D-Day

[Philibert]

Et en montant au ciel,

Il dira à Saint Pierre:

Oui seigneur, encore un.

C'est de l'enfer que je viens.



Merde alors, qu’est ce qu’il fait chaud ici !
C’est l’heure de pointe dans le métro d’Immac, et Philibert ne s’y sent pas du tout à sa place. Lui préfère les folles chevauchées à dos de grosses cylindrées, un bandana sur le front et des lunettes de soleil collées sur le nez. Mais au lieu de ça il se retrouve compressé entre un sale clodo puant le vomi et un jeune premier dont le mp3 crachote un enchaînement de chansons plus ringardes les unes que les autres.
Et puis cette vieille bique qui n’arrête pas de le fustiger du regard là…

Elle peut continuer de le dévisager comme un malpropre si ça lui chante, il n’en a que faire : premier arrivé, premier servi ! Elle n’aura pas son siège… Qu’elle reste plutôt debout histoire d’épuiser un peu plus vite les maigres forces qui la rattachent encore à la vie, doit sûrement y avoir une place bien plus douillette qui l’attend là-haut.
Œuvrer pour le bien d’autrui tout en restant le cul sur une chaise : du Philibert tout craché.

N’empêche que c’est pas le moment de le faire chier notre bonhomme, il est un chouïa nerveux là tout de suite et…un brin déçu.
Faut dire que quand on lui avait parlé de débarquement il s’était imaginé tout autre chose, des cris, des pleurs, des explosions, ce genre de trucs. Mais non.
Cette guerre ci est sourde et anonyme.

"Les vaches rousses, blanches et noires
Sur lesquelles tombe la pluie… "

Ah ben merci voisin ! Maintenant il aura cette chanson en tête toute la journée…
Heureusement qu’on est bientôt arrivé à destination.
Comment ? Pourquoi ? Ca n’a aucune importance. Aux têtes couronnées de se débrouiller avec leurs cartes et leurs plans ingénieux.
Aujourd’hui, Phil n’est qu’un soldat. A peine plus qu’un bras au bout d’un flingue.
Aujourd’hui, Phil n’est qu’un exécutant parmi tant d’autres.


Place des Terreaux, il est 17h00 et les portes du métro s’ouvrent.
Advienne que pourra.

[Hermary]

In da place

Hermary était serein. Les gens ne l'incommodaient pas, et il se tenait stoique à l'une des barres en métal. Il n'avait pas réagit lorsque une adolescente était venu frapper la vitre en hurlant alors que les portes se refermaient avant qu'elle puisse monter. La rame s'éloignant, il ne restait de la jeune fille qu'une petite silhouette retournant sa fureur à grands coups de pieds ravageurs dans un distributeurs de boissons.

- Heu.. demanda un jeune homme à ses côtés.
- Ce n'est rien. Juste le juge Cromwell qui a raté le métro.
- L'a l'air furax.
- Non. Il est toujours comme ça.

Lazarus haussa les épaules et lança un regard de côté. Plus loin, Saint Cyr, les cheveux blonds coiffés en pétard avec un air morne digne d'un yakusa était occupé à distribuer des tracts au sujet de l'association de bienfaisance que parraine le Centre.

- Dites, boss. S'pas génant l'aura là ?

Hermary, le visage le visage racé et dissimulé derrière une paire de lunettes d'aviateur, considéra l'ange de Laurent autour duquel bouillonnait des ondes d'une violence maîtrisée.

- Dans le cadre d'une mission aussi directe, je ne pense pas que cela pose problème.
- Moé, on est loin du sneaky bitch.
- L'agent Miasme ne vous a pas informé de la phase "Plein Phare" ?
- La quoi.. ? demanda Lazarus avec une moue perdue.
- Rien.

Hermary mis les écouteurs de son ipod sur ses oreilles. Son voisin se gratta la nuque, il ne savait pas vraiment pourquoi, mais il commençait à avoir de sérieux doutes.

[Gear]

On était tous dans le métro. Assis pour la plupart, debout pour les autres.
On savait tous que certains d'entre nous n'en reviendraient pas. Les balottements violents du wagon assommaient doucement les paroles de certains, jusqu'a un silence presque assourdissant.

Je venais de paralyser le pauvre familier démoniaque juste avant que Myk lui ai placé un tel coup dans la tronche, qu'il n'a sûrement même pas eu le temps de voir sa vie défiler devant lui.

On aurait pu comparer la scène à un saut militaire en parachute. Le silence était là, dominé par un bruit impressionant.

A chacun sa manière de se concentrer.

Pour ma part, j'essayais de me calmer. Yeux clos, j'avais peur que le plan, Mon plan, ne fonctionne pas. Où même que certains ne l'appliquent pas.

Toujours est il que nous etions tous ensemble, tel un regiment motivé comme jamais, près à toutes situations. Je me sentais en pleine forme, si bien que j'avais dejà récupéré de ma paralysie lorsque les portes du métro s'ouvrèrent..

[Nhomas Scylle]

Chacun essayait, à sa manière, de se concentrer. Certains laissaient vibrer leurs tympans au rythme de leurs ipods, d'autres tiraient des tronches serviles - suspectant sans doute un de leurs supérieurs d'être dans la rame - alors que les derniers vaquaient à leurs occupations.

Une petite fille aux nattes fort bien tressées fixait un type à la peau sombre, installé accroupi à quelques pas d'elle. Suspectant une malversation la gosse fît un pas en avant pour observer le type sous un autre angle. Faisait elle parti de la faction angélique ? démoniaque ? troisième force ?

Et bien, nan. Car la réalité était bien pire. C'était une...

" Vous êtes un super-héros ?" demanda t elle d'une voix chevrotante, ayant définitivement échappé à l'attention de sa mère.

... Groupie.

" Possible " répondit un Black aux muscles déliés, désormais accroupi auprès d'elle.

" Votre costume, il est sous vos vêtements ? " annonça t elle d'un air inquisiteur.

" Possible ! " dit il en se redressant, sentant arriver à terme la période de calme qu'il avait réussi à extorquer en ayant une nouvelle fois changé de look.

Haut moulant à capuche, rabattue, laissant à peine filtrer ses cheveux couleur Sorcière, tranchant sur sa peau sombre. Une ceinture au message racôleur "Born To Be Immor[t]al" portée sur un pantalon aux lignes épurées griffé d'un fort peu aimable couturier, le tour évasé sur une paire de chaussures surpiquées, tiré d'un encore artisanal atelier.

Une adolescente voisine se hissa haut sur ses pieds, avant de se réinstaller, muette, comme frappée de stupeur.

... Groupie.

Un premier flash photo portable - donc floue et foireux - se fit entendre, alors que l'on faisait place autour de l'Ephèbe qui, loin de se replier sur lui même, prenait la pose. Successivement, il prit la pose, serra une paire de mains, aida une dame à récupérer son sac en bandant excessivement ses biceps, répondant à chaque objectif d'un sourire éclatant, adressant un mot gentil pour chacun.

Peu à peu le mot passait et la rumeur enflait, d'humain à humain, parfois d'humain à Ange, déguisé en humain, de familier n'en ayant cure à vieille dame désabusée. Chacun prenait la mesure de l'évènement, surtout ceux qui tentaient de se concentrer.

" Fais le nous ! Comme dans ton dernier spot ! " lança un Dude en mal d'émotions.

Le Guy centre de gravité de la rame prit la pose, menaçant d'un air menaçant - c'est une répétition pour vous montrer qu'il ne joue que moyennement - , se préparant à donner la réplique à un de ses fans.

FanaBoy - " Alors... Vous avez laissé quelquechose pour nous ?"

Actor's studio - Air menaçant - " Rien que des Morts ! "

- Applaudissements et vivas, les gens adOrent quand il fait ça... -

Ainsi en allait la vie et les métros, en Immac. On pouvait aller au travail, comme depuis des années, des décennies, des siècles... et se retrouver face à l'acteur le plus Emo-Cute de l'année et pouvoir le féliciter sur son prochain Action Movie.

Ya pas à cafter.

Da Boss RulZ the Nation.
Da Boss RulZ Immac.

[Toriah]

Le métro et le bus, décidemment, ça manquait de classe... Et de confort. Après avoir plopé une pouffiasse de cornue en guise de snack à cette opération avant de partir, Toriah avait royalement jeté son dévolu sur une phedra confortable abandonnée toutes portières ouvertes dans la vieille ville, la clef sur le contact avant de passer tout le trajet à sommeiller afin d'être fraîche à son arrivée.

Cependant, la nervosité commençait à se faire sentir... Notamment à cause de ces cons de piétons qui leur bloquaient la route, en premier lieu desquels... Une putain de goule !

La trouille s'exprime différemment selon les individus... Et Toriah, elle, était du genre à rouler sur ce qui lui faisait peur en hurlant quelques mother fucker avant d'envoyer au monde entier la note pour l'avoir débarrassé de cette chair pourrissante ambulante.

Malheureusement (ou heureusement, c'est selon), Toriah n'avait pas le volant, auquel cas la solution était de retenir ses hurlements et de trouer le mort-vivant à distance, ce qu'elle fit avec brio et un sourire sauvage en voyant la goule s'étaler comme une merde et de jeter victorieusement en direction de Ian :

- Vas-y mon coeur rouuuuuuuuuuuuuuuule !

[Ian]

- La prochaine fois que tu me dis que tu ne sers à rien en combat, je te mets une fessée mon amour.

Ian avait dû appuyer sur le champignon pour ne pas arriver en retard. Ils étaient là, synchro, tout était OK, si ce n'étaient cette tripotée de pourritures communistes ou non, mais pourritures en tout état de cause au vu de l'état avancé de décomposition de leurs chairs.

Il sentait la nervosité de sa compagne et l'élagage avait tranquillement commencé. Le crépuscule tombait enfin, arrachant à Nyrielle, il l'entendait dans sa radio, un cri de femme comblée (comme quoi, il suffit parfois de pas grand chose).

Il pressa un bouton de l'autoradio.

[Amiral Orange]

L'Amiral se fait chier dans le bus, mais d'un force ... regardant la route, qui défilait la vitesse d'un escargot anémique, puis posant son regard sur les autres, en particulier Siwa, mais aussi de temps à autre ce familier qui s'était tapé l'incruste à la demande de son propriétaire ange et qui avait vraiment un air ahuri.

Regard à nouveau à travers les vitres. Nettoyage de la buée. Ca y est nous sommes en terrain hostile. Morts vivants, invisibles, et surtout démons repérés. Pendant ce temps l'enfer s'approche alors que le ciel tombe tel le glas d'une période néfaste dont il avait failli oublier les effets pervers.

Il fumerait bien une clope, mais il n'en a pas. Il boirait bien, mais il n'a rien à boire. Il pourrait se ... non oubliez ça vous n'avez rien lu, de toutes façons il n'a pas de magazine à disposition. Re-soupir. Il réfléchit alors au plan, et commence à douter. Sera t il d'une quelconque utilité, surtout sans arme à disposition ? On verra bien sur place. Au pire il suffira de se servir.

Il n'est pas le seul à se poser des questions d'ailleurs. Hum ... to bluff or not to bluff ? That's the fucking question. C'est dans ces moments là, que the Amiral Way of Life reprend le dessus.

Ok guys, on est là pour passer un grand moment tous en famille. Je suis sûr qu'ils vont aimer alors je compte sur tout le monde pour donner le meilleur de lui même. Et le meilleur de nous même, c'est pas de la merde ! Capiche ?

Fiuuu ...

[Nyrielle]

It isn't justice, it's a covert assignement, a hired hit. Will you do this for me? Will you terminate Devils?

Une ombre.
Plaquée au coin d'un mur, les sens en alerte, elle attendait patiemment. Ses longs cheveux d'ébène flottants autour d'un visage à la peau d'albâtre encadrait un visage parfaitement immobile.
L'endroit, éclairé d'une lumière froide et tremblante par des néons d'un autre âge, était plongé dans un silence entrecoupé parfois de quelques hurlements d'Outretombe tout droit sortis du gosiers des quelques morts vivants qui vivaient la.

Furtivement, elle pianota sur un appareil dernier cri -assaut fatal à ses finances- pour prendre connaissance de la situation. Le petit appareil noir émit un faible son avant de cracher des lignes et des lignes d'informations incompréhensibles pour le commun des mortels.

Total real-time battlefield control.

Elle regarda sa montre.
5 minutes.

Les secondes passèrent, irréelles, alors qu'elle attendait la. Seraient ils tous la? Tout se passerait il bien? Elle l'espérait. Trop de nuits blanches et d'efforts ne pouvaient pas se solder par un échec.
Tout devait bien se passer.

Le bruit assourdissant d'un métro qui surgit, des portes qui s'ouvrent, des bruits de pas.
Nombreux. Les choses sérieuses allaient enfin commencer.