02-26-2005, 01:24 PM
- Préface... ou préambule... ou que sais-je ?
Pourquoi ? Oui, pourquoi écrire ? Pour être lu j’imagine ? En tout cas, c’est un besoin, presque aussi terrible que celui qui m’habite désormais… et si jouissif pourtant.
Est-ce mal ? Néanmoins, que l’Administration n’ait jamais l’occasion de lire ça…
Ces feuilles sont destinées à s’envoler, pour être lues, pour qu’on les découvre, pour qu’on sache. Qu’on sache quoi ? Peut-être qu’on sache que le Grand Jeu peut paraître amusant pour ceux au dessus, c’est mon point de vue. On dirait… une [Passage comme effacé]. Je tache ce papier blanc de mon écriture disgracieuse [L’écriture est peut-être pas disgracieuse, mais en tout cas, c’est pas un/une calligraphe qui l’a rédigé(e)… euh, je m’égare] parce qu’il le faut, simplement. Le doute s’insinue dans nos actes…
- Pensée du jour : De toute façon, les feuilles sont sœurs, les feuilles vont par deux.
- Assouvissement
Neige… blanche, tu recouvres la vie de ton joli linceul. Hypocrite tu étouffes mes sons quand je l’approche, et parmi la foule je me fonds sans mal. Là je m’arrête. Elle est juste en face de moi : Anne-Marie Hurbize. « Ma cible », ils ont dit. Elle me tourne le dos, encore innocente, sans doute, et j’aime à l’imaginer sans peur, sans aucune idée de ce qui va se passer. Je souris légèrement. Pour tout dire, mon pouls s’est accéléré, ma chair est tendue, je … stresse ? Réaction particulièrement humaine et totalement désagréable… Ce n’est pas mon premier meurtre d’ailleurs…
- Pensée de l’instant : Pourquoi je n’ai pas de plumes ?
Je doute. L’Administration m’a ordonnée de l’abattre. Mais, ne serrait-ce pas mieux de lui parler ? De l’aider à entrevoir la lumière et de la ramener sur le doux chemin de Son Service ? Une voix au fond de moi me murmure que … Non. Mes doigts se referment sur le couteau, ma poitrine se soulève, mes lèvres se pincent, je me mord même la lèvre inférieure, en proie au doute, un seul instant. Puis un sourire, et je reprend toute la confiance que possède mon corps. Non, aucun doute, le démon incarné doit d’abord être ouvert aux arguments, le geste puis le verbe… Un démon allait retourner en enfer avant que la nuit ne tombe…
- Pensée éternelle : la grâce du flocon nous fait penser qu’Elle est parfaite.
Le tout n’a duré à peine qu’une seconde. Je m’élance dans le temps, féline je m’assure discrète. Une voiture passe juste à côté de moi, de ma cible, l’attention des gens se détournent par miracle, je suis une ombre et … elle est morte. Le sang n’a même pas jailli, mon couteau n’a laissé aucune chance… Quelques secondes…
Mon couteau est rangé, je m’avance vers la bouche de métro, aucun scandale, aucun bruit, aucune image, mais je doute… Et si quelqu’un m’avait vu ? Non, aucun trouble. Je décroche mon portable, naturelle, je vois mon image dans un reflet presque imaginaire. Et je me plais. Ça sonne plusieurs fois avant qu’il ne décroche :
- Mission réussie…
- Déjà ? Attendez je véri…exact.
Machinalement, après qu’il ait raccroché, j’entendis presque mes lèvres former une parodie : « Votre compte est crédité de etc. ». Etrangement sur le coup, je n’étais pas rassasiée, toujours cette envie morbide. Peut-être parce que j’étais allée trop vite ? Hmm. Néanmoins… Les images commencèrent à affluer. Le contact froid, digne d’une ambiance chirurgicale, de mon couteau me laissait dérivante. Et la scène me repasse devant les yeux. Le hoquet de surprise au moment où la lame pénètre la chair, cette délicieuse lueur au fond des yeux quand l’âme commence à ne plus avoir d’emprise sur le corps, le ravissement des lèvres qui tremblotent, cette peau qui se hérisse comme si elle me … remerciait ? Oui, sans doute, sans aucun doute, elle me remerciait de l’avoir libérée de sa condition… Et surtout, ce sentiment si puissant, ce sentiment si farouche du travail bien fait, cette jouissance d’avoir fait un tour de force : faire disparaître un démon en plein milieu d’une foule, sans que personne ne se doute de qui l’a fait… Le Meurtre dans sa forme exquise, aucun témoin, aucune trace, aucun risque. A la fontaine de la violence purificatrice je m’étais assouvie…
Mon portable sonne à nouveau :
- On une mission pour toi, s’tu veux…
- Déballe manesska, c’quoi ?
- Assassinat …
- Pensée concrète : Est-ce vraiment digne d’un de Ses Serviteurs ?
Autre pensée : Personne ne devra savoir qui je suis, toujours être faux… J’ai… peur…
- Pensée concrète : Est-ce vraiment digne d’un de Ses Serviteurs ?
J’avançais à nouveau, le couteau de combat bien en main, vive et féline. Encore un qui s’en irait rejoindre les enfers cette nuit enneigée. Mon pouce se frotte contre l’arme, et j’y repense. C’est un cadeau avant tout, enfin un cadeau, la récompense d’un jeu, venant de mon parrain... ou ma marraine, suivant les points de vue. Magnifique objet, pourtant classique, mais déjà je l’ai marqué. Oui, je le marquerai encore…
Je m’arrête au bord de la route, et j’observe. Il ne doit pas être loin, j’ai encore le temps, j’ai le temps, j’ai le temps de souffler un peu. Je n’y répugne plus. Ou plutôt, j’y répugnerai devant tous, aucun ne doit savoir, mais je serais deux. Suis-je schizophrène ? Non, je ne le suis pas. Je suis Un, encore. Je devrais le rester, tout en combattant « ça ». Néanmoins…
- Question : Comment un « cadeau » est devenu pour moi l’acceptation de mon statut parmi vous et le symbole de ma soif… ?
J’inspire profondément, puis j’expire, longuement. Je murmure :
- "Quand ils ne sauraient se taire,
Pendant qu’elle chute lentement,
Tandis que ma soif se terre,
Je l’entends gronder, profondément…
Pourtant il m’est interdit,
De répandre ton sang,
D’étendre ta vie,
Sur le linceul blanc.
Laisse-moi savourer, toi sans futur,
Le plaisir de te voir mourir,
Car tu n’as de vie que pour m’assouvir,
Je suis le loup parmi les brebis impures…"
- "Quand ils ne sauraient se taire,
- Pensée grave : Qu’est-ce que je deviens ?