(quelques semaines avant la mission néfaste)
Il se savait moins intelligent que ses confrères et ça le déprimait. Certes, il était plus intelligent que 99% de la population humaine, mais qui veut vraiment se mesurer à une espèce simiesque ? Et ses collègues aussi s’en rendaient compte. Il lui avait fallu plus d’un mois pour comprendre pourquoi on pouvait voir les trous noirs et bien que 3 de ses collègues aient tenté patiemment de lui expliquer le lien logique entre relativité restreinte et physique quantique, la base de la théorie physique unifiée, il n’était toujours pas sûr d’avoir bien compris. La honte, quoi ! Et évidemment, cela avait des répercussions sur sa carrière, comme, par exemple, maintenant.
Le lieu : université d’été, service de Jean, Paradis. Les protagonistes : un grade 2 barbu à lunettes, le visage sévère, lui et deux de ses collègues, un gros débonnaire toujours souriant et un vieux type toujours énervé. Des irrécupérables, comme lui. L’objectif : summer course, session de rattrapage.
« Dites, vous là, vous écoutez ce qu’on vous dit ?
Oops, il avait encore divagué, perdu dans ses pensées. La réponse correcte était donc non, mais ce n’était pas la chose à dire. Il hasarda donc un courageux :
_ Oui, monsieur !
_ Bien, vous n’en aviez pas l’air pourtant. Je disais donc que pour comprendre un inventeur, pour manipuler un inventeur, vous devez penser comme lui. Vivre comme lui. Se mettre à sa place.
Tous hochèrent la tête. Tous étaient conscients que lorsqu’un professeur commence à vous servir des banalités de ce genre, cela ne voulait rien dire de bon pour la suite. Et cela ne rata pas :
_ Bref, passons au cas pratique. Vous avez autour de vous fils électriques, plaquettes électroniques, soudeuses, fioles, potions, composés chimiques, mélangeurs, chauffeurs, informatique à volonté. Vous avez 4h. Préparez-moi quelque chose de nouveau ! Faites-moi une invention ! »
Sur ce, le professeur quitta la pièce et dans le silence de mort qui régna alors, le clic de la serrure qui s’enclenchait résonna comme un dong fatidique. Les 3 candidats se regardèrent. Ce genre de moment qui dure une seconde en réalité mais qui semble s’étirer à l’infini. Puis tous se jetèrent sur leurs établis…
4h plus tard.
Clic ! Le professeur venait de déverrouiller la porte. Il entra plein d’entrain, un café fumant à la main. Il posa son café sur le bureau et se frotta les mains.
« Alors, alors ! Qu’est-ce que nous avons là dites ?
Le vieux type énervé présenta une boite métallique de forme oblongue, muni d’une interface usb sur le coté et d’un dérouleur papier tel un fax. Il la tenait tel un bourgeois donnant les clefs de la ville au conquérant. Le Professeur récupéra l’offrande, circonspect.
« Oui, qu’est-ce que c’est ?
_ Un décodeur universel maitre. Vous passez le message codé par la feinte, là, et il le décode aussitôt suivant des algorithmes de décryptage de ma confection. Il comprend tout système de codage connu terrien et fonctionne sur 53 langues, dont le Navajo évidemment. Le résultat s’affiche aussitôt en écriture angélique sur l’écran.
On sentait l’anxiété percer à chaque mot du vieux type énervé. Il mangeait presque ses mots. Le Professeur, lui, restait de marbre. Le verdict tarda un peu à venir.
_ Humm… Un petit gadget sympathique. Pas très original, mais bien conçu. Il y a de l’idée. Bravo, mon garçon. (Il passa sans plus attendre à la table suivante). Et vous ?
Le gros débonnaire avait abandonné l’électronique pour la chimie. Il tenait précieusement entre ses doigts une éprouvette de couleur verte électrique.
_ Voilà, maitre ! Il s’agit d’un puisant acide de ma composition que j’ai nommé aspirateur de graisse. Vous mettez une goutte sur votre alimentation et le composé semi-organique va ronger instantanément les matières grasses présentes en trop, rendant la nature plus saine pour la population avant de se décomposer par voie aérienne. Et… (il prit une pause théâtrale) le goût reste le même !
_ Impressionnant ! Bravo, mon garçon ».
Et voilà qu’il se tournait vers lui maintenant… Il présenta sa machine, angoissé et quelque part déjà défaitiste. La machine ressemblait à une fouetteuse de cuisine qui se serait fondue avec un robot de guerre pour enfant. Il y avait des trucs métalliques qui devaient tourner apparemment et des diodes de toute part qui clignotaient par intermittence. Le scepticisme du Professeur était flagrant.
« Oui, alors… humm… c’est un détecteur d’anomalies casuels dans le continuum espace-temps. On le calibre sur une personne et il s’appuie sur les états quantiques de la personne pour anticiper les changements de flux et de probabilités. Et en cas de modification brusque, alors il émet une alarme. Il a un portée d’environ 10 à 15 minutes je dirais.
Il s’arrêta. Les 3 autres anges de Jean le regardaient fixement, l’incompréhension se lisant sur leur visage. Il continua alors, lâchant chaque mot comme à regret :
« C’est un détecteur d’emmerd’ quoi ! S’il va vous arriver un gros problème, il fait beep. Enfin, normalement… »
La voix du professeur tomba comme un couperet.
_ Apparemment, il ne marche pas votre truc. (Il jeta l’objet sur la table, dédaigneux). Bon, suivez-moi, secteur des communications. Allez chercher votre nouvel assignement.
5 minutes plus tard, seul dans le bureau avec le maitre.
« Félicitations, vous avez brillement réussi votre dernier test. Voilà, pour vous. Opération Clooney, ça s’appelle. Votre nom de code sera Plastique».
Le professeur lui tendit la lettre. L’ange le tenait comme on tiendrait une grenade dont la goupille serait en train de glisser lentement… Quelque part, non loin, seule sur une table, abandonnée, une machine bizarre qui ressemblait à une fouetteuse se mit à grésiller, à bourdonner, à vibrer de plus en plus vite…
Il se savait moins intelligent que ses confrères et ça le déprimait. Certes, il était plus intelligent que 99% de la population humaine, mais qui veut vraiment se mesurer à une espèce simiesque ? Et ses collègues aussi s’en rendaient compte. Il lui avait fallu plus d’un mois pour comprendre pourquoi on pouvait voir les trous noirs et bien que 3 de ses collègues aient tenté patiemment de lui expliquer le lien logique entre relativité restreinte et physique quantique, la base de la théorie physique unifiée, il n’était toujours pas sûr d’avoir bien compris. La honte, quoi ! Et évidemment, cela avait des répercussions sur sa carrière, comme, par exemple, maintenant.
Le lieu : université d’été, service de Jean, Paradis. Les protagonistes : un grade 2 barbu à lunettes, le visage sévère, lui et deux de ses collègues, un gros débonnaire toujours souriant et un vieux type toujours énervé. Des irrécupérables, comme lui. L’objectif : summer course, session de rattrapage.
« Dites, vous là, vous écoutez ce qu’on vous dit ?
Oops, il avait encore divagué, perdu dans ses pensées. La réponse correcte était donc non, mais ce n’était pas la chose à dire. Il hasarda donc un courageux :
_ Oui, monsieur !
_ Bien, vous n’en aviez pas l’air pourtant. Je disais donc que pour comprendre un inventeur, pour manipuler un inventeur, vous devez penser comme lui. Vivre comme lui. Se mettre à sa place.
Tous hochèrent la tête. Tous étaient conscients que lorsqu’un professeur commence à vous servir des banalités de ce genre, cela ne voulait rien dire de bon pour la suite. Et cela ne rata pas :
_ Bref, passons au cas pratique. Vous avez autour de vous fils électriques, plaquettes électroniques, soudeuses, fioles, potions, composés chimiques, mélangeurs, chauffeurs, informatique à volonté. Vous avez 4h. Préparez-moi quelque chose de nouveau ! Faites-moi une invention ! »
Sur ce, le professeur quitta la pièce et dans le silence de mort qui régna alors, le clic de la serrure qui s’enclenchait résonna comme un dong fatidique. Les 3 candidats se regardèrent. Ce genre de moment qui dure une seconde en réalité mais qui semble s’étirer à l’infini. Puis tous se jetèrent sur leurs établis…
4h plus tard.
Clic ! Le professeur venait de déverrouiller la porte. Il entra plein d’entrain, un café fumant à la main. Il posa son café sur le bureau et se frotta les mains.
« Alors, alors ! Qu’est-ce que nous avons là dites ?
Le vieux type énervé présenta une boite métallique de forme oblongue, muni d’une interface usb sur le coté et d’un dérouleur papier tel un fax. Il la tenait tel un bourgeois donnant les clefs de la ville au conquérant. Le Professeur récupéra l’offrande, circonspect.
« Oui, qu’est-ce que c’est ?
_ Un décodeur universel maitre. Vous passez le message codé par la feinte, là, et il le décode aussitôt suivant des algorithmes de décryptage de ma confection. Il comprend tout système de codage connu terrien et fonctionne sur 53 langues, dont le Navajo évidemment. Le résultat s’affiche aussitôt en écriture angélique sur l’écran.
On sentait l’anxiété percer à chaque mot du vieux type énervé. Il mangeait presque ses mots. Le Professeur, lui, restait de marbre. Le verdict tarda un peu à venir.
_ Humm… Un petit gadget sympathique. Pas très original, mais bien conçu. Il y a de l’idée. Bravo, mon garçon. (Il passa sans plus attendre à la table suivante). Et vous ?
Le gros débonnaire avait abandonné l’électronique pour la chimie. Il tenait précieusement entre ses doigts une éprouvette de couleur verte électrique.
_ Voilà, maitre ! Il s’agit d’un puisant acide de ma composition que j’ai nommé aspirateur de graisse. Vous mettez une goutte sur votre alimentation et le composé semi-organique va ronger instantanément les matières grasses présentes en trop, rendant la nature plus saine pour la population avant de se décomposer par voie aérienne. Et… (il prit une pause théâtrale) le goût reste le même !
_ Impressionnant ! Bravo, mon garçon ».
Et voilà qu’il se tournait vers lui maintenant… Il présenta sa machine, angoissé et quelque part déjà défaitiste. La machine ressemblait à une fouetteuse de cuisine qui se serait fondue avec un robot de guerre pour enfant. Il y avait des trucs métalliques qui devaient tourner apparemment et des diodes de toute part qui clignotaient par intermittence. Le scepticisme du Professeur était flagrant.
« Oui, alors… humm… c’est un détecteur d’anomalies casuels dans le continuum espace-temps. On le calibre sur une personne et il s’appuie sur les états quantiques de la personne pour anticiper les changements de flux et de probabilités. Et en cas de modification brusque, alors il émet une alarme. Il a un portée d’environ 10 à 15 minutes je dirais.
Il s’arrêta. Les 3 autres anges de Jean le regardaient fixement, l’incompréhension se lisant sur leur visage. Il continua alors, lâchant chaque mot comme à regret :
« C’est un détecteur d’emmerd’ quoi ! S’il va vous arriver un gros problème, il fait beep. Enfin, normalement… »
La voix du professeur tomba comme un couperet.
_ Apparemment, il ne marche pas votre truc. (Il jeta l’objet sur la table, dédaigneux). Bon, suivez-moi, secteur des communications. Allez chercher votre nouvel assignement.
5 minutes plus tard, seul dans le bureau avec le maitre.
« Félicitations, vous avez brillement réussi votre dernier test. Voilà, pour vous. Opération Clooney, ça s’appelle. Votre nom de code sera Plastique».
Le professeur lui tendit la lettre. L’ange le tenait comme on tiendrait une grenade dont la goupille serait en train de glisser lentement… Quelque part, non loin, seule sur une table, abandonnée, une machine bizarre qui ressemblait à une fouetteuse se mit à grésiller, à bourdonner, à vibrer de plus en plus vite…