01-23-2011, 11:41 PM
Rien.
La mémoire, celle qui, avec ses pensées, donnait à son esprit sa forme et sa consistance, n'avait pas de début, pas de fin. Arabesques et courbes, circonvolutions et ondulations, les méandres aux arrondis embrumés ne laissaient voir aucun point de départ qui aurait pu servir de fil pour s'y retrouver.
Tout.
Il pouvait en surgir des souvenirs sans attaches ni sentiments, des sensations sans corps ni fin, des esquisses aux bouillonnantes impressions de bien-être ou de douloureuses images trop précises. Ces bribes se croisaient, se percutaient, s'évitaient ou s'assemblaient. Et sous le regard intérieur émerveillé ou craintif de l'Ange, elles se combinaient parfois en Mémoire. Des événements, rares mais précieux, ressurgissaient. Des joies, des peines, des peurs. Des succès, des regrets, des remords, des erreurs. Sans liens ou au contraire bien trop liés.
Les Autres.
Ceux qui étaient apparus, au détour d'un chemin, au détour d'une vie. Êtres sans visage trouvant une seconde existence, éphémère, évanescente et tronquée. Figures désormais immortelles tant que durerait sa conscience. Amis, opposants, complices, intimes, détracteurs, méfiants...
Soi.
L'Appréhension. La panique sans racines, sans raison. Qui es-tu ? Si tu es moi, pourquoi ne m'en souviens-je pas ? Si je suis toi, pourquoi en suis-je là ? Qui sommes nous pour ne plus l'être ? Qui étions nous pour être encore ? Qui serons nous pour être à nouveau ?
Rien, car face à l'Immense, face au Complexe, face à l'Unique, face à l'Absolu, je ne serai rien.
Tout, parce que malgré ce qu'on nous dit, je peux tout faire, parce que tant que je n'ai pas fait un pas, tous les chemins s'ouvrent à mes pieds.
Autre, toujours, car on change sans cesse et jamais ne redevient le même.
Moi, parce qu'enfin si je ne suis pas Lui, je suis la somme de ce que je ne suis pas, la différence de toutes mes parties.
Ils sont tous les mêmes, tous identiques ou presque. Leurs variations sont minimes, que ce soit dans les formes ou dans les couleurs. Quoique. Ils ont changés, se sont diversifiés. Ils ont forcé la chance et inventé le temps, tissé le futur et habillé le vent. Nous, nous les avons suivis, ils ne sont rien, ils sont faibles, ils sont vains. Mais pour nous ils sont tout. Car tout se mesure à eux, tout, jusqu'à nos formes qui ne seraient sans leur imagination. A quoi ressemblions nous avant ? A rien ! Pourquoi aurions nous ressemblé ?
Je me demande... un rocher, de l'eau... je sais ce que c'est. Si je n'ai pas de forme, je le sais toujours. Lorsque j'étais, avant eux, je devais savoir. Lorsque j'étais, avant eux, je ne savais pas. Si on m'avait enfermé, si on m'avait aveuglé, modifié, si on m'avait privé de Ses liens, si on m'avait réduit, diminué, l'aurais-je encore su ? Non, parce qu'un rocher, de l'eau... c'était à Lui que nous les devions, c'était par Lui que nous les appréhendions. Maintenant... un rocher est lourd, sa surface érafle mon enveloppe, l'eau mouille ma peau, glisse le long de ma forme. Si je ferme mes sens, mais grâce à ceux-ci, le rocher est toujours là, énorme, bloquant toujours le chemin, l'eau ruisselle encore et ses gouttes tintent aux fantômes de mes oreilles. Un rocher, c'est un rocher. De l'eau, c'est de l'eau. Et moi... je ne suis plus Lui. Grâce à eux. Même s'ils sont tout, car à jamais nous ne serons plus "rien". Nous sommes leurs gardiens, ou leurs guides, ou leurs amis, ou leurs consciences, ou leurs frères, ou leurs soutiens... Leurs débiteurs. Peu importe pour quoi exactement, nous leur devons beaucoup. Ne serait-ce que la valeur et la beauté des choses peut-être, ce qu'eux-mêmes peinent tant à comprendre.
Ils sont si différents. De nous, entre eux. Ils sont la différence, parce qu'ils l'ont appelée, parce qu'ils la rendent possible. Nous ne nous serions jamais comparés à des êtres sans conscience, nous ne nous comparerons jamais à Lui. Dans les sphères de leurs pensées, dans ces mondes qui Lui échappent peu à peu, ils nous gardent une place. Il est notre Père, notre Créateur, nous sommes leurs leurs enfants, leurs créatures... Devrions-nous en être apeurés, fâchés ? Je ne le suis pas en tout cas. Je goûte mon existence, et la leur et celle de mes frères. Je goûte nos différences, nos ressemblances, et mes attaches. Car j'ai choisi et je n'ai plus de liens. Je tiens en mes mains les rubans de mes allégeances, de mes relations, de mes affections, de mes liaisons, de mes passions.
Ange j'étais, créature de Dieu au service des hommes. Ange je reste, enfants des hommes, au service de Dieu et de sa Lumière.
Celle qui ne m'éblouit plus. Celle que je vois.
L'Arc-en-ciel né de la rencontre, de l'échange, la musique des couleurs née des accords. De Chair et de Cœur, de Lumière habillée d'Ombre, de Pensées et de Sensations, d'Amour et de Partage...
La mémoire, celle qui, avec ses pensées, donnait à son esprit sa forme et sa consistance, n'avait pas de début, pas de fin. Arabesques et courbes, circonvolutions et ondulations, les méandres aux arrondis embrumés ne laissaient voir aucun point de départ qui aurait pu servir de fil pour s'y retrouver.
Tout.
Il pouvait en surgir des souvenirs sans attaches ni sentiments, des sensations sans corps ni fin, des esquisses aux bouillonnantes impressions de bien-être ou de douloureuses images trop précises. Ces bribes se croisaient, se percutaient, s'évitaient ou s'assemblaient. Et sous le regard intérieur émerveillé ou craintif de l'Ange, elles se combinaient parfois en Mémoire. Des événements, rares mais précieux, ressurgissaient. Des joies, des peines, des peurs. Des succès, des regrets, des remords, des erreurs. Sans liens ou au contraire bien trop liés.
Les Autres.
Ceux qui étaient apparus, au détour d'un chemin, au détour d'une vie. Êtres sans visage trouvant une seconde existence, éphémère, évanescente et tronquée. Figures désormais immortelles tant que durerait sa conscience. Amis, opposants, complices, intimes, détracteurs, méfiants...
Soi.
L'Appréhension. La panique sans racines, sans raison. Qui es-tu ? Si tu es moi, pourquoi ne m'en souviens-je pas ? Si je suis toi, pourquoi en suis-je là ? Qui sommes nous pour ne plus l'être ? Qui étions nous pour être encore ? Qui serons nous pour être à nouveau ?
Rien, car face à l'Immense, face au Complexe, face à l'Unique, face à l'Absolu, je ne serai rien.
Tout, parce que malgré ce qu'on nous dit, je peux tout faire, parce que tant que je n'ai pas fait un pas, tous les chemins s'ouvrent à mes pieds.
Autre, toujours, car on change sans cesse et jamais ne redevient le même.
Moi, parce qu'enfin si je ne suis pas Lui, je suis la somme de ce que je ne suis pas, la différence de toutes mes parties.
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Ils sont tous les mêmes, tous identiques ou presque. Leurs variations sont minimes, que ce soit dans les formes ou dans les couleurs. Quoique. Ils ont changés, se sont diversifiés. Ils ont forcé la chance et inventé le temps, tissé le futur et habillé le vent. Nous, nous les avons suivis, ils ne sont rien, ils sont faibles, ils sont vains. Mais pour nous ils sont tout. Car tout se mesure à eux, tout, jusqu'à nos formes qui ne seraient sans leur imagination. A quoi ressemblions nous avant ? A rien ! Pourquoi aurions nous ressemblé ?
Je me demande... un rocher, de l'eau... je sais ce que c'est. Si je n'ai pas de forme, je le sais toujours. Lorsque j'étais, avant eux, je devais savoir. Lorsque j'étais, avant eux, je ne savais pas. Si on m'avait enfermé, si on m'avait aveuglé, modifié, si on m'avait privé de Ses liens, si on m'avait réduit, diminué, l'aurais-je encore su ? Non, parce qu'un rocher, de l'eau... c'était à Lui que nous les devions, c'était par Lui que nous les appréhendions. Maintenant... un rocher est lourd, sa surface érafle mon enveloppe, l'eau mouille ma peau, glisse le long de ma forme. Si je ferme mes sens, mais grâce à ceux-ci, le rocher est toujours là, énorme, bloquant toujours le chemin, l'eau ruisselle encore et ses gouttes tintent aux fantômes de mes oreilles. Un rocher, c'est un rocher. De l'eau, c'est de l'eau. Et moi... je ne suis plus Lui. Grâce à eux. Même s'ils sont tout, car à jamais nous ne serons plus "rien". Nous sommes leurs gardiens, ou leurs guides, ou leurs amis, ou leurs consciences, ou leurs frères, ou leurs soutiens... Leurs débiteurs. Peu importe pour quoi exactement, nous leur devons beaucoup. Ne serait-ce que la valeur et la beauté des choses peut-être, ce qu'eux-mêmes peinent tant à comprendre.
Ils sont si différents. De nous, entre eux. Ils sont la différence, parce qu'ils l'ont appelée, parce qu'ils la rendent possible. Nous ne nous serions jamais comparés à des êtres sans conscience, nous ne nous comparerons jamais à Lui. Dans les sphères de leurs pensées, dans ces mondes qui Lui échappent peu à peu, ils nous gardent une place. Il est notre Père, notre Créateur, nous sommes leurs leurs enfants, leurs créatures... Devrions-nous en être apeurés, fâchés ? Je ne le suis pas en tout cas. Je goûte mon existence, et la leur et celle de mes frères. Je goûte nos différences, nos ressemblances, et mes attaches. Car j'ai choisi et je n'ai plus de liens. Je tiens en mes mains les rubans de mes allégeances, de mes relations, de mes affections, de mes liaisons, de mes passions.
Ange j'étais, créature de Dieu au service des hommes. Ange je reste, enfants des hommes, au service de Dieu et de sa Lumière.
Celle qui ne m'éblouit plus. Celle que je vois.
L'Arc-en-ciel né de la rencontre, de l'échange, la musique des couleurs née des accords. De Chair et de Cœur, de Lumière habillée d'Ombre, de Pensées et de Sensations, d'Amour et de Partage...