01-10-2008, 09:37 PM
jeudi 10 janvier 2008
Paris (toujours)
Premier entretien avec le psychiatre.
Mr Heifetz tout de suite nous a dégoûtées. Traits mous, regard morne, voix monocorde. Ne pas monter au créneau, cet homme transpirait de médiocrité.
« Vous pouvez nous laisser mademoiselle ». Il a jeté un coup d’oeil insistant sur le ravissant fessier de son assistante.
*le stranguler avec son stéthoscope*
« Bonjour à vous. Votre cas m’a posé problème… je ne vois rien dans votre dossier. Ni résumé, ni fiches médicales, ni anamnèse, pas de nom, de civilité. On nous a juste
envoyé un signalement. Le fait que vous vous soyez débattue a légitimé notre intervention. J’espère que vous nous comprendrez... Vous vous appelez ?.. »
Lilith monsieur.
« Docteur, s’il vous plait. » air professoral et prétentieux. « Lilith ? Un prénom peu anodin… Nom de famille ? » Confusion, il ne savait rien. Pour lui, pas d’anges, peut être pas de Paradis. Sans doute vivait-il comme d’autres, dans le petit cercle restreint de ses obscures théories. Nourri de ses fumisteries, il devait s’attendre à des réponses purement rationnelles. Prévoir une issue de secours, improviser sur le tas, tâter le terrain. Si seulement nous nous souvenions du nom de notre incarnation.
*égorger ce gras goret*
Lilith n’est qu’un simple surnom, Docteur,
Don d’une mère dotée de grâce et de douceur
Mais point de nom ni de prénoms,
Dont présentement nous ne nous souvenions.
Son regard s’est illuminé alors (ho, surprise !) d’une lueur étonnée, s’est posé sur nous, nous a jaugé, jugé. Il s’est agité sur sa chaise. « Vous… enfin… vous dites nous… et ces rimes… » Il notait tout sur un grand cahier à spirale, avec un air finalement ravi, excité, et très inspiré. Puis nous a de nouveau lorgnées avec le plus grand intérêt.
Et vous avez devant vous Lilith, Aude et Sarha.
Voyez-vous, pour vous nous sommes toutes là.
Constatez, pas une de plus, pas une de moins
Des questions ? Objections ? that’s the point.
*supplicier cet odieux sagouin*
Par nos prunelles assassines, nous l’avons effrayé.
« Bien… bien, ne vous énervez pas. » Il s’est retourné pour vérifier que devant la porte vitrée se tenait bien le gorille chargé de la sécurité.
« Nous vous avons donné des médicaments à votre arrivée. Les prenez-vous ? »
Comment pourrions-nous faire autrement ?
Il ne se passe pas une heure, pas un instant
Sans que dans notre cellule s’invitent vos alliés
S’assurant que vos drogues nous ont bel et bien liées.
« Un sentiment d’enfermement ? »
Logique, Docteur, nous sommes enfermées.
« C’est pour votre bien assurément. »
Vous voulez notre bien ? Rendez nous la liberté.
« Mais vous verrez mademoiselle. En sortant, vous nous remercierez. En attendant, nous comprenons.»
*crever ce sombre crétin*
Comprendre quoi ? Si seulement tu pouvais comprendre. Mais, tu serais bien incapable, par l’affection, d’adhérer à la préoccupation d’un être…
Puis nous avons abandonné. Il n’y avait rien à attendre de ce malheureux. Les sujets se sont succédés. Famille ? Amis ? Aude ? Sarha ? Impulsions ? Suicide ? Ironie du sort, un ange suicidé. Si seulement c’était possible.
Pleurez chers anges, que nulle mort ne vous venge. Etrange, ce médecin par l’autolyse était fasciné.
Peu à peu, la rage est retombée. Et la tristesse s’est installée. Ecrire sur ces feuilles volantes ne voile pas nos peines. On ne rédige pas une larme. On la laisse, coulante,
rejoindre l’éternité de nos rêves mouillés.
L’homme a continué, écrivant frénétiquement nos réponses lasses. Avec des mots enlacés, nous avons du décrire des tâches d’encre imprimées sur papier cartonné. En rimes embrassées, nous avons citées, embarrassées, des nains décapités, un ange bicéphale, le Cap de Bonne Espérance, un scarabée (là, nos avis ont divergés. Aude nous soufflait chrysalide, et Sarha penchait pour une géniale vision due à une ingestion de champignons). Nous avions envie de fumer, de remplir notre tête de volutes bleutées. Mais le gros homme nous l’a interdit.
En nous laissant, il a lancé d'un air satisfait : « Un médecin va vous soigner. Au revoir mademoiselle. » Soigner qui ? Soigner quoi ? Nous ne sommes pas malades...
Non Docteur, décidément, vous n’avez rien compris. Nous sommes tout à fait saines d’esprit. Seul notre cœur est gangréné de tristesse. Il est poisseux d’incertitudes. Il vient de perdre cette partie divine en lui qui était source de soleil.
Les filles sont calmes, complètement camées.
Et nous pleurons. Puisqu’il y a tant à pleurer…
Paris (toujours)
Premier entretien avec le psychiatre.
Mr Heifetz tout de suite nous a dégoûtées. Traits mous, regard morne, voix monocorde. Ne pas monter au créneau, cet homme transpirait de médiocrité.
« Vous pouvez nous laisser mademoiselle ». Il a jeté un coup d’oeil insistant sur le ravissant fessier de son assistante.
*le stranguler avec son stéthoscope*
« Bonjour à vous. Votre cas m’a posé problème… je ne vois rien dans votre dossier. Ni résumé, ni fiches médicales, ni anamnèse, pas de nom, de civilité. On nous a juste
envoyé un signalement. Le fait que vous vous soyez débattue a légitimé notre intervention. J’espère que vous nous comprendrez... Vous vous appelez ?.. »
Lilith monsieur.
« Docteur, s’il vous plait. » air professoral et prétentieux. « Lilith ? Un prénom peu anodin… Nom de famille ? » Confusion, il ne savait rien. Pour lui, pas d’anges, peut être pas de Paradis. Sans doute vivait-il comme d’autres, dans le petit cercle restreint de ses obscures théories. Nourri de ses fumisteries, il devait s’attendre à des réponses purement rationnelles. Prévoir une issue de secours, improviser sur le tas, tâter le terrain. Si seulement nous nous souvenions du nom de notre incarnation.
*égorger ce gras goret*
Lilith n’est qu’un simple surnom, Docteur,
Don d’une mère dotée de grâce et de douceur
Mais point de nom ni de prénoms,
Dont présentement nous ne nous souvenions.
Son regard s’est illuminé alors (ho, surprise !) d’une lueur étonnée, s’est posé sur nous, nous a jaugé, jugé. Il s’est agité sur sa chaise. « Vous… enfin… vous dites nous… et ces rimes… » Il notait tout sur un grand cahier à spirale, avec un air finalement ravi, excité, et très inspiré. Puis nous a de nouveau lorgnées avec le plus grand intérêt.
Et vous avez devant vous Lilith, Aude et Sarha.
Voyez-vous, pour vous nous sommes toutes là.
Constatez, pas une de plus, pas une de moins
Des questions ? Objections ? that’s the point.
*supplicier cet odieux sagouin*
Par nos prunelles assassines, nous l’avons effrayé.
« Bien… bien, ne vous énervez pas. » Il s’est retourné pour vérifier que devant la porte vitrée se tenait bien le gorille chargé de la sécurité.
« Nous vous avons donné des médicaments à votre arrivée. Les prenez-vous ? »
Comment pourrions-nous faire autrement ?
Il ne se passe pas une heure, pas un instant
Sans que dans notre cellule s’invitent vos alliés
S’assurant que vos drogues nous ont bel et bien liées.
« Un sentiment d’enfermement ? »
Logique, Docteur, nous sommes enfermées.
« C’est pour votre bien assurément. »
Vous voulez notre bien ? Rendez nous la liberté.
« Mais vous verrez mademoiselle. En sortant, vous nous remercierez. En attendant, nous comprenons.»
*crever ce sombre crétin*
Comprendre quoi ? Si seulement tu pouvais comprendre. Mais, tu serais bien incapable, par l’affection, d’adhérer à la préoccupation d’un être…
Puis nous avons abandonné. Il n’y avait rien à attendre de ce malheureux. Les sujets se sont succédés. Famille ? Amis ? Aude ? Sarha ? Impulsions ? Suicide ? Ironie du sort, un ange suicidé. Si seulement c’était possible.
Pleurez chers anges, que nulle mort ne vous venge. Etrange, ce médecin par l’autolyse était fasciné.
Peu à peu, la rage est retombée. Et la tristesse s’est installée. Ecrire sur ces feuilles volantes ne voile pas nos peines. On ne rédige pas une larme. On la laisse, coulante,
rejoindre l’éternité de nos rêves mouillés.
L’homme a continué, écrivant frénétiquement nos réponses lasses. Avec des mots enlacés, nous avons du décrire des tâches d’encre imprimées sur papier cartonné. En rimes embrassées, nous avons citées, embarrassées, des nains décapités, un ange bicéphale, le Cap de Bonne Espérance, un scarabée (là, nos avis ont divergés. Aude nous soufflait chrysalide, et Sarha penchait pour une géniale vision due à une ingestion de champignons). Nous avions envie de fumer, de remplir notre tête de volutes bleutées. Mais le gros homme nous l’a interdit.
En nous laissant, il a lancé d'un air satisfait : « Un médecin va vous soigner. Au revoir mademoiselle. » Soigner qui ? Soigner quoi ? Nous ne sommes pas malades...
Non Docteur, décidément, vous n’avez rien compris. Nous sommes tout à fait saines d’esprit. Seul notre cœur est gangréné de tristesse. Il est poisseux d’incertitudes. Il vient de perdre cette partie divine en lui qui était source de soleil.
Les filles sont calmes, complètement camées.
Et nous pleurons. Puisqu’il y a tant à pleurer…