02-27-2007, 06:18 PM
A heap of broken images, where the sun beats,
And the dead tree gives no shelter, the cricket no relief,
And the dry stone no sound of water. Only
There is a shadow under this red rock,
(Come in under the shadow of this red rock),
And I will show you in the morning striding behind you
Our shadow at evening rising to meet you ;
I will show you fear in a handful of dust
T. S. Eliot
The Waste Land
Chapitre VIII : the Waste Lands
La Buick Lesabre filait sur l'asphalte brulant de la nationale 15, soulevant derriere elle la poussiere suffocante du Nevada.
Malgré la vitesse excessive, l'habitacle était chauffé a blanc et la conductrice suait a grosses gouttes, son débardeur trempé mettant ses formes torturées en valeur (si l'on veut).
Elle appréciait néanmoins pleinement son fix de tout a l'heure, dont les effets commencaient a se faire sentir sérieusement...
Jetant régulierement un oeil au long poignard logé sous le volant (au cas ou) une biere tiede calée entre ses cuisses, elle conduisait d'une main, battant la mesure de l'autre contre la portiere, n'interrompant le tempo d'Echoes de Pink Floyd que le temps de saisir sa cigarette pour en faire voler les cendres, ou tenter de décoller le tissu gluant de sa poitrine moite.
Le passager ne pouvait guere profiter du spectacle, étant aveugle, et il se contentait de fixer le néant de leur traversée du desert de ses yeux morts, méditant.
Malgré la chaleur le grand noir était vetu intégralement de noir (justement, tiens), mais ne semblait pas gené outre-mesure.
Ils étaient partis dans la matinée de L.A., direction Salt Lake City. Le Big Boss avait recu un telex, et c'avait été la fin des vacances.
En une heure, ils étaient partis.
Ils approchaient de la frontiere de l'Utah, lorsqu'elle apercu que le reservoir était dans le rouge.
"On va devoir s’arreter, Baron. J’ai cru voir il y a quelques kilometres un panneau de station service."
Le géant noir ne répondit rien.
***********************
Vingt minutes plus tard en effet, la silhouette floue d’un boui-boui miteux apparut dans les vagues de chaleur qui dansaient sur la route craquelée.
La buick dérapa en fauchant les graviers, et s’arreta dans un nuage de poussiere pres des pompes.
La portiere s’ouvrit, laissant le galbe d’une jambe chaussée de hautes bottines de cuir se dessiner dans l’encadrure, puis un talon arborant un éperon scintillant venant s’écraser a deux centimetres d’un petit scorpion.
La sueur ruisselait sur ses longues cuisses, vetues d’un court short en jean.
Sans y preter attention, Arachnée sortit une nouvelle cigarette et l’alluma, plissant les yeux pour se protéger du soleil et du vent de poussiere omniprésent.
En saisissant sur le tableau de bord ses lunettes de soleil, elle entendit son passager ricaner, et murmurer pour lui-meme.
"He he he… Ce serait vraiment un curieux hasard…"
Ne pretant pas plus d’attention que cela aux curieuses habitudes de son encombrant chaperon, la démone claqua la portiere et fit le tour du véhicule d’un pas fatigué, enfilant un gant pour ne pas se bruler sur l’acier chauffé a blanc des pompes hors d’age..
Seul le crissement d’un panneau suspendu aux couleurs d’une marque d’huile pour moteur ancestrale et le sifflement du vent entre les toles et les carcasses de voitures éparses venaient rompre le silence.
La pompe cracha, ronronna et finit par vibrer en cadence alors que les dollars s’egrennaient sur le compteur. Une fois le plein fait, la démone jeta sa clope d’une chiquenaude et s’approcha de la fenetre du passager.
"Donnez moi un peu de pognon que j’aille… Ben merde."
Le siege était vide.
"J’aime pas quand vous faites des trucs comme ca…"
La démone saisit son sac, et se dirigea d’un pas peu assuré vers l’entrée de la station.
Elle ouvrit la porte, provoquant un glink ! en pénetrant dans le magasin. Ca puait la merde et la transpiration.
Sur les trois rayons pourris de la boutique, des magasines de cul, des bidons d’huile et des cartes routieres apparement obsoletes étaient maladroitement disposés.
Des toiles d’araignée ondulaient faiblement au rythme du ventilateur brassant de l’air chaud au plafond, dans la semi-obscurité de la baraque. Les bandes de lumiere filtrant a travers les stores défoncés tranchaient dans la poussiere en suspension.
Arachnée s’approcha de la caisse d’un pas lent, ses lourds éperons résonnant a chaque foulée.
"Un plein", dit-elle sobrement a l’ombre avachie derriere le comptoir.
Avec la lenteur d’une tortue anémique, cette derniere se laissa tomber en avant, faisant apparaitre a la lumiere un visage buriné et crasseux, dégarni et a la barbe hirsute.
L’oeil torve du patron des lieux dégoulina sur la plastique de la démone. Pour toute réponse, il cracha une chique brunatre dans un seau situé a sa droite. Lequel avait l’air bien rempli déja.
Il exhiba une rangée anarchique de dents jaunatres, se racla la gorge dans un bruit d’évier, et s’appretait a ouvrir la bouche lorsqu’il s’arreta dans son élan, tétanisé.
Arachnée eut un mouvement de recul, voyant l’homme blemir, la levre inferieure tremblante.
"Non… Non, pas lui… Par pitié Seigneur Vigo… Ce… C’est pas moi… C’est pa… AAAAAAAAAAAAH"
L’homme se prit la tete a deux mains et roula au sol en hurlant. Il se contorsionnait en bavant, donnant de grand coups de pieds dans les étageres situées derriere la caisse, renversant des bouteilles d’alcool et des bieres frelatées.
"AAAAAAAAH !! AAAAAAAAAAHH !! NON ! ARRETEEEEEEEAAAAAAAAAAAAHHHHHHH !!"
Son corps en proie visiblement a d’affreux tourments se cabra en une ultime secousse, avant de retomber inerte sur le sol jonché de bris de verres et de mégots de cigarettes.
Avec d’infinies précautions, Arachnée se pencha par dessus la planche faisant office de comptoir de l’établissement. L’homme était visiblement inconscient, les yeux clos, et pour autant qu’elle puisse en juger malgré la pénombre, sans respir…. SHLAK !
A la vitesse de l’éclair, l’homme se redressa en écarquillant les yeux, projetant une langue démesurée qui vint s’enrouler autour du cou de la jeunne femme comme un fouet. En une autre fraction de seconde, il était sur ses pieds, et d’un violent mouvement en arriere faisaitt basculer la démone par dessus le comptoir.
Il hurlait de tout ses poumons ce qui ressemblait a des menaces, mais bouche grande ouverte et langue tirée il était incompréhensible. D’un geste, il se saisit d’un lourd objet caché sous la table, et Arachnée découvrit avec horreur qu’il s’agissait d’une tronçonneuse, que l’homme au regard globuleux et a la langue pendante commencait a mettre en route.
Braaaaaaaabrbr brbr brbr !
"HALOPE ! Hu ha y pahher auhi !"
Braaaaaaaabrbr brbr brbr !
"Harhirai has heul huhain hon !"
Braaaaaaaabrbr brbr brbr !
"Huhain hu ha harher hale bahine he merhe !!"
Braaaaaaaabrbr brbr Brrrra BRRRABRAAAAAARRRRAAARAAAAAAAA !
"BWAAAAAAHAHAHAHAHA !!"
Tenant la tronconneuse d’une main, Arachnée de l’autre (il rétracta sa langue au passage dans un 'schllurp'‘ assez dégueu) l’homme commença a faire le tour du comptoir pour se diriger vers la sortie. Il laissait la chaine lancée a plusieurs milliers de tours/minute a moins de 5 cm de la carotide de la démone.
"Et maintenant FILS DE PUTE DE TA MERE ! On peut discuter ! Apparait enculé de mother fucker ou j’éclate ta collegue !"
Le regard fou, tournoyant dans tous les sens, l’homme poussa Arachnée vers la sortie, sans manquer de lui faire partager son haleine fétide.
"A la bagnole, vite !"
Il franchissait la porte, son otage devant lui, lorsqu’il s’arreta stupéfait. Une bonne trentaine de centimetres d’acier en fusion lui sortait du ventre.
Dans son dos, il entendit le ricanement de Vigo.
"He he he… Comme nous nous retrouvons…"
Le Baron retira sa lame, Warhole l’épée millénaire maudite et buveuse de sang, dégats triple contre les rénégats et les bébés chats, et la renvoya sur un autre plan.
"Je… n’ai… rien a vous dire…" articula l’homme, luttant visiblement contre une crise de paralysie galopante. Ses chairs cramoisies et fumantes dégageaient une méchante odeur de cuir bouilli.
"Je le sais bien, mon brave. J’ai appris tout ce que j’avais a savoir dans les méandres de votre cerveau tourmenté. Ceci dit, je vais quand meme vous torturer a mort…"
Le Baron jeta machinalement un coup d’oeil dehors, tourna le petit panneau fixé a la porte sur "Closed" et traina l’infortuné a l’interieur.
*******************************
Assise sur le capot enfin refroidi de la buick, Arachnée fumait en silence, goutant la fraicheur de la nuit.
Cela faisait bientot six heures que les cris et les pleurs retentissaient.
And the dead tree gives no shelter, the cricket no relief,
And the dry stone no sound of water. Only
There is a shadow under this red rock,
(Come in under the shadow of this red rock),
And I will show you in the morning striding behind you
Our shadow at evening rising to meet you ;
I will show you fear in a handful of dust
T. S. Eliot
The Waste Land
Chapitre VIII : the Waste Lands
La Buick Lesabre filait sur l'asphalte brulant de la nationale 15, soulevant derriere elle la poussiere suffocante du Nevada.
Malgré la vitesse excessive, l'habitacle était chauffé a blanc et la conductrice suait a grosses gouttes, son débardeur trempé mettant ses formes torturées en valeur (si l'on veut).
Elle appréciait néanmoins pleinement son fix de tout a l'heure, dont les effets commencaient a se faire sentir sérieusement...
Jetant régulierement un oeil au long poignard logé sous le volant (au cas ou) une biere tiede calée entre ses cuisses, elle conduisait d'une main, battant la mesure de l'autre contre la portiere, n'interrompant le tempo d'Echoes de Pink Floyd que le temps de saisir sa cigarette pour en faire voler les cendres, ou tenter de décoller le tissu gluant de sa poitrine moite.
Le passager ne pouvait guere profiter du spectacle, étant aveugle, et il se contentait de fixer le néant de leur traversée du desert de ses yeux morts, méditant.
Malgré la chaleur le grand noir était vetu intégralement de noir (justement, tiens), mais ne semblait pas gené outre-mesure.
Ils étaient partis dans la matinée de L.A., direction Salt Lake City. Le Big Boss avait recu un telex, et c'avait été la fin des vacances.
En une heure, ils étaient partis.
Ils approchaient de la frontiere de l'Utah, lorsqu'elle apercu que le reservoir était dans le rouge.
"On va devoir s’arreter, Baron. J’ai cru voir il y a quelques kilometres un panneau de station service."
Le géant noir ne répondit rien.
***********************
Vingt minutes plus tard en effet, la silhouette floue d’un boui-boui miteux apparut dans les vagues de chaleur qui dansaient sur la route craquelée.
La buick dérapa en fauchant les graviers, et s’arreta dans un nuage de poussiere pres des pompes.
La portiere s’ouvrit, laissant le galbe d’une jambe chaussée de hautes bottines de cuir se dessiner dans l’encadrure, puis un talon arborant un éperon scintillant venant s’écraser a deux centimetres d’un petit scorpion.
La sueur ruisselait sur ses longues cuisses, vetues d’un court short en jean.
Sans y preter attention, Arachnée sortit une nouvelle cigarette et l’alluma, plissant les yeux pour se protéger du soleil et du vent de poussiere omniprésent.
En saisissant sur le tableau de bord ses lunettes de soleil, elle entendit son passager ricaner, et murmurer pour lui-meme.
"He he he… Ce serait vraiment un curieux hasard…"
Ne pretant pas plus d’attention que cela aux curieuses habitudes de son encombrant chaperon, la démone claqua la portiere et fit le tour du véhicule d’un pas fatigué, enfilant un gant pour ne pas se bruler sur l’acier chauffé a blanc des pompes hors d’age..
Seul le crissement d’un panneau suspendu aux couleurs d’une marque d’huile pour moteur ancestrale et le sifflement du vent entre les toles et les carcasses de voitures éparses venaient rompre le silence.
La pompe cracha, ronronna et finit par vibrer en cadence alors que les dollars s’egrennaient sur le compteur. Une fois le plein fait, la démone jeta sa clope d’une chiquenaude et s’approcha de la fenetre du passager.
"Donnez moi un peu de pognon que j’aille… Ben merde."
Le siege était vide.
"J’aime pas quand vous faites des trucs comme ca…"
La démone saisit son sac, et se dirigea d’un pas peu assuré vers l’entrée de la station.
Elle ouvrit la porte, provoquant un glink ! en pénetrant dans le magasin. Ca puait la merde et la transpiration.
Sur les trois rayons pourris de la boutique, des magasines de cul, des bidons d’huile et des cartes routieres apparement obsoletes étaient maladroitement disposés.
Des toiles d’araignée ondulaient faiblement au rythme du ventilateur brassant de l’air chaud au plafond, dans la semi-obscurité de la baraque. Les bandes de lumiere filtrant a travers les stores défoncés tranchaient dans la poussiere en suspension.
Arachnée s’approcha de la caisse d’un pas lent, ses lourds éperons résonnant a chaque foulée.
"Un plein", dit-elle sobrement a l’ombre avachie derriere le comptoir.
Avec la lenteur d’une tortue anémique, cette derniere se laissa tomber en avant, faisant apparaitre a la lumiere un visage buriné et crasseux, dégarni et a la barbe hirsute.
L’oeil torve du patron des lieux dégoulina sur la plastique de la démone. Pour toute réponse, il cracha une chique brunatre dans un seau situé a sa droite. Lequel avait l’air bien rempli déja.
Il exhiba une rangée anarchique de dents jaunatres, se racla la gorge dans un bruit d’évier, et s’appretait a ouvrir la bouche lorsqu’il s’arreta dans son élan, tétanisé.
Arachnée eut un mouvement de recul, voyant l’homme blemir, la levre inferieure tremblante.
"Non… Non, pas lui… Par pitié Seigneur Vigo… Ce… C’est pas moi… C’est pa… AAAAAAAAAAAAH"
L’homme se prit la tete a deux mains et roula au sol en hurlant. Il se contorsionnait en bavant, donnant de grand coups de pieds dans les étageres situées derriere la caisse, renversant des bouteilles d’alcool et des bieres frelatées.
"AAAAAAAAH !! AAAAAAAAAAHH !! NON ! ARRETEEEEEEEAAAAAAAAAAAAHHHHHHH !!"
Son corps en proie visiblement a d’affreux tourments se cabra en une ultime secousse, avant de retomber inerte sur le sol jonché de bris de verres et de mégots de cigarettes.
Avec d’infinies précautions, Arachnée se pencha par dessus la planche faisant office de comptoir de l’établissement. L’homme était visiblement inconscient, les yeux clos, et pour autant qu’elle puisse en juger malgré la pénombre, sans respir…. SHLAK !
A la vitesse de l’éclair, l’homme se redressa en écarquillant les yeux, projetant une langue démesurée qui vint s’enrouler autour du cou de la jeunne femme comme un fouet. En une autre fraction de seconde, il était sur ses pieds, et d’un violent mouvement en arriere faisaitt basculer la démone par dessus le comptoir.
Il hurlait de tout ses poumons ce qui ressemblait a des menaces, mais bouche grande ouverte et langue tirée il était incompréhensible. D’un geste, il se saisit d’un lourd objet caché sous la table, et Arachnée découvrit avec horreur qu’il s’agissait d’une tronçonneuse, que l’homme au regard globuleux et a la langue pendante commencait a mettre en route.
Braaaaaaaabrbr brbr brbr !
"HALOPE ! Hu ha y pahher auhi !"
Braaaaaaaabrbr brbr brbr !
"Harhirai has heul huhain hon !"
Braaaaaaaabrbr brbr brbr !
"Huhain hu ha harher hale bahine he merhe !!"
Braaaaaaaabrbr brbr Brrrra BRRRABRAAAAAARRRRAAARAAAAAAAA !
"BWAAAAAAHAHAHAHAHA !!"
Tenant la tronconneuse d’une main, Arachnée de l’autre (il rétracta sa langue au passage dans un 'schllurp'‘ assez dégueu) l’homme commença a faire le tour du comptoir pour se diriger vers la sortie. Il laissait la chaine lancée a plusieurs milliers de tours/minute a moins de 5 cm de la carotide de la démone.
"Et maintenant FILS DE PUTE DE TA MERE ! On peut discuter ! Apparait enculé de mother fucker ou j’éclate ta collegue !"
Le regard fou, tournoyant dans tous les sens, l’homme poussa Arachnée vers la sortie, sans manquer de lui faire partager son haleine fétide.
"A la bagnole, vite !"
Il franchissait la porte, son otage devant lui, lorsqu’il s’arreta stupéfait. Une bonne trentaine de centimetres d’acier en fusion lui sortait du ventre.
Dans son dos, il entendit le ricanement de Vigo.
"He he he… Comme nous nous retrouvons…"
Le Baron retira sa lame, Warhole l’épée millénaire maudite et buveuse de sang, dégats triple contre les rénégats et les bébés chats, et la renvoya sur un autre plan.
"Je… n’ai… rien a vous dire…" articula l’homme, luttant visiblement contre une crise de paralysie galopante. Ses chairs cramoisies et fumantes dégageaient une méchante odeur de cuir bouilli.
"Je le sais bien, mon brave. J’ai appris tout ce que j’avais a savoir dans les méandres de votre cerveau tourmenté. Ceci dit, je vais quand meme vous torturer a mort…"
Le Baron jeta machinalement un coup d’oeil dehors, tourna le petit panneau fixé a la porte sur "Closed" et traina l’infortuné a l’interieur.
*******************************
Assise sur le capot enfin refroidi de la buick, Arachnée fumait en silence, goutant la fraicheur de la nuit.
Cela faisait bientot six heures que les cris et les pleurs retentissaient.