12-27-2006, 03:58 PM
1. The first rule of Fight Club is, you do not talk about Fight Club.
2. The second rule of Fight Club is, you DO NOT talk about Fight Club.
3. If someone says stop, goes limp, taps out, the fight is over.
4. Two guys to a fight.
5. One fight at a time.
6. No shirts, no shoes.
7. Fights will go on as long as they have to.
8. If this is your first night at Fight Club… you have to fight.
Tyler Durden
Chapitre VII : Fight Club
A ce stade du récit, il convient de préciser un peu l’apparence de notre héros.
Malback en ce temps la était incarné dans le corps de Nino, un Rom Kalderach originaire de Poprat en Tchécoslovaquie.
Il avait du fuir l’Europe de l’Est apres un quintuple meurtre : une bande de skins nihilistes néo-nazis avait cru malin de s’attaquer a un rom seul et bourré, sans savoir qu’il s’agissait de Malback tout juste incarné et encore sous le choc du transfert.
La police locale recherchait encore le „tueur a la faux“ responsable de cette boucherie.
La peau basanée par le soleil, un visage taillé au couteau, une cicatrice parcourant son arcade sourciliere droite, les cheveux gominés (en brosse dessus, longs derriere, années 80 power) et une lourde boucle d’oreille en or pendant a son oreille droite lui donnaient un air assez peu avenant, au final.
C’est en se faisant passer pour un portoricain qu’il prit un ticket de bus Greyhound en direction de Detroit. Une legere valise de cuir a la main, il attendait le bus sur le quai, dans la douceur de cette fin de journée d’été.
Apres avoir dévisagé les autres passagers, des familles ou des travailleurs de retour pour le week-end, il écrasa son mégot au moment ou le bus s’arretait dans un crissement devant lui.
Il ne pensait pas avoir été suivi, a priori personne ne connaissait sa destination, il pouvait donc se relaxer ; il s’accorda ½ heure de sommeil dans la nuit a venir.
****************************
Les stations s’enchainerent pendant la nuit : Hartford, Syracuse, Buffalo, Cleveland, Toledo et enfin Detroit, Michigan.
La ville, entamant sa conversion en vestige de l’industrie frénétique des glorieuses années de la production automobile, se napait dans la paleur de ce matin frele d’un voile post-apocalyptique tout a fait ravissant.
Une fois seul sur le quai desert, sans ressentir le moins du monde la fraicheur environnante, Malback se dirigea vers une cabine téléphonique, sortit un papier de sa poche, fit gober un quarter a la machine et composa un numéro.
Il achevait sa clope et s’appretait a l’écraser du talon de sa santiag lorsque la chevrolet 59 Impala apparu a l’autre bout du parking.
Elle se gara a quelques metres, laissant admirer la rouille envahissant la carosserie d’une couleur indéfinissable, et un monstre en descendit au prix de pénibles efforts.
Un monstrueux rasta, frolant les 2,20m pour pas loin de 150 kilos, la barbe tressée et des dreadlocks comme une araignée cauchemardesque sur la tete, le fixait de ses yeux noyés entre les replis de chair des orbites. Il grogna, faisant tressauter son nez porcin.
- „Héyo, hommie !"
- „Hi Dude."
Les deux hommes se serrerent dans les bras, enchainant leur accolade par un shake-hand complexe digne des plus grands gangstas.
- „Ca fait une putain de paie, hein, enculeur de maman.“*
- „Tu l’as dit comme ca, enculeur de maman de bouffi“
- „Ouais mec. Je te conduis dans ma putain de maison ou tu veux visiter cette putain de ville, partenaire ?“
- „Vois, mec : est-ce que tu vois un putain d’appareil-photo attaché a une sangle autour de mon putain de cou, mec ? Je suis pas un putain d’enculeur de maman de touriste, frere.“
- „D’accord, frere. Laissons aller dans ma place, mon antre trop classe yé yé - Snap Snoopie Badd Dogg est dans la place, il te met une balle dans la face han han, heyo baby baise moi toute la nuit han han“
La voiture accelera tandis que Badd Dogg commencait a raper dans son style si particulier, et s’engagea sur l’avenue dans un crissement de pneu (en amérique le moindre virage est source de crissement de pneu).
Ils arriverent 45 minutes plus tard dans un genre de campement de mobil-homes anarchique.
La chevrolet s’arreta (dans un crissement de pneus, donc) en face d’une des caravanes, et Badd Dogg coupa le contact.
- „Maison, putain de douce maison…“
En sortant, Malback croisa le regard curieux d’un jeune homme de 15 ans a tout péter, plutot malingre et blond comme les blés.
- „Heyo Monster ! Comment c’va ?“
- „Heyo Marshall. Putain de bien mec. Prend soin“.
Le gosse sourit au monstre rasta.
- „Monster !“
Une femme paraissant beaucoup trop vieille pour son age probable, vetue d’un chale rose, sortit en titubant du mobil-homme voisin. Les cheveux blonds délavés, un maquillage de pute aveugle, et la marque des ans et de la misere sociale gravés comme autant de rides sur son visage.
- „Marshall ! A la maison. Monster, vous n’auriez pas un peu de Subutex ? J’ai fini ma derniere boite…“
- „Sur M’ame Matters. Donnez moi quelques minutes je passe vous voir.“
Les deux démons rentrerent dans la caravane. Badd Dogg expliquait en meme temps que la vieille peau d’a coté était une de ses créations : une jeune mere brisée par la vie, rendue dépendante a la coke puis en desintox permanente, gavée d’anti-depresseurs et dont le fils avait toutes les dispositions du ‚problem child‘.
Sur le canapé miteux dans le „salon“ du camping, deux nanas completement défoncées dodelinaient de la tete en bavant.
- „Cassez-vous, salopes ! Allez dégagez et aller faire votre coma plus loin !“
Le démon de Shaytan les poussa tant bien que mal dehors, et claqua la porte.
- „Sers toi un verre pendant que je vais filer ses pilules a la mere Matters. Pendant que j’y pense, elle suce pour 20 dollars, heeeehehehe. En plus c’est que du bonheur : elle a les dents qui branlent a cause des acides qu’elle gobait y’a 5 ans ! Heeeeeeeee hehehe eeeeeeheheheeeeeeeee…“
Le gros porc s’éloigna en rigolant betement.
Malback ecarta les seringues qui trainaient sur la table et se servit un sky – enfin bu a la bouteille, y’avait pas de verres.
Badd Dogg revint quelques minutes plus tard.
- „Hey mec, en venant ici ce matin j’ai vu une cadillac blanche nous suivre. La elle vient de repasser sous la voie de chemin de fer derriere le dépotoir. T’es pas suivi j’espere…“
- „Nan mec. Je suis un peu un professionnel je te rapelle. Bon tu deviens quoi ?“
Les deux démons converserent longuement, entrecoupant les récits romancés de leurs aventures respectives de rails de coke, de whisky bas de gamme et de gros joints énormes.
Il fut convenu que le soir, ils se rendraient dans un club underground de Detroit tenu par un Andréalphus a la retraite (l’Administration l’avait envoyé dans le corps d’un homme décédé durant son opération d’ablation des testicules) ou des rap-battles se déroulaient régulierement, et parfois y’avait meme une vraie baston. C’était blindé de minettes pretes a se laisser enfiler comme des perles et la came circulait a outrance.
Une soirée sympa quoi.
********************************
Le soir venu, ils prirent la direction du club, sobrement appelé „the Vault“, et Badd Dogg lanca a Malback :
- „La cadillac blanche est juste derriere nous, Hommie. Le conducteur est un blanc du genre armoire a glace apparement.“
- „Fuck. On continue, on avisera pendant la soirée, s’il est toujours la.“
Ils arriverent sur place une vingtaine de minutes plus tard, suivis a distance respectable par la cadillac. Pas moyen de se tromper : une horde de jeunes noirs, habillés dans le plus pur style gangsta, discutaient, rappaient, fumaient ou dancaient aux portes du club.
Les deux colosses a l’entrée s’effacerent devant Badd Dogg, qui entraina Malback a sa suite vers les profondeurs enfumées de la cave.
Une lumiere rouge tres vive accentuait les traits et les gestes de la faune locale. Sur une scene au centre, micro a la main, deux mecs se balancaient des rimes au visage, jouant du débit et des attitudes pour enerver l’adversaire. Un DJ plongé dans l’ombre mixait sur une estrade, les énormes baffles situées au quatre coins de la piece staurées par le beat lourd et repetitif.
La foule ondulante, autour, applaudissait a chaque bon mot, ou huait celui dont les attaques étaient faiblardes ou mal placées.
Traversant la foule en poussant tout sur son passage Badd Dogg alias ‚Monster‘ se dirigea vers le bar.
Alors qu’ils devisaient, Badd Dogg poussa Malback du coude. Dans l’encadrure des escaliers, un des gorilles de l’entrée était en train de rouler inconscient.
Pendant que la foule réagissait, un deuxieme corps déboula, la musique s’arretant brusquement au moment ou sa tete émit un bruit inquietant contre le montant du jukebox.
Descendant lentement les escaliers, apparu progressivement une montage de muscles, crane rasé et visage froid. De cuir noir vetu, il plia ses lunettes noires d’une main gantée de noir alors qu’il s’engageait au milieu de la foule de noirs qui s’écartait. Son crane lisse et rasé apparaissait cramoisi dans la lumiere des spots.
Un type essaya de le saisir, mais d’un geste l’homme en noir lui agrippa le bras, le tordit en un craquement sinistre et il se retrouva par terre le poignet brisé. Mouvement de stupeur parmi la foule, qui gronda.
(La scene suivante se déroule dans une lumiere irréelle digne des plus beaux clips de R’n’B sur MTV.)
L’homme s’arreta au milieu du cercle deserté par les rappeurs, tomba sa veste, enleva sa chemise en exhibant ses pectoraux glabres. Il avait une représentation de la vierge tatouée sur son dos musculeux, et une croix gammée sur le pectoral droit.
Il fit craquer ses cervicales et pointa Malback du doigt en faisant flasher une aura de Grade 2 de Daniel.
Malback, apres un instant d’hésitation, reposa son Mojito, repoussa la meuf installée sur ses genoux et se mit torse-nu également, découvrant un torse parcouru de tatouages et de cicatrices.
Badd Dogg lui indiqua discretement le flingue qu’il avait glissé dans le pantalon, en haussant un sourcil, mais Malback secoua la tete négativement.
- „Fucking nazis. I hate those guys…Si il est en passe de gagner, aligne le. Mais pas de plop au milieu des humains.“
Il s’avanca au milieu du cercle en slow motion, faisant flasher son aura de Capitaine de Baal, tandis qu’a nouveau un beat lourd commencait a résonner dans la piece et que la foule reprit son brouhaha.
Les deux adversaires se mirent en garde, la determination se lisait dans leurs yeux.
Ca va pas etre cot…
Le TGV qui arriva dans la tempe de Malback explosa a son oreille comme un baton de dynamite. La vue brouillée instantanement, Malback tituba et manqua de se rétamer sur le billard. Dans un mouvement de balancier, il vit son adversaire caresser sa chevaliere „aigle imperial“ tachée de sang.
Il tenta de se remettre debout lorsqu’un formidable coup de pied dans les cotes le renvoya de l’autre coté de la scene. Les jambes tremblantes, Malback essaya de se remettre sur ses genoux, un filet de bave et de sang s’échapant de sa bouche.
Mais l’autre arriva et lui cogna la tete comme une brute, le reclouant au sol. Il le saisit et l’envoya valser par dessus le billard.
La foule hurla, tandis que le géant leur faisait des doigts d’honneur en souriant d’un air entendu.
De son coté, Malback était pas au mieux de sa forme. Son flanc droit le faisait souffrir et il devait avoir une ou deux cotes pétées.
Il remit de l’ordre dans ses idées et se releva, saisissant au passage la boule blanche située de son coté.
Il la lanca de tous ses 5 points de Force en direction de la tete du Daniel, mais celui-ci esquiva le projectile en mode Néo-style.
La boule vint s’enfoncer dans le mur d’en face, frolant la tete d’un spectateur.
D’une détente de la jambe, Malback fit glisser le billard vers l’ange, le fauchant net.
La montagne de muscle s’écroula sur le tapis vert, et n’eut que le temps d’apercevoir Malback bondissant une queue a la main avant que le baton de bois ne se fracasse sur son visage, imprimant une bande violacée de son oeil a son menton.
L’ange roula sur lui-meme, évitant de justesse la queue brisée aiguisée comme un pieu qui s’enfonca dans le tapis la ou se trouvait sa gorge la demi seconde d’avant, et décocha un uppercut a Malback, touchant ce dernier a la gorge et lui coupant la respiration.
Les deux hommes roulerent a terre et tenterent de s’empoigner mutuellement. Sourd a la musique et aux acclamations de la foule, Malback n’avait dans les oreilles que le bruit du sang qui lui battait les tempes. L’ange tenta de l’étouffer mais il arriva a lui enfoncer ses pouces dans les yeux, puis a se dégager d’un vicieux coup de genou dans les parties intimes du Daniel.
Rampant et essayant de reprendre sa repsiration, Malback décida de profiter de l’aveuglement momentané de son adversaire pour lui envoyer un high-kick de derriere les fagots en pleine poire.
Le Daniel parra le coup de son avant-bras, et Malback eut l’impression de frapper un reverbere ; la douleur irradia son tibia alors que le Daniel faisait disparaitre immédiatement les effets de son membre blindé.
Le démon eut toutes les peines du monde a parer la rafale de coups de poings qui suivirent. Les coups pleuvaient et cet enculé tapait comme un sourd.
La sueur coulait dans les yeux du démon, et c’est de toute facon trop tard qu’il apercut son adversaire fondre sur lui, la merveilleuse mecanique des muscles de l’ange projettant son poing a une vitesse défiant l’imagination.
Le monde devint soudain silencieux et noir pour Malback.
Il se sentit léger, et ne ressentit strictement rien lorsque son corps pulvérisa le flipper et roula au sol.
Il entrouvrit un oeil et des bribes de musique, comme passées au ralenti, vinrent le réveiller. Le son opera un retour a la normale et le démon reprit ses esprits, pour s’apercevoir que l’ange le tenait par le bras et s’appretait a lui donner un lecon particuliere sur le „coup de pied latéral“ rendu celebre par Bruce Lee quelques années plus tot.
Le démon entendit plus qu’il ne sentit le 45 fillette de l’Ange s’enfoncer dans ses cotes et le projeter a travers la porte des chiottes.
Les chiottes.
Tombant, trébuchant, Malback se dirigea vers les toilettes des femmes, au fond du couloir.
L’ange prit la suite, marchant lentement.
Badd Dogg, ayant particulierment suivi le combat, vint se placer dans l’encadrure de la porte, et fit comprendre aux autres spectateurs que le spectacle s’arretait la.
L’ange, suivant les traces de sang sur le sol, petites gouttes écarlates sur les dalles blanches, fit apparaitre une masse d’arme dans sa main ensanglantée.
Les traces se dirigeaient vers la premiere porte des toilettes.
Silencieusement, l’ange leva le bras et l’abbatit de toutes ses forces, détruisant la porte et fracassant le siege de céramique. Vide.
Il se ressaisit et se baissa afin de regarder sous les portes : rien.
Il défonca la deuxieme porte d’un coup de pied. Rien.
Il s’avance vers la troisieme porte, la poussa… rien.
Il fit jaillir son armure corporelle en arrivant devant la derniere porte, et l’enfonca : personne.
A ce moment, une goutte rouge tomba sur son épaule, dans un plic! a peine discernable.
L’ange leva les yeux au plafond juste a temps pour voir les plaques de ce dernier s’effondrer sous le poids d’un Malback toutes griffes dehors.
Le démon se rétama sur le mur de séparation des deux gogueneaux, et tomba dans le bloc mitoyen, se ruinant le genoux sur la chasse d’eau.
Au dessus de sa tete, le mur explosa, laissant passer le bras de l’ange cherchant a l’aggriper. Ce dernier n’avait pas la place de manier sa masse, et Malback saisit sa derniere occasion : il enroula son bras autour de celui de l’ange, le tira violement a lui afin d’écraser sa tete contre la paroi, et de sa main libre plongea ses griffes a travers le contreplaqué dans la tempe gauche du Daniel.
Ce dernier eut un hoquet, bredouilla un truc incompréhensible, vomit un caillot de sang, roula des yeux et plopa.
Un atroce sifflement dans les oreilles, Malback résorba ses griffes, eut vaguement l’impression que Badd Dogg lui disait quelque chose, tituba, puis se laissa tomber dans les tenebres de l’inconscience.
* Les dialogues en langage gangsta ont été traduits pour nos lecteurs anglophobes.
2. The second rule of Fight Club is, you DO NOT talk about Fight Club.
3. If someone says stop, goes limp, taps out, the fight is over.
4. Two guys to a fight.
5. One fight at a time.
6. No shirts, no shoes.
7. Fights will go on as long as they have to.
8. If this is your first night at Fight Club… you have to fight.
Tyler Durden
Chapitre VII : Fight Club
A ce stade du récit, il convient de préciser un peu l’apparence de notre héros.
Malback en ce temps la était incarné dans le corps de Nino, un Rom Kalderach originaire de Poprat en Tchécoslovaquie.
Il avait du fuir l’Europe de l’Est apres un quintuple meurtre : une bande de skins nihilistes néo-nazis avait cru malin de s’attaquer a un rom seul et bourré, sans savoir qu’il s’agissait de Malback tout juste incarné et encore sous le choc du transfert.
La police locale recherchait encore le „tueur a la faux“ responsable de cette boucherie.
La peau basanée par le soleil, un visage taillé au couteau, une cicatrice parcourant son arcade sourciliere droite, les cheveux gominés (en brosse dessus, longs derriere, années 80 power) et une lourde boucle d’oreille en or pendant a son oreille droite lui donnaient un air assez peu avenant, au final.
C’est en se faisant passer pour un portoricain qu’il prit un ticket de bus Greyhound en direction de Detroit. Une legere valise de cuir a la main, il attendait le bus sur le quai, dans la douceur de cette fin de journée d’été.
Apres avoir dévisagé les autres passagers, des familles ou des travailleurs de retour pour le week-end, il écrasa son mégot au moment ou le bus s’arretait dans un crissement devant lui.
Il ne pensait pas avoir été suivi, a priori personne ne connaissait sa destination, il pouvait donc se relaxer ; il s’accorda ½ heure de sommeil dans la nuit a venir.
****************************
Les stations s’enchainerent pendant la nuit : Hartford, Syracuse, Buffalo, Cleveland, Toledo et enfin Detroit, Michigan.
La ville, entamant sa conversion en vestige de l’industrie frénétique des glorieuses années de la production automobile, se napait dans la paleur de ce matin frele d’un voile post-apocalyptique tout a fait ravissant.
Une fois seul sur le quai desert, sans ressentir le moins du monde la fraicheur environnante, Malback se dirigea vers une cabine téléphonique, sortit un papier de sa poche, fit gober un quarter a la machine et composa un numéro.
Il achevait sa clope et s’appretait a l’écraser du talon de sa santiag lorsque la chevrolet 59 Impala apparu a l’autre bout du parking.
Elle se gara a quelques metres, laissant admirer la rouille envahissant la carosserie d’une couleur indéfinissable, et un monstre en descendit au prix de pénibles efforts.
Un monstrueux rasta, frolant les 2,20m pour pas loin de 150 kilos, la barbe tressée et des dreadlocks comme une araignée cauchemardesque sur la tete, le fixait de ses yeux noyés entre les replis de chair des orbites. Il grogna, faisant tressauter son nez porcin.
- „Héyo, hommie !"
- „Hi Dude."
Les deux hommes se serrerent dans les bras, enchainant leur accolade par un shake-hand complexe digne des plus grands gangstas.
- „Ca fait une putain de paie, hein, enculeur de maman.“*
- „Tu l’as dit comme ca, enculeur de maman de bouffi“
- „Ouais mec. Je te conduis dans ma putain de maison ou tu veux visiter cette putain de ville, partenaire ?“
- „Vois, mec : est-ce que tu vois un putain d’appareil-photo attaché a une sangle autour de mon putain de cou, mec ? Je suis pas un putain d’enculeur de maman de touriste, frere.“
- „D’accord, frere. Laissons aller dans ma place, mon antre trop classe yé yé - Snap Snoopie Badd Dogg est dans la place, il te met une balle dans la face han han, heyo baby baise moi toute la nuit han han“
La voiture accelera tandis que Badd Dogg commencait a raper dans son style si particulier, et s’engagea sur l’avenue dans un crissement de pneu (en amérique le moindre virage est source de crissement de pneu).
Ils arriverent 45 minutes plus tard dans un genre de campement de mobil-homes anarchique.
La chevrolet s’arreta (dans un crissement de pneus, donc) en face d’une des caravanes, et Badd Dogg coupa le contact.
- „Maison, putain de douce maison…“
En sortant, Malback croisa le regard curieux d’un jeune homme de 15 ans a tout péter, plutot malingre et blond comme les blés.
- „Heyo Monster ! Comment c’va ?“
- „Heyo Marshall. Putain de bien mec. Prend soin“.
Le gosse sourit au monstre rasta.
- „Monster !“
Une femme paraissant beaucoup trop vieille pour son age probable, vetue d’un chale rose, sortit en titubant du mobil-homme voisin. Les cheveux blonds délavés, un maquillage de pute aveugle, et la marque des ans et de la misere sociale gravés comme autant de rides sur son visage.
- „Marshall ! A la maison. Monster, vous n’auriez pas un peu de Subutex ? J’ai fini ma derniere boite…“
- „Sur M’ame Matters. Donnez moi quelques minutes je passe vous voir.“
Les deux démons rentrerent dans la caravane. Badd Dogg expliquait en meme temps que la vieille peau d’a coté était une de ses créations : une jeune mere brisée par la vie, rendue dépendante a la coke puis en desintox permanente, gavée d’anti-depresseurs et dont le fils avait toutes les dispositions du ‚problem child‘.
Sur le canapé miteux dans le „salon“ du camping, deux nanas completement défoncées dodelinaient de la tete en bavant.
- „Cassez-vous, salopes ! Allez dégagez et aller faire votre coma plus loin !“
Le démon de Shaytan les poussa tant bien que mal dehors, et claqua la porte.
- „Sers toi un verre pendant que je vais filer ses pilules a la mere Matters. Pendant que j’y pense, elle suce pour 20 dollars, heeeehehehe. En plus c’est que du bonheur : elle a les dents qui branlent a cause des acides qu’elle gobait y’a 5 ans ! Heeeeeeeee hehehe eeeeeeheheheeeeeeeee…“
Le gros porc s’éloigna en rigolant betement.
Malback ecarta les seringues qui trainaient sur la table et se servit un sky – enfin bu a la bouteille, y’avait pas de verres.
Badd Dogg revint quelques minutes plus tard.
- „Hey mec, en venant ici ce matin j’ai vu une cadillac blanche nous suivre. La elle vient de repasser sous la voie de chemin de fer derriere le dépotoir. T’es pas suivi j’espere…“
- „Nan mec. Je suis un peu un professionnel je te rapelle. Bon tu deviens quoi ?“
Les deux démons converserent longuement, entrecoupant les récits romancés de leurs aventures respectives de rails de coke, de whisky bas de gamme et de gros joints énormes.
Il fut convenu que le soir, ils se rendraient dans un club underground de Detroit tenu par un Andréalphus a la retraite (l’Administration l’avait envoyé dans le corps d’un homme décédé durant son opération d’ablation des testicules) ou des rap-battles se déroulaient régulierement, et parfois y’avait meme une vraie baston. C’était blindé de minettes pretes a se laisser enfiler comme des perles et la came circulait a outrance.
Une soirée sympa quoi.
********************************
Le soir venu, ils prirent la direction du club, sobrement appelé „the Vault“, et Badd Dogg lanca a Malback :
- „La cadillac blanche est juste derriere nous, Hommie. Le conducteur est un blanc du genre armoire a glace apparement.“
- „Fuck. On continue, on avisera pendant la soirée, s’il est toujours la.“
Ils arriverent sur place une vingtaine de minutes plus tard, suivis a distance respectable par la cadillac. Pas moyen de se tromper : une horde de jeunes noirs, habillés dans le plus pur style gangsta, discutaient, rappaient, fumaient ou dancaient aux portes du club.
Les deux colosses a l’entrée s’effacerent devant Badd Dogg, qui entraina Malback a sa suite vers les profondeurs enfumées de la cave.
Une lumiere rouge tres vive accentuait les traits et les gestes de la faune locale. Sur une scene au centre, micro a la main, deux mecs se balancaient des rimes au visage, jouant du débit et des attitudes pour enerver l’adversaire. Un DJ plongé dans l’ombre mixait sur une estrade, les énormes baffles situées au quatre coins de la piece staurées par le beat lourd et repetitif.
La foule ondulante, autour, applaudissait a chaque bon mot, ou huait celui dont les attaques étaient faiblardes ou mal placées.
Traversant la foule en poussant tout sur son passage Badd Dogg alias ‚Monster‘ se dirigea vers le bar.
Alors qu’ils devisaient, Badd Dogg poussa Malback du coude. Dans l’encadrure des escaliers, un des gorilles de l’entrée était en train de rouler inconscient.
Pendant que la foule réagissait, un deuxieme corps déboula, la musique s’arretant brusquement au moment ou sa tete émit un bruit inquietant contre le montant du jukebox.
Descendant lentement les escaliers, apparu progressivement une montage de muscles, crane rasé et visage froid. De cuir noir vetu, il plia ses lunettes noires d’une main gantée de noir alors qu’il s’engageait au milieu de la foule de noirs qui s’écartait. Son crane lisse et rasé apparaissait cramoisi dans la lumiere des spots.
Un type essaya de le saisir, mais d’un geste l’homme en noir lui agrippa le bras, le tordit en un craquement sinistre et il se retrouva par terre le poignet brisé. Mouvement de stupeur parmi la foule, qui gronda.
(La scene suivante se déroule dans une lumiere irréelle digne des plus beaux clips de R’n’B sur MTV.)
L’homme s’arreta au milieu du cercle deserté par les rappeurs, tomba sa veste, enleva sa chemise en exhibant ses pectoraux glabres. Il avait une représentation de la vierge tatouée sur son dos musculeux, et une croix gammée sur le pectoral droit.
Il fit craquer ses cervicales et pointa Malback du doigt en faisant flasher une aura de Grade 2 de Daniel.
Malback, apres un instant d’hésitation, reposa son Mojito, repoussa la meuf installée sur ses genoux et se mit torse-nu également, découvrant un torse parcouru de tatouages et de cicatrices.
Badd Dogg lui indiqua discretement le flingue qu’il avait glissé dans le pantalon, en haussant un sourcil, mais Malback secoua la tete négativement.
- „Fucking nazis. I hate those guys…Si il est en passe de gagner, aligne le. Mais pas de plop au milieu des humains.“
Il s’avanca au milieu du cercle en slow motion, faisant flasher son aura de Capitaine de Baal, tandis qu’a nouveau un beat lourd commencait a résonner dans la piece et que la foule reprit son brouhaha.
Les deux adversaires se mirent en garde, la determination se lisait dans leurs yeux.
Ca va pas etre cot…
Le TGV qui arriva dans la tempe de Malback explosa a son oreille comme un baton de dynamite. La vue brouillée instantanement, Malback tituba et manqua de se rétamer sur le billard. Dans un mouvement de balancier, il vit son adversaire caresser sa chevaliere „aigle imperial“ tachée de sang.
Il tenta de se remettre debout lorsqu’un formidable coup de pied dans les cotes le renvoya de l’autre coté de la scene. Les jambes tremblantes, Malback essaya de se remettre sur ses genoux, un filet de bave et de sang s’échapant de sa bouche.
Mais l’autre arriva et lui cogna la tete comme une brute, le reclouant au sol. Il le saisit et l’envoya valser par dessus le billard.
La foule hurla, tandis que le géant leur faisait des doigts d’honneur en souriant d’un air entendu.
De son coté, Malback était pas au mieux de sa forme. Son flanc droit le faisait souffrir et il devait avoir une ou deux cotes pétées.
Il remit de l’ordre dans ses idées et se releva, saisissant au passage la boule blanche située de son coté.
Il la lanca de tous ses 5 points de Force en direction de la tete du Daniel, mais celui-ci esquiva le projectile en mode Néo-style.
La boule vint s’enfoncer dans le mur d’en face, frolant la tete d’un spectateur.
D’une détente de la jambe, Malback fit glisser le billard vers l’ange, le fauchant net.
La montagne de muscle s’écroula sur le tapis vert, et n’eut que le temps d’apercevoir Malback bondissant une queue a la main avant que le baton de bois ne se fracasse sur son visage, imprimant une bande violacée de son oeil a son menton.
L’ange roula sur lui-meme, évitant de justesse la queue brisée aiguisée comme un pieu qui s’enfonca dans le tapis la ou se trouvait sa gorge la demi seconde d’avant, et décocha un uppercut a Malback, touchant ce dernier a la gorge et lui coupant la respiration.
Les deux hommes roulerent a terre et tenterent de s’empoigner mutuellement. Sourd a la musique et aux acclamations de la foule, Malback n’avait dans les oreilles que le bruit du sang qui lui battait les tempes. L’ange tenta de l’étouffer mais il arriva a lui enfoncer ses pouces dans les yeux, puis a se dégager d’un vicieux coup de genou dans les parties intimes du Daniel.
Rampant et essayant de reprendre sa repsiration, Malback décida de profiter de l’aveuglement momentané de son adversaire pour lui envoyer un high-kick de derriere les fagots en pleine poire.
Le Daniel parra le coup de son avant-bras, et Malback eut l’impression de frapper un reverbere ; la douleur irradia son tibia alors que le Daniel faisait disparaitre immédiatement les effets de son membre blindé.
Le démon eut toutes les peines du monde a parer la rafale de coups de poings qui suivirent. Les coups pleuvaient et cet enculé tapait comme un sourd.
La sueur coulait dans les yeux du démon, et c’est de toute facon trop tard qu’il apercut son adversaire fondre sur lui, la merveilleuse mecanique des muscles de l’ange projettant son poing a une vitesse défiant l’imagination.
Le monde devint soudain silencieux et noir pour Malback.
Il se sentit léger, et ne ressentit strictement rien lorsque son corps pulvérisa le flipper et roula au sol.
Il entrouvrit un oeil et des bribes de musique, comme passées au ralenti, vinrent le réveiller. Le son opera un retour a la normale et le démon reprit ses esprits, pour s’apercevoir que l’ange le tenait par le bras et s’appretait a lui donner un lecon particuliere sur le „coup de pied latéral“ rendu celebre par Bruce Lee quelques années plus tot.
Le démon entendit plus qu’il ne sentit le 45 fillette de l’Ange s’enfoncer dans ses cotes et le projeter a travers la porte des chiottes.
Les chiottes.
Tombant, trébuchant, Malback se dirigea vers les toilettes des femmes, au fond du couloir.
L’ange prit la suite, marchant lentement.
Badd Dogg, ayant particulierment suivi le combat, vint se placer dans l’encadrure de la porte, et fit comprendre aux autres spectateurs que le spectacle s’arretait la.
L’ange, suivant les traces de sang sur le sol, petites gouttes écarlates sur les dalles blanches, fit apparaitre une masse d’arme dans sa main ensanglantée.
Les traces se dirigeaient vers la premiere porte des toilettes.
Silencieusement, l’ange leva le bras et l’abbatit de toutes ses forces, détruisant la porte et fracassant le siege de céramique. Vide.
Il se ressaisit et se baissa afin de regarder sous les portes : rien.
Il défonca la deuxieme porte d’un coup de pied. Rien.
Il s’avance vers la troisieme porte, la poussa… rien.
Il fit jaillir son armure corporelle en arrivant devant la derniere porte, et l’enfonca : personne.
A ce moment, une goutte rouge tomba sur son épaule, dans un plic! a peine discernable.
L’ange leva les yeux au plafond juste a temps pour voir les plaques de ce dernier s’effondrer sous le poids d’un Malback toutes griffes dehors.
Le démon se rétama sur le mur de séparation des deux gogueneaux, et tomba dans le bloc mitoyen, se ruinant le genoux sur la chasse d’eau.
Au dessus de sa tete, le mur explosa, laissant passer le bras de l’ange cherchant a l’aggriper. Ce dernier n’avait pas la place de manier sa masse, et Malback saisit sa derniere occasion : il enroula son bras autour de celui de l’ange, le tira violement a lui afin d’écraser sa tete contre la paroi, et de sa main libre plongea ses griffes a travers le contreplaqué dans la tempe gauche du Daniel.
Ce dernier eut un hoquet, bredouilla un truc incompréhensible, vomit un caillot de sang, roula des yeux et plopa.
Un atroce sifflement dans les oreilles, Malback résorba ses griffes, eut vaguement l’impression que Badd Dogg lui disait quelque chose, tituba, puis se laissa tomber dans les tenebres de l’inconscience.
* Les dialogues en langage gangsta ont été traduits pour nos lecteurs anglophobes.
Quote:En bonus avec cette Chronique :
La premiere apparition de Badd Dogg
Une lecon de rap, par DJ Badd Dogg