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Les Plaines Pourpres
#1
L'homme en noir rajusta le chapeau a larges bords qui le protégeait du soleil, et recommença a pomper.

La draisine avancait en grincant a chaque va-et-vient du bras métallique. Les rails chauffés a blanc reflétaient les rayons du soleil en d'ardents et fugaces éclats.
Des gouttes de sueur perlaient sur son front, roulant lentement sur le parchemin de sa peau burinée par le soleil.

Ses yeux étaient dissimulés dans l’ombre de son chapeau, mais son nez comme un bec de rapace et son sourire crispé tranchaient sur la barbe naissante qui couvrait ses joues crevassées. Les blancs supportent mal le soleil.

L'homme en noir était mince, d’une stature élancée, et devait visiblement déployer de pénibles efforts pour relancer la machine. Son chapeau caractéristique des scouts cheyennes de l’armée des U.S. de la fin du XIXeme était planté de deux plumes de vautour, sèches et craquelées.
Sa longue veste de cuir cachait toute la partie gauche de son corps, et c’est d’un bras que l’homme en noir actionnait la pompe de la draisine.

Sur son torse étaient épinglés une poignée de badges, à la signification désormais inconnue pour lui mais pourtant tellement rassurants, comme les restes d'un passé qui appartient déjà au domaine des rêves éteints. L'homme en noir ne se posait jamais trop de questions.
Le premier était un symbole "Peace and Love ", le deuxieme représentait un smiley avec une balle dans la tete, un troisieme comportait juste les initiales "CK", et le dernier, sans doute son préféré mais également le plus mystèrieux, un oeil rouge sang stylisé.

Un holster d'allure artisanale contenant un monstrueux revolver luisant d’énergie malsaine flanquait sa cuisse droite, à portée immédiate de sa main apparente. Il était rattaché par des lanieres de cuir tressé a sa jambe, imprimant des bandes usées sur le jean noir et sale du Voyageur.
Les santiags garnies d’éperons étaient couvertes de la poussière de mille déserts, les talons usés par les mille lieues parcourues par le Voyageur, en d’autres temps, et d’autres endroits.

Sans qu'il sache trop pourquoi, une mélodie traversa la brume trouble de sa mémoire dévastée et se rappela a lui. Les lèvres charnues et desséchées de l’homme en noir s’entrouvrirent, chacune laissant sur son opposée de petits débris de peau craquelée. La voix de l’homme se fit entendre, simple râle d’abord, puis murmure enfin audible, rythmé par la cadence du pompage.

Hey, Jude, don't make it bad
Take a sad song and make it better
Remember to let her into your heart
Then you can start to make it better


Le nom des troubadours qui avaient composé cette chanson d’un autre temps lui revint également en mémoire : the Beetles. Curieux nom pour des musiciens.

Hey, Jude, don't be afraid
You were made to go out and get her
The minute you let her under your skin
Then you begin to make it better


Le Voyageur s’interrompit, apercevant au loin le but de son trajet : une gare.

Il parcourut les derniers miles avec le même calme, ses yeux de faucon scrutant les moindres détails de la bordure de la ville.
D’ici, il pouvait déjà distinguer le mot écrit sur un panneau de métal très peu rouillé, chose rare à sa connaissance : IMMAC/SABLES.

L’homme en noir avait visité de nombreux endroits, certains exotiques, d'autres familiers, mais IMMAC ne faisait vibrer aucune des cordes usées de sa mémoire. Un nom de code, peut-être.

Sa surprise grandit d’un cran, bien qu’il n’en laisse rien paraître, en approchant des premiers batiments. Cette ville semblait presque intacte.
Comme rappelés à sa mémoire par association, des images de repas fumants, de lits propres et de bains moussants se précipitèrent sous son crâne.

L'homme regarda vers les étoiles lorsqu’il arriva a deux jets de pierre des premiers bâtiments, et malgré les lumières de la ville naissant dans ce soir d’été (le soir, déjà !), il eut une vision suffisament claire des constellations le surplombant pour estimer le moment de la journée. Plus que quelques heures à attendre.

Le Voyageur abandona son antique véhicule a bonne distance de la gare, et au lieu de rentrer en ville, s'en éloigna rapidement, coupant a travers la prairie au Nord en se fondant dans l’obscurité.

Sous le couvert d’un abri rocheux, il entreprit de faire un feu. Ils n’allaient plus tarder à présent.
Lorsque les flammes dansèrent dans la nuit, l’homme en noir déjeuna d’une portion de viande séchée, bu une gorgée d’un liquide douteux, rota et roula une cigarette qu’il fuma silencieusement jusqu’a ce que le mégot lui brûle les levres.

Il sortit de son sac un rouleau de peau de chamois, et l’étendit cérémonieusement à plat devant lui. Il entreprit ensuite de démonter intégralement son maléfique revolver, et en nettoya les pièces religieusement, gestes répétés des miliers de fois au cours de sa longue existence, écoutant le crépitement du bois en train de se consumer.
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#2
Ils étaient en retard, et si l’Homme en Noir avait bien horreur d’une chose, c’était du manque de ponctualité. Un retard signifiait pour lui soit un manque total de considération, ce qu’il haïssait, soit qu’un imprévu était arrivé. Les imprévus, encore un truc qu’il ne supportait pas…

L’Homme en Noir sourit en réalisant qu’il pouvait completer a loisir la liste des choses qu’il détestait, il n’en verrait sans doute jamais la fin.
Le Voyageur finit de remonter les pieces de son revolver, fit rouler le barillet contre sa cuisse, portant ensuite l’arme devant ses yeux, et rabattant le cylindre de métal finement ouvragé d’un mouvement sec du poignet.
Collant presque l’arme maudite a son oreille, il en fit jouer le chien, écoutant attentivement les moindres frottements du métal, puis pressa la gachette, provoquant un claquement sec et froid qui lui arracha un rictus satisfait.

Ses pensées retournerent aux deux freres dont il attendait la venue.
Il ne pouvait guere leur en vouloir, Ils avaient sans doute eu un long chemin a parcourir, et de toute maniere, les évenements prenaient toujours une tournure particuliere en leur présence.

Rengainant son Colt ‘Rebel Navy’ 1851 sur lequel de démoniaques symboles étaient gravés, l’Homme en Noir se laissa hypnotiser par les flammes dansantes de son bivouac.
Comme a chaque fois qu’il revait eveillé, l’Homme en Noir sentit son esprit se détacher de son corps, et des bribes de son passé se rappelerent a son souvenir – comme toujours, par associations d’idées, images floues et mélangées, légers fragments épars qu’il laissait venir a lui, portés par le vent de sa mémoire en ruine.





Dead Man’s Canyon, Oklahoma 1875


Un sabot ferré a la mode de l’armée confédérée vient écraser un scorpion couleur sable, coupant en deux l’arthropode agonisant.
Trois silhouettes a cheval se découpent au sommet de la falaise qui surplombe
Three-Teeth Town, une petite colonie de chercheurs d’or, crevant de faim et de chaud sur ces terres désolées, juste bonnes pour les crotales et les vautours nécrophages.

Fondée il y a bien des années par un groupe de ‘49ers’ malchanceux, la colonie péreclite et se meurt lentement sous le soleil de plomb qui brule les terres, les peaux et les esprits assez fous pour venir vivre en cet endroit.

Apres etre restés quelques minutes au sommet du surplomb rocheux, les cavaliers tournent bride et s’éloignent au petit galop vers l’éboulis permettant de descendre sur la ville.

Tandis que l’une des silhouettes s’engage résolument vers l’une des deux entrées de la cité miniere, les deux autres disparaissent au loin, s’évanouissant dans les crevasses labyrinthiques du Canyon de l’Homme Mort situé a quelque distance de la ville.

Ralentissant le pas de sa monture, le cavalier qui pénetre en ville en profite pour scruter de ses yeux d’aigle les batiments usés qui composent ce petit bout d’enfer. Intégralement de noir vétu, l’homme, que nous appelerons l’Homme en Noir pour faire simple, ne manque pas d’attirer les regards torves des mineurs alcooliques abbatus par l’étouffante chaleur, claudiquants ou avachis sur les perrons des batiments qui encadrent l’allée centrale de la ville.

L’Homme en Noir emprunte l’unique rue dans un silence de mort, seulement rompu par des crachats méprisants ou le battement d’un volet mal fermé contre la façade du
“Merry Digger”, un magasin proposant derriere ses vitres sales tout un assortiment d’outils et de materiel de mineur.

Apres avoir stoppé sa monture (d’un noir de jais également) devant l’unique saloon de la ville, malicieusement appelé le
“Dead Man’s Last Shot”, l’Homme en Noir en descend d’un geste habitué, ne s’aidant que de sa main droite pour maintenir son équilibre.
Il enroule d’un mouvement lache les rennes de sa monture au poteau prévu a cet effet, et franchit les quelques marches le séparant de la porte a double-battants de l’établissement.

Dans la piece enfumée, fleurant bon les effluves d’alcool frelaté et le tabac de mauvaise qualité, le piano cesse de jouer et tous les regards se fixent en douce sur l’étranger, et en plus ca rime. Ce dernier avance vers le comptoir, faisant résonner ses éperons a chaque foulée, et abandonnant dans son sillage des nuages de sable poussiereux.

Arrivé devant l’imposant barman, homme au teint rougeaud et aux moustaches épaisses, l’Homme en Noir sort d’une poche interieure de sa veste un fin cigarillo, qu’il allume d’une allumette frottée contre son jean hors-d’age. Il tire quelques bouffées ameres et recrache la fumée par les narines.


“Qu’est qu’on vous sert, étranger ?”

“ Un whisky”

Le Barman s’execute.

“Je suis venu voir Mr. O’Flagherty”

“Vous tombez de malchance, il n’est pas la aujourd’hui. Il est en déplacement a Tulsa cette semaine.”

L’Homme en Noir repére alors le mouvement des yeux du Barman, décalés une fraction de seconde par-dessus de son épaule. Une fraction de seconde, c’est dix fois plus qu’il n’en faut pour l’Homme en Noir. Il repere dans le reflet de son verre l’homme qui leve son arme derriere lui. Ses doigts qui tennaient le verre un instant avant disparaissent , tout comme son bras, et se retrouvent dans un souffle sur la crosse de son revolver.
Se retourner d’un fléchissement des genoux, dégainer l’arme, abattre le chien puis presser la détente, l’agresseur ne voit rien de tout cela, il n’entend que la détonation. Un choc sourd a la main droite ; il est touché.

Mais pas mort, et il brandit ce qu’il croit etre son arme, et qui n’est en fait qu’un moignon se terminant a la fin de son avant-bras par un enchevetrement anarchique d’os, de tendons et de morceaux de chair fumante.

L’homme pousse un hurlement, saisit son avant-bras entre ses mains crasseuses et se retourne, a la recherche de sa main perdue. Celle-ci est dans la rue, tenant encore d’un doigt nonchalant le revolver. Un chien errant vient a passer, renifle la chose et s’en empare, courant déguster son inespéré repas a l’ombre de quelque grange. Le mutilé rugit, et s’élance en pleurs a la poursuite du canidé.

Les clients du saloon échangent des regards circonspects, et décident du commun accord des foules ne voulant pas d’ennuis de retourner a leurs pokers, bieres et potins, sous les notes improbables du piano.

L’Homme en Noir rengaine son arme et se retourne vers le Barman.


“Je disais donc, que je suis venu voir Mr. O’Flagherty”

Le Barman déglutit péniblement.

“Dans son bureau, premier porte a droite a l’étage”

L’Homme en Noir siffle ce qui reste de son verre de whisky, et sans un mot se dirige vers les escaliers, qu’il gravit a grandes enjambées.

Premiere porte a droite.

L’Homme en Noir frappe, entend un bougonnement et ouvre la porte.
Au fond de la piece, face a lui, planté dans un fauteuil énorme, les mains comme des battoirs posées sur un bureau non moins impressionant, un type obese, le crane luisant de sueur, engoncé dans un costume ridicule par cette chaleur, fume un cigare de la taille d’un totem sioux.
Sa voix rauque est typique de celle des sales types qui peuplent l’Ouest sauvage et mysterieux en ces années-la.


“Qui etes-vous ? Qui vous a permis d’entrer ?”

Celle de Flagg, au contraire, est suave et sirupeuse. La voix d’un putain de serpent vicieux a la langue fourchue.

“Mon nom est Flagg. Randall Flagg. Et, ne vous en déplaise, je rentre a peu pres ou je le souhaite, lorsque le besoin s’en fait sentir.

Je suis mandé par…”

“Je sais tres bien qui vous envoie. La C.K. Corporation. Mais si vous etes venu d’Atlanta, vous avez fait le chemin pour rien. Ils savent déja que je ne vendrais rien !”

“Je suis navré de vous contredire, Mr. O’Flagherty, mais il semble bien qu’au contraire, vous allez accepter. Mes employeurs vous font une offre que vous ne pourrez refuser.”

“HA ! HA ! HA !

Je suis bien curieux de voir leur pretexte cette fois. Toujours ce projet fumeux de chemin de fer ? Je sais tres bien que c’est pour l’or qu’ils sont la.”

“Allons, Mr O’Flagherty, vous comme moi savons tres bien que ces mines ne contiennent que des métaux ordinaires, meme pas de quoi assurer la survie de ce trou minable.
La C.K. Corporation a d’autres projets bien plus ambitieux pour ces contrées, et vous offre – écoutez bien - $25 du mile carré. $10 000 en cash, Mr. O’Flagherty.
Bien plus que ne vous rapporterons jamais votre saloon, votre salaire de juge, de Maire et de propriétaire des Mines O’Flagherty en des années.”

“BWAAAAHAHA !

Ecoutez moi espece de coyote a foie jaune ! Je sais qu’il y a de l’or dans ces mines et vous le savez tres bien également.
Je suis l’unique propriétaire de cette contrée par decret de Washington, j'ai un titre de propriété signé par le président Franklin Pierce lui-meme, et ce n’est pas une bande organisée de desperados en cols blancs qui m’en dépossedera.

Maintenant Mr. Flagg, si vous ne voulez pas passer la nuit dans notre magnifique prison financée par les Mines O’Flagherty je vous conseille de galoper aussi vite que vous pourrez dans la direction dont vous venez.”

“Tres bien Mr O’Flagherty, je modifie l’offre : $20 du mile carré. Ce qui vous ferait $8 000, c’est toujours une jolie somme.”

“Quoi ? Vous baissez l’offre quand vous marchandez, vous ?”

“Refléchissez-y a deux fois Mr. O’Flagherty, l’offre va bientot passer a $10 du mile carré. Tenez, voici le contrat, vous avez juste a signer nous nous occupons du reste.”

“HORS DE MA VUE Misérable !
Sortez de mon bureau et allez au Diable !”

“Pas avant d’avoir terminé ce pour quoi on me paie, Mr. O’Flagherty.”

Avec la rapidité d’un rattle-snake enragé, Flagg est debout, son revolver brandit au-dessus de lui, et la crosse s’abat a une vitesse foudroyante sur le sommet du crane du patron de la ville.
L’instant d’apres, Flagg maintient la tete de l’obese sur le bureau, l’oeil écrasé contre le contrat. Il vient planter le canon de son revolver dans l’oreille du gros homme, et redresse le chien.


“Tu vas signer ce fucking document, sale tas-de-viande. Tu t’engages a faire don de tes terres a la C.K. Corporation et en échange tu restes en vie. Autant que possible, mes employeurs tiennent a faire dans la légalité. Mais crois-moi, que ce soit ta signature ou ta cervelle, il y aura quelque chose d’apposé sur ce contrat dans moins d’une minute.”

Clignant des yeux affolés pour en chasser le sang, l’obese bave une derniere fois :

“Go to Hell, you son-of-a-..”

O’Flagherty ne peut finir sa phrase. La seule pensée qui, accompagnée par la balle maudite, traverse son cerveau en cet instant est qu’un revolver n’a jamais fait autant de bruit dans l’histoire de l’Ouest.

“Ma mere était une sainte. Bon, plan B.”

L’Homme en Noir sort un miroir de sa poche, se penche a la fenetre et envoie quelques mysterieux signaux vers la crete surplombant la ville.
Il ne peut s'empecher de murmurer les mots qu'il envoie en code :

"Plan B... On... massacre... tout... le... monde... maintenant"

Quelques secondes plus tard, d’autres flashs lui répondent

L’Homme en Noir sourit, puis tend l'oreille et n’a que le temps de se retourner pour voir deux hommes du saloon se ruer dans le bureau, armes au poing. Deux balles font éclater leurs deux cranes, et les hommes s’étalent de tout leur long sur le tapis délavé.

D’un bond, l’Homme en Noir est en haut des escaliers. Il part d’un rire éclatant et tire au hasard sur les hommes épouvantés qui commencent a s’enfuir en paniquant.
Une balle arrache la jambe restante d’un unijambiste, une autre rentre par l’arriere du crane du pianiste et en ressort par son oeil gauche, emportant avec elle une bonne moitié de son visage.


“Il n’a plus de balles !”, rugit un jeune type arborant un insigne étoilé – l’adjoint du shérif O’Flagherty sans doute…

Ce simple humain ignore bien sur que le coté amusant et fort pratique des armes maudites, c’est qu’il n’y a pas besoin de les recharger. La gorge de l’adjoint éclate comme une tomate trop mure et la violence du choc projette le corps a travers la fenetre, l’air résonnant encore du coup de tonnerre que crache le canon infernal.

L’Homme en Noir tire quelques balles en direction des bouteilles alignées derriere le comptoir, et y jette une allumette. L’alcool prend feu apres quelques secondes, et l’Homme en Noir sort enfin de saloon, maintenant son chapeau de sa main armée.

Dans la rue, c’est l’enfer.

De lourdes colonnes de fumée noire envahissent le ciel bleu et l’obscurcissent. Des corps jonchent la rue, cernée par les batiments en flamme. Des incendies semblent naitre de nulle part – et en vérité, c’est le cas, explosant les fenetres et se propageant a une vitesse folle sur les facades déssechées.

Entre deux colonnes de fumée, Flagg distingue deux silhouettes accroupies sur des toits épargnés. Deux hommes, torse-nu, a l'agilité féline, au corps svelte, puissant et musculeux, bandent

(kof ! kof ! - excusez moi)

leurs arcs avec la rapidité caracteristiques des enfants des plaines sauvages. Poussant des cris guerriers, ils décochent leurs fleches meurtrieres sur les innocents mineurs et leurs familles qui évacuent les batiments en feu.

Le reste du souvenir est flou, et la vision perd de sa fraicheur et de sa netteté au fur et a mesure que Flagg reprend conscience. Comme sur une photographie en proie aux flammes, il se voit, riant comme un damné, crachant la mort de son revolver en tournant sur lui meme, et l’image s’estompe, dévorée par le néant qui a envahit sa mémoire.





S’ébrouant, l’Homme en Noir raviva le feu mourrant, et regarda autour de lui les terrains vagues de la Banlieue Nord-Est de la ville d’Immac, spectacle saisissant s’il en est.


“Bon putain, ils font quoi…”
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#3
Les derniers rayons d'un soleil mourant illuminaient le visage buriné du vieil homme assis en tailleur sur le toit de l'entrepot désaffecté.

Ses yeux aux pupilles délavées fixent le soleil sans ciller


La main posée sur la tôle frissonante, il écoutait la plainte de la terre relayée par le métal et le verre de la construction.

Sa respiration, lente et profonde, s'accorde avec celle de la planète

My words were useless again
My words were useless again
My words were useless ...
again


Il était en retard mais celà lui importait peu. Il n'aurait pas pu laisser l'astre se coucher seul. Sa présence était importante. Là-bas, à ce moment. Ici et maintenant.

I could'nt heal their wounds
I could'nt heal their wounds
I could'nt
heal
their wounds


Personne ne pouvait nier que le soleil était une boule de gaz en fusion. Non, personne.
Mais qui savait qu'il était aussi le coeur de Tanaka, le Père ?
Qui savait que la lune était celui d'Ameohne'e, la Mère ?
Qui entendait encore le chant des dieux dans la plainte des loups ?



Une fois le soleil couché il se leva et entreprit de descendre précautioneusement de son perchoir. La nuit était douce, le ciel dégagé. Il n'aurait aucun mal à rejoindre sa destination : Immac sur Sables.
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#4
Etrange mécanisme que celui de la mémoire. Encore plus lorsqu'il s'agit de celle d'un amnésique.

Est-ce la vue des forces de police venant l'arrêter qui provoque le retour clair, brillant et intact de cette mélopée douce-amère ?
Au moment où on lui passe les menottes, Randall Flagg ne prête attention qu'à ce message venu du fond de son âme, un message du Crimson King lui-même peut-être...
Les sirènes et les gyrophares sont oubliés, et un sourire vient illuminer le visage de l'Homme en Noir, au fur et à mesure que les mots passent ses lèvres dans un souffle presque inaudible...




I have stridden the fuming way
of sun-hammered tracks and
smashed cinders;
I have ridden rails
and bummed sterno in the
gantry silence of hob jungles:
I am a dark man.
I have ridden rails
and passed the smuggery
of desperate houses with counterfeit chimneys
and heard from the outside
the inside clink of cocktail ice
while closed doors broke the world -
and over it all a savage sickle moon
that bummed my eyes with bones of light.
I have slept in glaring swamps
where musk-reek rose
to mix with the sex smell of rotting cypress stumps
where witch fire clung in sunken
psycho spheres of baptism -
and heard the suck of shadows
where a gutted columned house
leeched with vines
speaks to an overhung mushroom sky
I have fed dimes to cold machines
in all night filling stations
while traffic in a mad and flowing flame,
streaked red in six lanes of darkness,
and breathed the cleaver hitchhike wind
within the breakdown lane with thumb levelled
and saw shadowed faces made complacent
with heaters behind safety glass
faces that rose like complacent moons
in riven monster orbits.
and in a sudden jugular flash
cold as the center of a sun
I forced a girl in a field of wheat
and left her sprawled with the virgin bread
a savage sacrifice
and a sign to those who creep in
fixed ways:
I am a dark man.





hrp / Je n'ai nul talent pour écrire des poèmes, celui-ci est l'oeuvre de S. King, à qui je dois beaucoup.
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