzis. Plusieurs d’entre eux arboraient des logos “White Power”, des brassards néo-nazis, des croix gammées et symboles SS.

"Bon, je crois que c’est mort pour le concert de rocksteady…"

A proximité des camions, celui qui semblait etre le chef (un grand type maigre avec une scarification dessinant les lettres “SS” sur le front), hurla aux deux démons de rester immobiles, et de jeter leurs armes.

"Caraï, et comment yé yete mon arme si yé peux pas bouyer, hein ? Cabron…"

Le "chef" hésita un instant.

"Hum, ok, alors jetez vos armes et ensuite a plat ventre ! Vous autres, fouillez les !"

A contre-coeur, Srajitas fit pivoter son revolver, le présentant crosse en avant au skin venant vers lui.

"Y’espere qué tou a oune souper idée maintenant, Gringo", souffla-t-il a Malback.

Le Baalite faisait travailler ses méninges a vitesse grand V. Aptitude rare pour un démon de sa condition. Soudain, il eut une idée, comme cela lui arrivait souvent dans les situations critiques ou sa vie était en danger.

Alors que le cercle de skins se resserait lentement sur eux, il tendit brutalement la main a plat en avant, dans une imitation de salut hitlérien
.

"HEIL HITLER !!"

Mus par un reflexe pavlovien, tous les skins de l’entrepot se mirent au garde a vous, bras tendu, criant d’une meme voix :

"HEIL HITLER !!"

Cette erreur grossiere de leur part donna a nos deux héros la seconde nécessaire a leur sortie de crise ; le revolver de Srajitas se retrouva en un clin d’oeil dans sa position initiale, crachant le tonnerre. Le skin se trouvant face a lui eu le temps de voir sa main exploser avant que la balle ne lui fasse éclater le crane. Dans le meme temps, Malback pivotant sur lui-meme éventrait les deux adversaires les plus proches de lui.
Puis, d’un bond fabuleux, il se projeta sur une colonne qu’il entreprit de gravir aussi vite que possible, tandis que Srajitas disparaissait derriere une caisse, nettoyant son passage en abattant deux autres skins en une fraction de seconde.

Le groupe de néo-nazis sortit de sa stupeur (a l’exception des morts et des deux types regardant leurs intestins se déverser au sol) et commenca a tirer. Une grele de balles entoura les deux démons dans leur fuite. Voyant qu’ils avaient loupé leurs cibles, les skins se ruerent a leur poursuite.

Bondissant telle une panthere démoniaque de poutre métallique en poutre métallique, Malback arriva a creuser la distance avec ses poursuivants au sol, mais sachant tres bien qu’une balle mal placée suffirait a abreger sa mission définitivement. Il apercut Srajitas en-bas, glissant de caisse en caisse, tirant derriere lui afin de ralentir ses suiveurs.

L’Andromalius arriva enfin a la porte de sécurité donnant sur l’abattoir mitoyen, fini de vider son barillet derriere lui et franchit la porte. Malback quant a lui défonca une grille d’aération et s’y engouffra, arrivant également apres quelques reptations dans l’abattoir.

Il redescendit au sol avec la souplesse d’un ninja alors que Srajitas finissait de barricader la porte.


"Caraï, ca va pas ténir tres longtemps… Mais yé crois qu’il y a oune sortie dé l’autre coté dou batiment."

Tout en parlant, l’Andro rechargeait ses revolvers a une vitesse stupéfiante, d’un geste visiblement maitrisé depuis des éons. Malback avisa une hache d’incendie fixée au mur et s’en saisit machinalement. Derriere la porte, les cris retentissaient.

Tandis qu’une partie de la troupe faisait le tour du hangar pour prendre les démons a revers, quelques-uns tirerent a travers la porte, balancant suffisament de cartouche pour faire sauter la barricade de Srajitas. Lorsqu’ils penentrerent dans l’abattoir, celui-ci était silencieux et vide de toute présence.

Les skins se répartirent afin de fouiller méthodiquement la zone. Plusieurs rangées de carcasses de bovins étaient pendues a de gros crochets, au-dessus de rigoles charriant un mince ruisseau sanglant. Le froid qui régnait créait une vapeur glacée ondulant au niveau des genoux des hommes.

L’un des skins porta un talkie-walkie a ses levres et avertit ses compagnons a l’exterieur :


"Visibilité nulle, on les a perdus pour le moment. Faites gaffe, et prévenez lorsque le…"

L'homme s’arreta, baissa les yeux et regarda stupéfait le manche du couteau de lancer qui dépassait de son coeur. Il s’écroula sans un bruit. Un deuxieme éclat d’argent fendit l’air et un autre homme tomba dans un cri, portant les mains a sa gorge pour empecher les flots écarlates de s’échapper, en vain.

Les skins restants tentaient de repérer d’ou venait le coup, sans succes. L’un d’eux, un peu en avance des autres, cru voir l’une des carcasses bouger, et tira cinq balles au travers. La hache qui s’abattit violement dans son dos lui signala, mais trop tard, qu’il s’était trompé. Alertés par son cri d’agonie, les cinq tireurs restants s’approcherent, ne découvrant sur place que le corps sans vie de leur ancien compagnon pendu a un crochet de boucher. Le fait qu’ils formaient une cible facile ne leur vint pas tout de suite a l’esprit, et les cinq détonations qui suivirent les envoyerent au sol.

Huit skins restaient dans l’abattoir, mais isolés et apeurés, ce fut un jeu d’enfant pour les deux démons de s’en débarasser ; qui d’un jet de flamme, qui d’une balle entre les deux yeux, qui d’un crochet de boucher enfoncé dans la colonne vertébrale, qui d’une gorge tranchée en silence…

Le dernier survivant, haletant, reculait vers la sortie, couteau tendu devant lui. Il buta contre quelque chose, et se retourna dans un cri. Les dents en or de Srajitas lui souriaient méchament. Le skin n’eut pas le temps de porter son coup, car un ample mouvement circulaire de hache venait de le décapiter. Le corps tituba quelques instants, des flots de sang sortant irrégulierement de son cou, puis s’avachit aux pieds de Malback.

Couverts de sang, les deux démons soufflerent quelques instants.


"Bon, je pense qu’on en a buté une bonne moitié… Mais il reste ceux de dehors."

"Si, et ils vont pas tarder a etre dedans…"

Comme pour confirmer les dires du mexicain, des coups sourds résonnerent contre l’une des portes de l’abattoir.

Les deux démons filerent vers un long couloir qui les mena aux vestiaires du personnel… et vers un cul de sac. A la recherche d’une sortie, Srajitas tomba sur le local d’entretien, une foret de balais brosse lui tombant sur le coin de la figure.

Malback ouvrit prestement une autre porte mais elle donnait sur un débarras ne contenant qu’un fatras d’outils, cables et autres trucs inutiles. A moins que…

Tandis que le Baal fouillait hardiment, l’Andro entreprit de récuperer quelques bidons de détergents, savons liquide et produits décapants, les répandant dans le couloir aussi vite que possible. Un cri de victoire retentit derriere lui et il vit Malback brandissant fierement une tronconneuse éléctrique.

Les skins arrivaient. Voyant les deux démons pris au piege, ils se ruerent dans le couloir. Un jet de flammes accueillit les premiers, se propageant aux produits versés par l’Andromalius tout au long du couloir, prenant les skins au piege. Srajitas entreprit de vider ses barillets en direction de la masse informe et brulante des skins hurlant de douleur dans ce qui était devenu une antichambre de l'enfer.

Cinq d’entre eux, bondissant par dessus leurs compagnons, évitant miraculeusement les balles, arriverent au bout du couloir, et se précipiterent sur la porte. Celle-ci se referma brutalement, bloquant les bras et les mains des skins qui, fous de rage, le feu grondant derriere eux, essayaient de rentrer a tout prix.
Srajitas poussait de tout son poids contre la porte, mais galvanisés par la peur les skins gagnaient petit a petit quelques centimetres.


"Caramba, yé vais pas pouvoir les retenir longtemps !!"

Malback arriva enfin a démarrer sa tronconneuse, et dans un rire absolument démoniaque entreprit de libérer la porte en tranchant les membres bloqués dans l’ouverture. Le sang giclait abondamment sur son visage déformé par un rire dément. Un dernier bras bloquait la porte mais en tirant violement dessus, le démon parvint a l’arracher, et l’Andro put fermer la porte derriere lui.



**********************************************



Lorsque les hurlements cesserent, les deux démons ressortirent. Le sol était couvert de cadavres carbonisés, aux membres sectionnés, a la cervelle répandue contre les murs.

"Putain je vais salir mes pompes", grogna Malback.

Apres avoir escaladé tant bien que mal les corps, ils se retrouverent au milieu des carcasses de l’abattoir. Tout en se dirigeant vers la sortie, enjambeant a l’occasion un corps au crane rasé, Malback reflechissait. Il se frappa soudainement le front du plat de la main.


"Bon sang ! Mais c’est bien sur !"

Et couru en direction de l’entrepot, talonné par un Srajitas curieux.
Le Baal se rua a nouveau vers les bureaux, et s’arreta face a celui dont le tiroir leur avait paru suspect précedement.


"Regarde ; il y a bien une serrure mais pas de verrou ! J’ai été con de pas remarquer ca tout a l’heure…"

Malback sortit la petite clé récupérée sur le corps de l’ange tué par Srajitas (celle avec écrit "cache secrete avec plein d’armes" dessus) et fit jouer la serrure. Un déclic se fit entendre dans l’armoire derriere eux, et en l’ouvrant ils découvrirent une cache secrete avec plein d’armes.

Et surtout, un dossier dont la couverture leur fit briller les yeux.
En lettres capitales s’étalaient les mots suivants :


Quote:PROJET GOLGOTHA HYPER SECRET

La Domination du Monde en 4 Etapes

Les deux démons ricanerent un bon coup, et s'appretaient a quitter les lieux pour de bon lorsqu'une vois résonna dans leur dos.

"ON BOUGE PLUS !"

Couvert de sang, les vetements a moitié carbonisés, la tete encore fumante, le chef des skinheads se tenait dans l'encadrure de la porte, un fusil d'assaut entre les mains. Deux trainées sanglantes lui coulaient des oreilles, et il avait écopé d'une balle dans l'épaule.

"Maintenant, c'est moi qui vous nique, sales... sales juifs !!"

Poussant un cri guttural, il pressa la gachette.
Reply
#17
"Y'en a un peu plus, j'le laisse ?"

M. Compani, boucher-charcutier a Ronchin (59)





Chapitre XII : Nazi Scientists of the SS from Hell



(Résumé des épisodes précedents : nos deux amis sont dans une facheuse posture…)



"RHAAAAAAAAAAAAAAAAAA…..a ?"


Au lieu de faire déferler un enfer de plomb sur les deux démons, l'arme du caporal skinhead n'émit qu'un simple 'clik – clik –clik'.

Un sentiment d'intense solitude se lisait soudain dans ses yeux d'extremiste.

Fin voile d'amertume passé sur un regard vitreux, ephemere beauté de la vanité de toute chose, brutalement remplacée par une grimace d'atroce douleur lorsque la demi-seconde d'apres, la balle envoyée par Srajitas vint pulveriser le chargeur de l'arme dans un 'Bang' sonore, transformant la main gauche de l'infortuné néo-nazi en bouillie sanguinolante, magma informe de chairs et d'os explosés.

Le skin tomba au sol, a genoux, dans un rale d'agonie.



"Mein hand ! Mein hand ! Himmelkreuz Sakrement ! RHAAAAAA Ich habe gross malheur bouuuhouhou !"


A coups de pieds dans les cotes, Malback entreprit de faire descendre le skin dans l'entrepot.

De son coté, Srajitas compulsait - l'oeil brillant - le dossier secret que leur minutieuse enquete leur avait permit de trouver.

A grand renfort de claques cuisantes dans la gueule, le Baalite tentait d'apprendre de cruciales informations, notamment sur la localisation exacte de la secte, ce qu'ils préparaient, bref tout.
Le nazi, qui avait fait un stage de résistance a la torture l'été passé, se montrait plutot coriace et trop peu volubile au gout du démon.

Avisant une débiteuse circulaire a salami sur un plan de travail, il y traina le skin en état de choc – sa main saignait abondament et le type perdait des couleurs a vue d'oeil.



"Ca, ca devrait te délier la langue, trouduc'…"


Le démon régla la machine sur "5", déposa un petit papier sous la galette d'acier tranchant, fracassa la tete du skin sur le plateau metallique reccueillant d'ordinaire saucissons et autres pieces de viande, et entreprit le mouvement de va-et-vient que nous connaissons tous pour l'avoir vu tant de fois executé de main de maître chez nos bouchers-charcutiers habituels.

De petite lamelles d'oreille tomberent sur le petit papier, sous les hurlements du skin. Malheureusement, il ne pouvait guere se détacher de la clé de bras que lui infligeait le démon de Baal.



"Mec t'es en train de te faire débiter la tete franchement c'est ridicule comme situation – PARLE !!"


Un hurlement a s'en faire péter les cordes vocales en guise de réponse.

Morceaux de joue, d'arcade sourcillière, de cuir chevelu rasé de près… Petit a petit, tranche de 5mm par tranche de 5mm, la tete du skin se recomposait sous la machine, en lamelle délicatement superposées… shlitch… shlitch… shlitch…
Arrivé a la moitié de la tete, Malback comprit que le skin ne parlerait plus jamais, et le laissa en plan, avachi sur la machine, le cerveau dégoulinant sur le plan de travail, un oeil tranché se répandant doucement hors de ce qu'il lui restait d'orbite.



"Merde faut vraiment que je revoie mes méthodes d'interrogatoire", murmura le démon.

Il se retourna vers Srajitas, qui finissait de feuilleter le document.



"Gringo, on a touché lé yackpot. Vamonos en el coche, yé té raconte en chémin".


Deux ombres filerent dans l'obscure nuit noire et sombre.



*************************************************



Quelques heures plus tard, appar…taudis de Srajitas.

Une piece miteuse, sentant l'humidité et les moisissures. Le quartier est bruyant, peuplé a 95% de clandestins Latinos, ca sent la bouffe épicée, la pauvreté, le sexe payant et le vol a la tire.

De chaque coté de la bouteille de whisky qui trone sur le cageot servant de table, des banquettes de bagnole font office de fauteuil.

Le Mexicain fume un cigarillo nauséabond, Malback lui entame son troisieme paquet de clopes de la journée.

Les deux démons viennent de lire le Projet Golgotha. Et ca s'annonce plus corsé que prévu cette histoire…

Voici pour toi, O lecteur fidele bien que si longtemps délaissé par un auteur ingrat, ce qu'il raconte en substance…


PROJET GOLGOTHA
ou
La domination du Monde en 4 Etapes



Introduction :

Bouletteproufe est un Ange de Jean-Luc de grade 2 (Ami des opprimés) aimé et respecté de ses semblables. Poli, courtois, toujours la pour filer un coup de main, c'est une creme des relations sociales doublée d'un agent du Bien au redoutable sens du travail bien fait. Excellement bien noté par ses superieurs, il a toutes les qualités pour devenir un de ces quatre grade 3.

Jusqu'a ce qu'éclate la 2de Guerre Mondiale.

Envoyé en Allemagne pour soulager les victimes du régime nazi, l'Administration Angélique perd totalement sa trace. En réalité, d'apres ses propres notes, Bouletteproufe perd un peu les pédales lorsqu'il découvre l'étendue du cauchemar en visitant un camp de concentration en Pologne. La somme d'horreurs dont il prend conscience a ce moment la lui grille quelques fusibles.

Effaré par l'inconscience de l'Homme et sa méprise totale du Verbe Divin, Bouletteproufe décide de sauver l'humanité malgré elle et de la remettre dans le Droit Chemin. Dans son cerveau angélique perturbé naissent les prémisses de ce qui, 40 ans plus tard, sera le Projet Golgotha.

Bouletteproufe a besoin d'un leader, un nouveau Messie qui apparaitra a l'Humanité et saura la guider. Mais, le Vieux ayant visiblement d'autres chats a fouetter, ce n'est pas pour tout de suite. Bouletteproufe décide alors d'intervenir (au mépris des ordres) directement sur le cours de la guerre : il saura controler Hitler et se servir de la fantastique machine Allemande pour redonner espoir aux Hommes. Grace a ses nombreux talents, et au terme d'aventures trop complexes pour etre détaillées ici, il arrive a se faire engager dans le staff personnel du Führer.

Malheureusement, la fin de la guerre est proche, Hitler fait sous lui, et les beaux plans de Bouletteproufe tombent a l'eau de maniere définitive le 30 avril 1945 lorsque Adolf, bourré comme un coin, glisse sur une peau de banane dans son bunker et se brise le crane sur le rebord de la cheminée, déstabilisant un buste (en plomb) grandeur nature de Wagner qui vient écrabouiller la tete du p'tit moustachu.

Consterné, Bouletteproufe prend la fuite et s'exile aux Etats-Unis, avec pour tout bagage deux chemises, un pantalon propre, une paire de chaussettes, des bretelles, 350kgs d'or nazi et 50g de la fesse gauche d'Hitler.

Bien des années plus tard, ce morceau de tissu fessier saura se montrer utile, il le sait.

Bouletteproufe disparait de la surface de la Terre pendant 34 ans.


En 1979, il ressort de nulle part lors d'une conférence de Claude Vorilhon, le fondateur du mouvement Raelien, a l'occasion de la parution du livre "Accueillir les extra-Terrestres".

L'ange et le gourou se rencontrent régulierement, Vorilhon est fan de S-F et les projets fous du Jean-Luc seront la source de nombreux délires hallucinés du gourou.

Ensemble ils vont batir le Projet Golgotha, un projet de Domination du Monde en 4 Etapes :


I : Création d'un nouveau Prophete par clonage de cellules souches du cul d'Hitler, complétant l'ADN tres alteré du Führer par des chromosomes de synthese imitant l'ADN de Jésus

II : Erection d'une armée secrete de skinheads-zombis catholiques integristes et infiltration des gouvernements mondiaux

III : Renversement de l'Ordre Mondial, phase de chaos, opérations terroristes destinées a exacerber le fait religieux

IV : Révelation du Messie au Monde, instauration du IVeme Reich, domination de l'humanité dans la crainte de Dieu.


Grace a ses fantastiques reserves de pognon (l'or nazi investit judicieusement dans des companies a succes comme IBM ou Microsoft ayant fait de Bouletteproufe un ange immensément riche), l'ange a pu se créer une base secrete en plein désert du Nevada.
Il dispose d'une avancée technologique considérable sur le reste du Monde car il a su s'entourer de précieux rénégats de Bifrons, Joseph et Vapula, vieilles connaissances nostalgiques du Reich, une bande d'anciens SS, savants fous de leur état et adeptes des artefacts techno-magiques et de l'usage de la Science à des fins destructrices.

Simple terrain appartenant a une branche du mouvement raelien en apparence, ou se pratiquent chaque semestre des séminaires "d'approche et initiation a la communication sensuelle par attouchements sur des mineurs handicapés", les sous-sols du site cachent une installation hi-tech n'ayant rien a envier a la Zone 51 située, ironie du sort, a quelques dizaines de kilometres de la (une carte est fournie avec le dossier, car le scénariste a pas trop envie de se casser la tete).


Le dossier se termine sur une série de photos floues. On y distingue un corps humain extraordinairement musclé baignant dans une sorte de cuve, le corps parcouru de patchs, tubes et intraveineuses. L'une des photos zoome sur le visage ; Les cheveux longs de l'homme forment une meche étrange, et l'ombre rectangulaire qu'il porte sous le nez ne semble pas due a l'éclairage.



**************************************



Le Mexicain reposa le dossier sur la table d'un petit mouvement de poignet.



"Caraï Gringo, yé crois bien qu'on est partis pour bouter lé clone d'Hitler…"


Entre deux nuages de clopes, le Baalite répondit :


"Fucking nazis… I hate those motherfuckers…"
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#18
"Nom de Zeus !"

Doc.





Chapitre XIII : Back to the Futur




Un mince filament noir, filandreux comme une algue alien desséchée, flotte devant nous.

Prenons du recul. Le filament semble faire partie d'un réseau plus vaste, constitué de dizaines – non centaines de fibres grises interconnectées.

Reculons encore. Notre point de départ est mainteant invisible dans la masse spongieuse qui se forme autour de nous. Notre environnement est tres probablement organique. Mais ce ne sont que des résidus de tissus morts que nous voyons la.

Au fur et a mesure que nous continuons a nous éloigner, la vitesse semble s'accelerer, et bientot nous pouvons saisir l'ensemble d'un réseau sanguin, ou du moins ce qu'il en reste.

Une explosion de lumiere nous fait comprendre que nous venons de traverser une paroi quelconque et de nous retrouver a l'air libre. Nous voila face a un immense disque d'un blanc vitreux. L'espace d'un instant, il est recouvert d'un voile noir s'abbatant brutalement, et la puissance du souffle nous projette encore plus loin.

Voici ce qui a failli nous percuter : une paupiere.

Noir.

Nouvelle barriere ; nous voici a présent a la surface d'une étendue luisante, sombre et monotone.

Continuons, continons jusqu'a s'apercevoir qu'il s'agit d'un verre de lunette fumé, dont la paire surmonte un nez aquilin posé gracieusement au centre de l'immense visage d'un colosse noir portant une tasse de café a ses levres.

Le Baron Vigo prend son petit déjeuner.

Le géant se redresse, et nous pouvons voir qu'il n'est vetu que d'un calecon et d'un débardeur mettant son imposante masse en valeur. Nous le voyons se diriger sans hésitation jusqu'a l'évier de la kitchenette, ou il entreprend de soigneusement nettoyer sa tasse.

Suivons-le tandis qu'il revient vers le lit (de ce qui semble etre une chambre de motel), renifle a plusieurs reprises, puis tend son énorme bras vers les habits soigneusement disposés la veille. Son handicap ne semble pas etre un probleme pour s'habiller, et le géant a tot fait de revetir son costume noir – qui aurait bien besoin d'un coup de pressing.

Il renifle a nouveau, sourit, et se saisit de la Bible qui trone en bonne place sur la table de chevet, comme dans tout bon motel americain qui se respecte. Il disparait de notre vue lorsqu'il se dirige vers les toilettes, et en ressort quelques minutes plus tard, apres un bruit de chasse d'eau, l'air satisfait.

Il repasse devant nous et dépose la Bible au meme endroit. Il y a fort a parier que quelques pages sont manquantes. Chacun ses petits plaisirs secrets.

Mais déja le Baron est sur le pas de la porte, et il la referme sur lui, verouillant a double tour, nous plongeant dans la semi-obscurité d'une chambre anonyme, quelque part au Nevada, en ce matin de septembre 1988.

Qu'a cela ne tienne, faufilons-nous sous la porte, remontons a bonne hauteur, et observons le dos musculeux du Baron tandis qu'il descend les deux marches menant au parking, passe a coté de la Buick Lesabre garée la, et se dirige d'un pas ample vers l'accueil du motel, une baraque placée un peu plus loin.

Des coups sourds attirent notre attention. Ils semblent provenir de la voiture. Oui, du coffre plus exactement. Quittons donc le Baron d'Andromalius et approchons nous de l'arriere du véhicule.

Peut-etre que… Apparement, en se tournant un peu comme ca on pourrait passer par la serrure du coffre mais… gnnn… Ca coince… Allez… Pousse ! Mais pousse bordel ! Gnnnnnnn-plop! Ah ca y'est.

Oula, il fait noir la-dedans. On entend une respiration rauque, étouffée… Un souffle court de bete épuisée.
Mmmh… Mais ce parfum… Vous sentez ? Fort, musqué, un peu acide… La pluie d'automne sur un tapis d'épines de pin… En plus animal toutefois.

On y voit rien ici et .. PAF ! Aï-Euh ! Nous venons de heurter une surface chaude et humide.

Snif ! Snif ! Mmmh, une peau satinée mais étrangement rigide… Alors que nos yeux s'habituent a l'obscurité, nous distinguons devant nous ce qui ressemble fortement a une bretelle de soutien-gorge.

Remontons le galbe du cou, moite de transpiration, survolons ces cheveux emmelés, collés par la sueur, ce menton saillant, ces levres recouvertes de chaterton, et plongeons au sein de ces deux grands yeux brulant d'une fievre maligne, que l'on aurait raison d'attribuer a une puissant sentiment de haine.

Amusant, nous pouvons adopter le point de vue de la jeune et frele prisonniere (car c'est de cela qu'il s'agit) alors que le coffre s'ouvre soudainement, découpant l'énorme silhouette de Vigo sur le bleu du ciel américain.

La silhouette tend une main énorme et arrache d'un coup sec le scotch couvrant les levres d'Arachnée (car c'était elle ; on peut rien vous cacher) avant de la faire sortir du coffre d'une violente traction et de la liberer des menottes entravant ses bras derriere son dos.


"Que cela vous serve de lecon. La prochaine fois ce sera vingt-quatre heures completes et il y aura un varan avec vous dans le coffre".

Le géant noir se dirige sans autre forme de proces vers le siege passager. Se massant les poignets, des larmes dans les yeux et le nez morveux, la démone de Shaytan opte pour la seule attitude acceptable : la soumission.

Sans un mot, elle s'installe au volant et démarre.



*********************



Le bolide fonce comme une balle chauffée a blanc sur l'asphalte craquelé – une veine de goudron au milieu du désert.

Il roule depuis quelques heures déja, lorsqu'enfin Vigo prend la parole.


"J'ai passé plusieurs coups de telephone hier. Les choses bougent. Vite, plus vite que prévu.

Pour je ne sais quelle raison, le démon accompagnant le Capitaine Malback nous a notifié extremement tard leur destination. Mais, je ne doute pas qu'il aura une excellente explication lorsque nous le rencontrerons.

Car nous serons la a temps également, he he he. Vous prendrez la prochaine a droite, direction Red Man Pueblo. Un trou a rat mais abritant quelques serviteurs de Kronos qui nous seront utiles pour rattraper notre retard."



3km plus loin, la démone s'execute a la vue d'un vieux panneau de bois tout pourri indiquant "..d Ma.. ueb.o" – son extraordinaire sens de la déduction faisant le reste.
La voiture s'enfonce dans un dédale rocailleux, croise un garde armé s'effacant au passage de la Buick, et finit par arriver au milieu de quelques improbables cahuttes installées ici et la.


"Restez-la". Le géant n'a pas besoin de bouger les levres pour se faire entendre.

Il descend de la voiture et part rejoindre deux types sortant d'une des masures en bois. Arachne les distingue mal de la ou elle est, mais ils s'inclinent respectueusement devant le Baron.

Apres quelques echanges de paroles, inaudibles de la ou nous sommes, l'un des deux types s'approche de la voiture, et se penche a la fenetre d'Arachnée.

L'homme est petit, vieux, dégarni, une paire de petites lunettes rondes accrochée au nez, et une énorme barbe poivre et sel broussailleuse lui mange la moitié du visage.



"Salut toi" (petite voix fluette).

"Va te garer plus loin on va vous installer ca."


Le petit vieux s'installe a la place du mort et guide Arachnée jusqu'a un hangar délabré.

"Bon, je vais t'expliquer la manip'. Le Baron a besoin d'un déplacement spatial et temporel urgent. Il faudrait que vous soyez a un sacré paquet de bornes a l'heure actuelle. Ca on peut faire mais pas dans ce genre de cas ; les distances et la date ne sont pas compatibles. Par contre on a pu calculer une route temporelle vous permettant d'atterir au meme repere spatio-temporel que celui-que vous voulez – mais de facon moins directe. En fait ca vous prendre plus longtemps, mais moins longtemps quand meme. Tu me suis ?"

"J'ai rien pané vieux schnock. On va faire quoi ??"


Le vieux soupire.


"On va vous envoyer dans le passé – pas beaucoup, un siecle a peu pres. La-bas vous allez retrouver un collegue a nous, de Kronos, qui va vous renvoyer vers le présent. La déviation spatiale innérente au circuit de dérivation temporelle vous ammenera a bon port et dans les temps impartis, soit un peu avant maintenant."

"…"

"Oui, enfin si nos calculs sont justes."

"QUOI ?!"

"Oui ben on a été prévenus tards aussi hein. On a du faire ca un peu a l'arrache mais ca devrait aller. Descend de la voiture."


La démone s'execute.

Le deuxieme accolyte du petit vieux, tout aussi agé, entreprend d'amener une étrange machine au-dessus de la buick grace a un petit chariot élévateur.



"Y'a un film assez marrant qui est sorti il y a 3 ans. "Retour vers le futur" ca s'appelle. Et ca nous a donné une idée, hi hi hi hi hi !"


Les cinq heures suivantes voient les deux vieux comperes bricoler le moteur de la Lesabre, démonter le capot et y fixer une dispositif complexe constitué de turbines, de tuyaux et d'hélices.

Le soir tombe lorsque les deux vioques exhibent le résultat de leurs travaux, fiers comme pas deux. Enfin si, comme deux en l'occurence.



"Et voila. Alors le principe est simple. Tu fonces entre les deux fanions la-bas (il indique deux bouts de tissus agités par le vent au bout d'une piste aménagée a la va-vite). Faut que tu les dépasses a 90mph ok ? Ca vous fait débouler en 1888. La-bas not'collegue vous attend, il vous indique la piste de retour, vous faites la meme manip' et vous voila aux coordonnées indiquées par Monseigneur (courbette au Baron)."

"Bien. Si cela marche comme prévu vous serez récompensés – j'y veillerais personellement. Dans le cas contraire, c'est également personellement que je m'occuperais de votre cas".


Sourire gené des deux débris.

Ayant abandonné toute envie d'expliquer en quoi cela sentait la super-mauvaise idée depuis un bail, Arachnée s'installe derriere le volant. Avec ce truc sur le capot, la Buick ressemble a une version Custom de concours.

Elle démarre et le deuxieme petit vieux se penche a sa fenetre.



"Bon, pour le Baron, hum ca va, par ccontre n'oubliez pas : lors du passage, n'ouvrez surtout pas les yeux. Sous aucun pretexte. Compris ?"


La démone acquiesse brievement. Le Baron s'installe a ses cotés.

Elle démarre et va se placer au bout de la piste, les fanions commencant a se perdre dans la pénombre. Elle allume les phares, et appuie sur le champignon. Les roues dérapent sur place, puis la voiture bondit en avant dans un nuage de poussiere et de graviers.

La piste défile a vive allure sous les pneux de la buick. 50… 60… elle accelere encore.
A 80mph, des éclairs bleutés apparaissent et parcourent la carosserie en grésillant.

La démone écrase ses paupieres et la pédale d'accelerateur. La voiture disparait a un metre des fanions dans un WARP ! énorme et une explosion d'étincelles pour faire bien.

Seules deux trainées de pneux parcourues de flammeches attestent de ce qui vient de se produire.



************************


Un siecle plus tot



Deux yeux de rapace fixent un point au milieu de nulle part.

Immobiles, les deux fentes derriere lesquelles on distingue deux pupilles acérées scrutent le désert, attendant… ca y'est.

Warp !

A quelques centaines de metres de la, une étrange machine a fait son apparition dans une explosion de lumiere electrique. Dans un crissement, le véhicule s'arrete en dérapant, perdu dans un nuage de sable.

L'observateur de la scene remet son chapeau en place, crache la cigarette qui pend entre ses levres… Ses levres ?

J'attend, ses levres ? "Coupées au couteau" oui c'est bien Mélanie, fais tourner bride a sa monture et se dirige au petit galop vers la bagnole surgie du néant.
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