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Cantique de nos peines
#4
Mardi 15 janvier 2008
Paris (pour combien de temps encore ?)

« - Dis-moi, dis-moi, guérirai-je
De ce qui est dans mon cœur ?
- Ami, ami, la neige
Ne guérit pas de sa blancheur. »
Francis Jammes

Nous sommes ici depuis déjà une semaine. Une semaine… Passée à voir se succéder médecins, infirmiers, psychologues, avec leurs lots de questions, de médicamentations douteuses, d’obsessions, de théories fumeuses. Mais rien n’a changé. Une semaine, et nous sommes toujours aussi désespérées.
Les filles ne nous parlent plus. Ça n’est pas faute de vouloir communiquer. Nous hurlons notre peur, nous crions notre rancœur. Elle est si grande, notre douleur. Mais elles refusent de répondre, échangeant entre elles des regards éloquents, quelques mots de temps en temps. Et elles croquent leurs cachets comme s’il s’agissait de pilules du bonheur, ces mêmes cachets qui nous écœurent, nous font horreur.
A chaque instant, nous supplions le ciel pour qu’elles ne nous quittent pas. Et pour une cigarette, pour un verre d’alcool, n’importe quoi, mais qui nous fasse tourner la tête, qui nous enivre. Aller se noyer quelque part, ne refaire surface que pour quitter cet endroit…

Privilège parmi tous les privilèges ! Privées de liberté, Ils allègent notre peine… Nous pouvons à présent quitter notre chambre pour aller dans la salle commune. Quelle liberté… Un zoo humain ? Un cabinet des curiosités ? Quels monstres sont les hommes pour avoir créé ces asiles d’aliénés. Un homme y passe ses journées, le regard suspendu au bleu du ciel, souriant aux anges. Un déchet exhibe sa laideur sous nos yeux dégoutés. Crâne déformé, visage ravagé, regard vitreux, teint cireux. Et la peau granuleuse, la bouche toujours baveuse… Et cette femme, maquillée à outrance, qui d’un air théâtral nous jauge et nous lance ses piques acerbes. Et celui là, qui, persuadé que son ventre grouille de démons, nous demande si il est possible de le faire accoucher… C’est à pleurer. Même les tristes rayons de soleil qui s’y promènent sont timides, fragiles, convaincus de leur inutilité.

Aude, Sarha… s’il vous plait… parlez, parlez nous. Nous n’en pouvons plus d’être si vide de tout. Dites nous que ce n’est pas mortel, nous vous en supplions, rassurez nous. Et cette folie qui nous entoure, dites nous qu’elle ne nous atteindra jamais. Cette maladie qui ronge les âmes, promettez nous qu’elle ne nous rattrapera pas. Cela serait trop laid.

Absence. Suivre le bon sens, s’en aller ailleurs, là où se crée, sans pleurs ni heurs, la possibilité d’une existence.

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